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Collectionneur: Anil Dhunny, le trésor de «lotel dite»
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Collectionneur: Anil Dhunny, le trésor de «lotel dite»
Son trésor, Anil Dhunny en a hérité. Comme une revanche sur l’histoire. Ce qu’il considère comme l’objet le plus précieux de sa collection : une pièce de monnaie qui «a 250 ans». Noircie par le temps, on peut déchiffrer la date 1767. «C’est une pièce qui était utilisée au temps de la colonie française», suppose-t-il.
Comment l’a-t-il obtenue ? Au départ, ces pièces de monnaie sont conservées par son «dada» (le père de son père). L’histoire aurait pu commencer par «il était une fois». À cette époque, le grand-père d’Anil Dhunny tient un «lotel dite» à Flacq.
Parmi ses clients, des gens qui ont soif, mais qui, soit n’ont pas les moyens de payer, soit s’arrangent pour tromper la vigilance du «dada» Dhunny, en lui refilant de «fausses pièces». Des pièces qui ressemblent à s’y méprendre aux roupies de l’époque. Mais qui ,vérification faite, proviennent soit d’un autre pays, soit d’un autre temps. Parfois, les deux à la fois. Le soir, au moment de balancer les comptes du lotel dite, «quand mon dada trouvait ces pièces, il se contentait de les mettre de côté, sans y prêter attention. Car c’était la preuve que des clients l’avaient volé, sans qu’il ne s’en rende compte sur le coup».
Au fil du temps, les pièces s’accumulent. Le père d’Anil Dhunny, Ramlochun en hérite. «Li pa ti tro pran sa kont», se souvient son fils. Lui-même n’y fait pas très attention. Collectionneur, il s’intéresse d’abord aux «petites choses» comme les plumes. Cela vient aussi sans doute de son métier. Enseignant, Anil Dhunny a été le recteur du Progressive College, à Rivière-du- Rempart. À la fermeture de cet établissement privé, le voilà rector (redundant) au Medco Alex Bhujoharry. «Finalement ces pièces se sont révélées être un blessing in disguise.»
Époque du «char Anna»
Mordu par la passion de la collection, Anil Dhunny se met en tête d’enrichir celle commencée involontairement par son dada. Durant ses études en Inde – cet habitant de Barlow est diplômé d’économie et de sciences politiques, cuvée 1977 de l’université de Baroda – des pièces rares n’échappent pas à son attention.
Rentré au pays, Anil Dhunny profite de sa proximité avec le village voisin d’Antoinette, aujourd’hui Phoolyar. C’est dans la propriété sucrière qui s’y trouvait au XIXe siècle que sont envoyés les 36 premiers travailleurs engagés. «Sur ce site, j’ai ramassé une pièce de l’État de Gwalior en Inde.»
Autre curiosité : une pièce de monnaie minuscule, de la taille d’une pile pour montre. L’occasion de se souvenir de l’époque où l’on parlait de «char Anna», c’est-à-dire 25 sous. Ménageant son effet, notre interlocuteur nous dit : «Imaginez maintenant one quarter Anna.» Voilà qu’il tire une pièce de la largeur d’un ancien cinq sous. Ce sou indien date de 1929.
Parmi les autres objets de valeur : une pièce de monnaie carrée. D’autres, épaisses et massives, avec une calligraphie aux allures islamique.
Anil Dhunny a-t-il recensé et documenté sa collection ? «Ena tro bokou», dit-il simplement. D’ailleurs, ces pièces, c’est dans la simplicité qu’il les conserve. Les plus rares sont dans une boîte en fer-blanc dont la valeur est aussi sentimentale. Car, avec les pièces, le numismate conserve le petit porte-monnaie en mailles d’argent de sa grand-mère. Ainsi que le pluviomètre qu’utilisait «mo dada so frer dan karo».
L’attachement à Mother India est palpable chez ce descendant d’engagé, qui est aussi le président de l’Aapravasi Ghat Trust Fund. Avec fierté, Anil Dhunny a fait imprimer la photo de son ancêtre arrivé à Maurice le 24 juillet 1865, à l’âge de 14 ans. Aujourd’hui, Anil Dhunny est de la quatrième génération de descendants. «J’aurai ma carte Overseas Citizen of India dans les prochains jours.»
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