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Nandanee Soornack: celle que les Mauriciens aiment détester
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Nandanee Soornack: celle que les Mauriciens aiment détester
Le nom de la «mystérieuse» amie de Navin Ramgoolam faisait souvent irruption dans les briefings tenus dans les salles de rédaction. Mais, Nandanee Soornack est véritablement passée de l’ombre à la lumière en 2012. Depuis, elle est restée sous le feu des projecteurs.
Cette année-là, un incident impliquant la Dame en rouge défraye la chronique. Nandanee Soornack, dont le nom est balancé une ou deux fois lors de rassemblements publics, sort de ses gonds. «Ou koné kisana mwa ?» balance l’agent du Parti travailliste (PTr) à l’activiste du MSM, Yogida Sawmynaden, qui l’avait prise en photo lors des municipales de décembre 2012. Des policiers arrachent alors le portable de ce dernier avant de le conduire au poste où il sera interrogé. Sa maison est fouillée le lendemain. Ces faits choquent. Provoquent la colère. Le public crie au scandale. Les lunettes noires de Nandanee Soornack intriguent.
La machinerie se met en branle. Les médias et les Mauriciens s’interrogent sur l’identité de cette femme remplie d’assurance, hautaine, qui a pour partenaires en affaires Kushal Lobine et Rakesh Gooljaury. Et qui est surtout très proche du Premier ministre d’alors…
Les rumeurs enflent, les faits apparaissent au grand jour, les questions pleuvent. Nandanee Soornack demande et obtient – avec une facilité et une rapidité déconcertantes – un gagging order de la Cour suprême, interdisant aux journaux de parler d’elle, arguant qu’il s’agit de sa vie privée et qu’il y va de la protection de son enfant mineur. L’indignation est à son comble. La liberté de la presse est bafouée, les passions se déchaînent, les gens crient au scandale. Ils crachent leur venin. «Qui est cette diva qui se croit tout permis ?»
Les Rouges volent alors à son secours. Le président du PTr, Patrick Assirvaden, montre la presse du doigt. Dans une interview qu’elle nous accorde, Kalyanee Jugoo, la secrétaire générale du parti, déclare que «Mme Soornack est effectivement une bonne activiste, solide. C’est une femme de terrain qui connaît les moindres recoins. Elle ferait une bonne députée».
Le public ne l’entend pas de cette oreille. Pas question qu’on leur impose ce choix. Il a l’impression d’être mené en bateau. «Nou pas aveg» ou encore «les protégés politiques tentent d’imposer leur loi», scandent les internautes. Certains commentaires, non publiables, contiennent des jurons, des insultes ou un mélange des deux. Dédain et mépris prennent le dessus dès qu’un article évoque Nandanee Soornack.
Coup de théâtre
Coup de théâtre, en août 2014, l’express dévoile, en primeur, des photos de Navin Ramgoolam et de Nandanee Soornack. Tous les ingrédients y sont : cigare, séga, whisky, etc. La tempête gagne en intensité. Les Mauriciens voient rouge. Verts de rage, ils descendent la femme d’affaires en flèche. Ce qu’ils ne digèrent pas : les mensonges, les cachotteries, l’opulence, l’indécence, disent-ils. Nandanee Soornack devient également démon aux yeux de l’opinion. Veena Ramgoolam, l’ange. Navin Ramgoolam se défend comme il peut. «Il y a beaucoup de gens qui me persécutent parce que je suis l’homme à abattre. Mais ma vie est un livre ouvert…» Mais le chapitre est loin d’être clos.
Cette relation «adultère» sera l’une des principales armes de guerre de l’alliance Lepep, lors de la campagne électorale, en 2014. Nandanee Soornack est «défendue» par le silence pesant des membres du Mouvement militant mauricien, en alliance avec le PTr. Aux législatives, c’est la débâcle. Le peuple adopte Lepep et son Viré Mam. Le 11 décembre, Nandanee Soornack s’envole pour l’Italie…
La suite, on la connaît. Des procès et des demandes d’extradition qui se soldent par un cuisant échec. Mais les photos, même floues, de Nandanee Soornack, prises lors de son arrestation en Italie, continuent à faire le buzz. La rancoeur des Mauriciens, elle, est toujours visible et audible, dans la rue, sur la Toile.
Mercredi 19 avril, c’est une femme physiquement métamorphosée qui est apparue sur les écrans. Ses habits sont classiques, sobres. Elle est en verve, posée, ne se laisse pas démonter, répond aux questions. Certains sont impressionnés. D’autres blâment les journalistes. D’autres se focalisent sur son visage.
Ce qui est sûr, c’est que la Dame en rouge ne laisse pas insensible. Les Mauriciens n’ont «pas oublié», font ressortir des internautes. «Madonna pou ress Madonna mem si li sant Like aVirgin.»
Les journalistes critiqués
<p>Ils n’étaient pas préparés. Ils n’ont pas su poser les bonnes questions. Les journalistes présents à la conférence de presse de Milan ont également fait les frais des commentaires des internautes. Qu’ont-ils à dire pour leur défense ? Vel Moonien, du <em>Défi Média Group</em>, avance que la femme d’affaires a préféré rester évasive quant à plusieurs de ses questions, choisissant de se réfugier derrière ses avocats. Ryan Jeeawock, de <em>Top FM</em>, affirme qu’il était à Milan en sa qualité de technicien pour assurer le direct. Il n’a fait que poser les questions envoyées par sa rédaction. C’est d’ailleurs grâce à celles-ci que Nandanee Soornack a fait quelques révélations, souligne-t-il. Quant à Ashna Nuckchaddy, de <em>Radio One</em>, elle n’a pas souhaité faire de commentaire à ce propos.</p>
Les questions qu’on se pose
Airway Coffee : mystérieux appel d’offres
Lors de sa conférence de presse réglée comme du papier à musique, Nandanee Soornack a affirmé, à plusieurs reprises, qu’elle est une femme d’affaires qui a réussi grâce à ses efforts, sans aide extérieur. L’installation d’Airway Coffee à l’aéroport s’est faite en toute légalité, alors que toute la procédure concernant les «tenders» a été respectée. Elle aurait ainsi, selon ses dires, participé à l’appel d’offres et Tropical Times, le précédant occupant de l’espace commercial, a bu la tasse face à Airway Coffee.
Après vérification, il se trouve que l’appel d’offres n’a pas été taillé sur mesure pour le tandem Gooljaury-Soornack. Mais le fait que celui-ci l’ait remporté pose problème. Car Airway Coffee ne répondait pas tout à fait aux critères…
Tout commence le 27 mai 2009. Airports of Mauritius (AML) lance un appel d’offres pour quatre espaces commerciaux jusqu’ici occupés par Tropical Times. Et, le document stipule clairement que les soumissionnaires doivent avoir cinq ans d’expérience dans le domaine de la restauration. Mais l’appel d’offres est ensuite relégué aux oubliettes. Personne ne sait qui a soumis quoi. Ou si le nom d’un soumissionnaire a été retenu.
Le 24 décembre de la même année, un deuxième appel d’offres est lancé. Les critères sont moins contraignants, mais celui concernant les cinq années d’expérience est toujours là. Sauf que, cette fois, c’est Airway Coffee qui remporte la bataille face à son concurrent.
Comment ? Pourquoi ? Le mystère reste entier, même si l’on retourne toutes les tables. Toutefois, une source proche du dossier brûlant affirme que «ce n’est pas normal. Même si Rakesh Gooljaury a prétendu qu’il avait produit une lettre prouvant qu’il était consultant auprès d’un restaurateur, on ne peut pas dire que cela équivaut à une expérience dans le domaine». Et d’ajouter : «Un restaurant, c’est une petite entreprise. Rien de comparable à ce qui se fait au niveau d’un aéroport, où la logistique est tout autre et où le nombre d’employés s’élève à une centaine.»
Phrase choc
<p>La femme d’affaires a affirmé qu’elle n’a jamais prononcé la fameuse phrase<em> «ou koné kisana mwa ?»,</em> à cause de laquelle elle est devenue «<em>célèbre».</em> Mais, plusieurs personnes présentes ce jour-là, y compris une journaliste d’une radio privée, affirment le contraire. Une bande sonore a même été diffusée sur les ondes, rappelle-t-elle.</p>
La voiture
<p>Elle ne mène pas la belle vie en Italie. Ne vit pas dans un château. C’est ce qu’a déclaré Nandanee Soornack, qui a ajouté qu’elle ne voyageait pas en BMW comme l’affirment certains, mais en train. Allant même jusqu’à montrer des billets aux journalistes. Mais alors, à qui appartient la berline noire que l’on aperçoit sur les photos montrant l’arrestation de la femme d’affaires en Italie. En zoomant sur le cliché en question, on découvre qu’elle appartient, en fait, à la police italienne.</p>
Le cotomili
La femme d’affaires qui assure, avant son ascension sociale, avoir été couturière ou d’avoir «travay dan lakour», entre autres, a tenu à faire ressortir qu’elle n’a jamais vendu de cotomili. Affirmation que le vice-Premier ministre Showkutally Soodhun s’est empressé de la contredire. Allant jusqu’à avancer que Nandanee Soornack lui avait même offert un bouquet de cette herbe. Les habitants de Carreau-Laliane, où habitait Nandanee Soornack avant son divorce, ne sont pas aussi catégoriques. «Elle n’en a peut-être pas vendu elle-même, mais son ancien mari plantait du cotomili. Enn moman zot finn bizin vandé, non ?» lâche un ancien collègue de Sanjiv Oogarah.
Valises : la bataille des chiffres
<p>A-t-elle vraiment quitté Maurice, le 11 décembre 2014, avec 12 valises remplies de Rs 800 millions ? Nandanee Soornack nie en bloc ces informations fournies par l’hôtel du gouvernement<em>. «Ce jour-là, nous étions quatre à prendre l’avion. Il y avait mon fils, ma belle-fille, leur enfant et moi-même. Je n’avais que deux valises»</em>, a insisté la femme d’affaires, en brandissant ses étiquettes de bagages. Mais aucune précision n’a été fournie sur le nombre total de bagages pendant la conférence de presse. Sur WhatsApp, Nandanee Soornack a affirmé que pour ce voyage, les quatre passagers avaient chacun une valise. Cependant, <em>«j’en avais deux à mon nom car mon petit fils était âgé de deux ans à l’époque. L’une des valises lui appartenait.»</em></p>
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