Cela se pratique depuis plusieurs mois. Le Kolektif Ecoguard a déjà attiré l’attention plus d’une fois sur cette question. Et c’est encore le cas cette fois. Ces actes illégaux se poursuivent malgré les nombreuses dénonciations à la police de l’environnement.

Maurice est signataire de la Convention Ramsar, qui protège les zones humides sous toutes leurs formes, que ce soit les marécages, les terrains inondables et les estuaires. Qui plus est, toutes les zones humides sont protégées sous l’Environmental Protection Act de 2002. Ce sont des terrains qui paraissent secs la majeure partie de l’année et qui sont situés non loin de la plage. Ce qui attire souvent la convoitise des promoteurs immobiliers.

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La majeure partie des terrains dans le Nord et dans l’Ouest de Maurice ont été comblés et cela, sans tenir compte de l’importance des zones humides. Uniquement dans la région de Grand-Baie, entre 1980 et 2009, ce sont 60 % de la superficie des zones humides qui ont disparu.

Les zones humides jouent de nombreux rôles essentiels à l’écosystème et même dans la protection de l’Homme et de l’économie. «Ces endroits ont plusieurs fonctions importantes, l’une d’elles est de servir de rétention d’eau», explique Pierre Baissac, écologiste et consultant environnemental de Diospyros «Ces zones humides absorbent le surplus d’eau de pluie et de ruissellement et servent aussi de système d’assainissement naturel.»

Quand les pluies sont importantes, les zones humides vont absorber et conserver en majeure partie l’eau ruisselante, empêchant ainsi les inondations. Aujourd’hui, dans plusieurs régions de l’ile, là où les zones humides diminuent, il y a des accumulations d’eau conséquentes. Pour pallier le problème, le gouvernement a dû investir massivement dans un système d’évacuation d’eau. Et un Land Drainage Authority Bill a dû être voté il y a quelques mois pour trouver des solutions à l’évacuation du surplus d’eau et ainsi éviter des accidents. Les travaux pour ces évacuations sont conséquents et importants.

Cette rétention d’eau douce permet aussi à l’écosystème marin de maintenir son équilibre. Les récifs coralliens sont extrêmement sensibles à la salinité de l’eau. Les zones humides retiennent l’eau douce et participent à la bonne santé des coraux. L’impact anthropogénique étant déjà important sur les récifs avec la surpêche et la pollution, le comblement des zones humides devient alors une menace de plus.

Autre fonctionnalité importante, les zones humides jouent aussi le rôle de filtre et assainissent l’eau, empêchant celles de ruissellement, chargées en sédiments et en déchets, de se déverser dans le lagon et aussi en arrêtant toutes formes d’engrais pour qu’elles n’aillent pas finir leurs jours dans la mer.

«Les barrières de corail sont sensibles. L’eau avec un peu trop de sédiments ou un peu trop douce va provoquer la mort des coraux et de fil en aiguille, celle de nos lagons», affirme Pierre Baissac. «En plus des sédiments, elle retient les engrais qui favoriseraient la pousse massive des algues, ce qui aurait aussi un effet négatif sur le lagon.»

Civisme

De plus, les zones humides sont des écosystèmes à part entière avec une végétation qui leur est propre. Dans certains cas, ce sont des marécages, d’où l’imbécilité de certains à les combler alors qu’ils sont protégés.

«La problématique de la protection des zones humides est qu’elles ne sont pas toutes répertoriées», explique Vassen Kauppaymuthoo, océanographe. «C’est une problématique de définition des zones humides. Souvent, la loi est contournée parce que la zone humide n’est pas bien définie.»

Il faut aussi savoir qu’une bonne partie des zones humides se trouve sur des terrains privés, ce qui empêche le gouvernement, qui a une méconnaissance de leur existence, d’intervenir. Cependant, si un citoyen découvre une zone humide non recensée sur une propriété privée, il n’est pas tenu par la loi d’en faire part. Cela tient du devoir civique des Mauriciens en raison de l’importance de ces zones humides. L’île est très dépendante du tourisme et la perte des zones humides déclenchera une réaction en chaîne qui mettra en péril le littoral.

«Il y a une valeur économique à protéger les zones humides. Si elles sont comblées immédiatement, elles ne feront pas leur travail et les dégâts se répercuteront sur l’exploitation économique des littoraux», ajoute Vassen Kauppaymuthoo. Les zones humides vivent sous la pression constante du développement urbain. Les inondations du 30 mars 2013 à Port-Louis avec les pertes en vies humaines sont en partie dues à la disparition des zones humides dans la capitale.