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Informatique: comment tirer parti de la technologie blockchain ?

26 juillet 2017, 19:20

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Informatique: comment tirer parti de la technologie blockchain ?

La technologie blockchain suscite un engouement dans divers secteurs par sa capacité à réinventer les structures d’échanges d’informations existantes. Maurice saura-t-elle tirer parti de cette tendance?

Construire un cadre réglementaire adéquat

Face à la révolution qui se dessine avec l’avènement de la technologie blockchain (voir lexique), Maurice est bien décidée à prendre la balle au bond et tirer parti de cette innovation. Sitôt averti de la vague d’opportunités que la technologie blockchain est capable de susciter, le gouvernement a voulu construire un environnement propice à son développement. Mais le hic était l’absence de cadre réglementaire à cet effet. Ce problème a été résolu avec l’adoption d’une réglementation dite sandbox, soit un cadre légal spécifiquement conçu pour l’octroi de permis aux activités qui ne sont pas encore réglementées car trop récentes.

Ceci est désormais possible grâce à la réglementation sandbox, adoptée par l’Economic Development Board Act voté à l’Assemblée nationale le 19 juillet qui offre aux entrepreneurs un cadre réglementaire temporaire. Ce mécanisme permettra au pays de saisir les opportunités qu’offre une activité ou une technologieinnovante. Des conditions spécifiques sont attachées à l’octroi d’une licence sous le régime sandbox. L’Economic Development Board Act énumère quatre conditions susceptibles de déboucher sur la suspension d’une licence sous ce régime. Cette suspension peut intervenir, par exemple, si la réputation de Maurice est en jeu.

Autorégulation

Ce cadre est adapté au développement de la technologie blockchain, car cette technologie contient en elle-même un élément d’autorégulation. En effet, les membres des blocs formant une chaîne opèrent à ciel ouvert. On joue cartes sur table. Toutes les transactions se font dans une transparence totale. Et surtout presque pas de risque de piratage. C’est une technologie avancée. L’initiative a donné des résultats immédiats avec possibilité de ne pas être en retard par rapport à Dubaï en termes de savoir-faire dans la maîtrise de cette nouvelle technologie. Les opportunités d’affaires sont immenses.

Anjena Seewooruthun, consultante et formatrice en gestion de changement au sein de KDI Asia Pte Ltd, en témoigne : «Le sandbox licensing va non seulement ouvrir la porte à des opportunités d’investissements nouvelles mais va aussi permettre un traitement rapide de ces dossiers». Elle souhaite cependant que le cadre du sandbox licensing soit bien établi.

Maintenant que le cadre légal sandbox est en place, Shalinee Dreepaul Halkoree, juriste et Senior Associate au sein du cabinet juridique Juristconsult, estime qu’il incombe à l’Economic Development Board de faire l’éducation de la population par rapport à ce nouveau type de permis. «Elle doit aider les demandeurs à comprendre une procédure assez encombrante afin que les demandes soient examinées dans un délai acceptable et de manière efficace. Ce qui devrait inciter les investisseurs potentiels à utiliser Maurice comme centre pour lancer des activités innovantes».

Tout en qualifiant d’initiative «intéressante» le recours à la réglementation sandbox, Ramesh Caussy, Français d’origine mauricienne, l’inventeur du robot Diya, est un habitué des chocs provoqués par les technologies de rupture par rapport à la technologie existante. Il s’interroge sur la capacité de Maurice à filtrer les dossiers : «Si la forme est louable, on peut se demander si l’île Maurice dispose des profils ayant les compétences et le mindset nécessaires au filtrage des dossiers. Malgré l’apparence d’ouverture que laisse présager le Sandox licensing, en tentant de protéger les espaces sans régulation qui pourraient nuire à l’île Maurice ou à sa réputation, les formulations du texte donnent toutes les possibilités d’interdire ce qui peut créer des richesses de la part de nouveaux entrants».

Pour François de Senneville, Partenaire-responsable du desk Afrique du cabinet Fieldfisher Paris et avocat au barreau de Paris, la réglementation sandbox est une «excellente idée car elle devrait apporter plus de lisibilité pour les investisseurs potentiels désireux de s’établir à Maurice». Mais il reste sceptique quant à son efficacité dans la pratique : «Je ne suis pas sûr de saisir totalement ce que le concept de «sandbox licensing» apportera de plus sauf à créer de l’incertitude qui viendrait complexifier la vie des affaire qui a, au contraire, besoin de simplicité et de rapidité», dit-il.

Le cadre étant établi les investisseurs suivront-ils ?

Les pionniers : la Start-up SPS Ltd et la SBM Holdings

La start-up SPS Ltd et SBM Holdings sont les précurseurs de l’entrée de l’île Maurice dans le domaine de la blockchain. SPS Ltd veut développer des applications basées sur cette technologie. Elle a lancé le e-document cloud, une plateforme pour digitaliser les documents et auxquels on peut avoir accès grâce à la technologie cloud.

Le rôle de SBM Holdings dans la promotion de la technologie blockchain s’est fait à deux niveaux. Lorsque le président du conseil d’administration, Kee Chong Li Kwong Wing, rencontre lors d’un congrès à Hong Kong James Duchenne, un profesionnel d’origine mauricienne, cofondateur de Sutton Stone, une société qui a contribué à la construction d’un certain nombre de chaînes de blocs et qui a assuré un service conseil auprès des entreprises innovantes, il n’a pas hésité à en parler au Premier ministre, Pravind Jugnauth, et aux responsables du Board of Investment (BOI). James Duchenne a été, par la suite, nommé représentant honoraire du BOI aux États-Unis.

Deuxièmement, c’est dans le domaine bancaire que le potentiel de la technologie blockchain pourrait être utilisée le plus rapidement possible. SBM Holdings, à en croire son président, est disposé à montrer la voie. «Il est inimaginable qu’on puisse imaginer le secteur bancaire se passer de la technologie de la blockchain», affirme Kee Chong Li Kwong Wing.

Grâce à son flair d’homme d’affaires, Benjamin C. Yablon, responsable de la filière Stratégie au sein de Secured Automated Lending Technology (SALT) a déjà fixé son choix sur Maurice comme base d’opération. Il veut se lancer dans les activités d’un marché de la monnaie numérique où le bitcoin, une dénomination de la crypto-monnaie la plus commune, pourra être utilisé comme garantie bancaire.

James Duchenne: «Un élément catalyseur est requis»

James Duchenne, représentant honoraire du Board of Investment (BOI) aux États-Unis.

La structure actuelle de l’économie mauricienne permet-elle l’émergence de projets innovateurs en dehors de l’encadrement d’un organisme régulateur ?
Les innovateurs et les entrepreneurs ont tendance à trouver le chemin de la moindre résistance pour concevoir, lancer et gérer leurs offres. Dans ce processus, ils envisagent des destinations qui présentent les bonnes conditions et utilisent également un processus appelé arbitrage réglementaire. C’est là qu’un système de sandbox réglementaire (voir le lexique) bien structuré dans la bonne région peut aider les entreprises et les États membres à devancer les autres. Maurice a donc intérêt à tout mettre en oeuvre pour que cela se produise. Tout ce qui est requis, c’est un élément catalyseur. Le Board of Investment est très proactif quant à la nécessité de placer Maurice dans une position qui lui permettra de tirer le plus grand bénéfice de ce secteur d’activités.

Quel est l’avantage concurrentiel de Maurice pour attirer les investisseurs dans ce secteur ?
Les facteurs importants pour les investisseurs sont la stabilité politique, le secteur financier solide et l’accès aux professionnels locaux, la clarté de la réglementation, entre autres.

En quoi est-ce qu’un régime de réglementations de type «sandbox» profitera-t-il à l’économie mauricienne ?
Si l’île Maurice se donne les moyens de réaliser les meilleurs résultats possibles dans le domaine de la technologie de la blockchain, cela peut créer les conditions pour mieux faire dans d’autres secteurs d’activités. Ce qui devrait déboucher sur la création d’emplois mieux rémunérés, sur la croissance des exportations et l’apport d’investissement direct étranger.

Que signifiera alors pour Maurice de se trouver dans le creux même de cette courbe innovante ?
D’abord, le paradigme dans lequel le pays évolué jusqu’ici va changer. Lorsqu’il sera question d’investissement direct étranger, il faudra penser également aux implications de l’utilisation de la cybermonnaie dans de telles transactions. Il faudra ensuite assurer la formation technologique et la mise en place de structures de soutien appropriées pour soutenir la croissance. Il faudra aussi promouvoir Maurice comme une destination pour les innovateurs.

Quelles sont les filières susceptibles de profiter de l’instauration du régime d’octroi de licence selon la réglementation sandbox ?
La licence de sandbox peut être un outil pour la FinTech, l’Internet des objets, le traitement de gros volumes de données, la biotechnologie, la cartographie du génome, le système d’enregistrement foncier, les plateformes d’identité, entre autres. Nous parlons d’une économie analogiquement intrinsèque qui est en train de migrer vers une plateforme économique numérique. Nous ne connaissons pas le pouvoir qui peut être débloqué grâce à l’utilisation de cette plate-forme comme base, mais nous savons que ce sera tout sauf une démarche futile.

Lexique

<h4>Sandbox</h4>

<p>L&rsquo;approche sandbox consiste à plonger les jeunes entreprises de technologie dans un <em>&laquo;bac à sable&raquo;</em> où elles expérimentent leur activité en étant, pour un temps, exemptées d&rsquo;obligations réglementaires.</p>

<h4>Blockchain</h4>

<p>La blockchain est une technologie de stockage et de transmission d&rsquo;informations, transparente, sécurisée et fonctionnant sans organe central de contrôle <em>(définition de Blockchain France)</em>. Par extension, une blockchain constitue une base de données qui contient l&rsquo;historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. Cette base de données est sécurisée et distribuée : elle est partagée par ses différents utilisateurs, sans intermédiaire, ce qui permet à chacun de vérifier la validité de la chaîne.</p>

<p></p>