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Journée mondiale de l’alphabétisation: elles ne savent ni lire ni écrire…
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Journée mondiale de l’alphabétisation: elles ne savent ni lire ni écrire…
Le 8 septembre, on célébrait la Journée internationale de l’alphabétisation. À Maurice, nombreux sont ceux qui n’ont pas eu accès aux bancs de l’école ou qui les ont tout simplement désertés, pour «x raison». Comment font ceux qui ne savent ni lire ni écrire, pour faire face au quotidien ? Quels problèmes rencontrent-ils ? Réponses
Elle est timide, a une voix rocailleuse qui trahit quelque peu sa gêne. «Non, mo pa konn lir ek ékrir», avoue Letcheemee Lutchmanen. «Hein, get dan mo karné kouma ékrir mo nom. Sa mo konn ekrir sa…» Son nom est la seule chose que Letcheemee, 54 ans, sache écrire. Elle arrive à l’épeler aussi. Dans son petit carnet marron, elle a également noté son adresse, au cas où quelqu’un la lui demanderait. «Fek la voler inn pass ar mo kaba. Ti éna enn bout papié ek mo ladress ladan… Dépi sa mo gard mo karné bien dan mo kalson.»
Pourtant, Letcheemee est allée à l’école. Mais «pann konpran nanien. Pann rési swiv…» Alors elle a arrêté très tôt, a commencé à travailler très jeune. Aujourd’hui, les regrets sont là. «Mo anvi apran mé pa pé kapav. Dan sant, kot mwa laba, bann-la donn kour dan tanto, bé mwa mo travay», souligne l’habitante de Montagne-Longue, qui nettoie et fait le thé dans une grande entreprise.
Si elle veut apprendre à lire et à écrire, c’est pour que «dimounn pa kouyonn [mwa]». Quand elle va faire ses courses, par exemple, elle parvient difficilement à déchiffrer les étiquettes. Quand il faut prendre le bus, «mo konn ziss séki Flacq ek Port-Louis. Sinon, bizin démandé…» Le reste du temps, la Madame Courage, séparée de son «misié», peut compter sur l’aide de ses deux enfants. «Zot mem éna problem, mo pa oulé donn zot traka dir zot montré mwa lir…»
Mais Letcheemee ne baisse pas les bras pour autant. Des cours d’alphabétisation, elle compte bien en prendre. Elle a la ferme intention de maîtriser le B.A. –Ba de l’«abcd». Puisque «dan sant kot mo apran koud, bann-la inn dir pou ésey met kour dan gramatin. Mo anvi apran, mo anvi lir liv, lagazet. Mo pou rési enn zour».
Peut-être qu’elle incitera sa collègue Cindy Saminaden, 39 ans, à l’accompagner. Qui elle aussi «pa’nn konpoz siziem akoz pa ti pé kapav swiv. Mo ti koné mo ti pou fel». Plus tard, Cindy a eu du mal à compléter les formalités quand il fallait trouver une école pour ses deux enfants. Les formulaires bancaires lui donnent également du fil à retordre. «Mo bizin démann dimounn ou bien sa zanti misié sékirité ki débout dévan laport-la ranpli pou mwa…» Son adresse, elle ne sait pas l’écrire non plus.
Tout comme Letcheemee, Cindy aimerait bien apprendre à manier la plume, à déchiffrer des mots et des phrases. Mais «dan légliz zot donn kour dan tanto, kan mo travay». Qu’importe, elle aussi a l’intention de s’y mettre bientôt, assure-t-elle.
Histoire de pouvoir, enfin, lire de beaux livres qui contiennent de si belles histoires.
En chiffres
<p>100 000. C’est le nombre d’analphabètes que l’on comptabilise, selon l’atlas mondial des données. Les chiffres datent de 2015 et sont en constante baisse depuis 1990 (voir : http://knoema.fr/atlas/Maurice/topics).</p>
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