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Pont Colville: pourquoi les «âmes damnées» choisissent-elles ce lieu pour rallier l’au-delà ?

22 octobre 2017, 23:00

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Pont Colville: pourquoi les «âmes damnées» choisissent-elles ce lieu pour rallier l’au-delà ?

«Pa al laba, to pou gagn mové zer…» Conseil avisé que donnent les anciens. Qui en sont persuadés : l’esprit de ceux qui se sont ôté la vie rôde toujours du côté du Pont Colville. Alors que selon ceux qui connaissent bien l’endroit, affirment, eux, que ce lieu grouille de vie. Profitant de la présence des buissons, de jeunes tourtereaux viennent s’y bécoter, alors que les toxicomanes  s’y réfugient pour shooter, à l’abri des regards inquisiteurs.

C’est le calme qui règne en maître du côté du pont tristement célèbre, en ce vendredi matin. Pour accueillir les visiteurs casse-cou, quelques marches, envahies çà et là par la mousse, le lierre. Elles sont situées juste après l’arrêt d’autobus. Une petite plateforme en longueur mène de l’autre côté de l’autoroute.

Devant, des piliers massifs soutiennent le pont et les milliers de véhicules qui le traversent quotidiennement. Ces colonnes s’étirent à perte de vue jusqu’au fond de la vallée, tapissée d’une très dense végétation. L’écho du trafic, étouffé, semble lointain. Entre deux voitures qui passent, le bruissement d’un cours d’eau.

Mais ce lieu est loin d’être idyllique. L’atmosphère est lourde, sombre, malgré le soleil qui brille. Même le gazouillis des oiseaux contribue à l’ambiance glauque. En guise de «rivière», un petit canal, qui recueille le surplus d’eau que crache un tuyau. Difficile d’oublier la réputation que traîne le Pont Colville.

L’imagination prend le dessus. À Hollywood ou Bollywood, un tel lieu servirait de repaire aux méchants, qui y cacheraient quelque damoiselle en détresse, jusqu’à ce que le héros vienne la sauver. Ici, il s’agit tout simplement d’un lieu délaissé. Que des personnes au coeur brisé viennent visiter quand il s’agit de se défaire de la vie.

Pas de seringue ou de préservatifs usagés, pas de paquet de chips ou de cadavre de bouteilles en plastique. Hormis, quelques mégots de cigarettes qui témoignent du passage des hommes. La patronne, ici, c’est la poussière… La vue est pourtant belle, la nature vivante. Le bruit sourd des roues qui heurtent les réflecteurs évoque des détonations, tue les illusions.

La curiosité, qui a atteint un stade avancé, pousse pourtant à aller plus loin. Pour cela, il faut se faufiler entre la barrière de sécurité qui protège une petite plateforme. Avis à ceux qui ont le vertige, c’est un cap à ne pas franchir. La terre, sèche, se dérobe facilement sous les baskets, à côté des colosses en béton aux pieds d’argile. Même pas une branche où l’on peut s’accrocher.

La suite de la descente se fait sur les fesses, qui servent de matelas pneumatique. Mais pas moyen d’aller bien loin. Une fois arrivé à  la hauteur du tuyau qui fuit, il faut s’incliner devant la pente raide, qui ne pardonne aucun faux pas. Seuls quelques chiens téméraires s’y aventurent. Deux d’entre eux arrivent par les escaliers et s’enfoncent directement dans les buissons. Ils connaissent visiblement bien le coin. Il suffit de lever les yeux pour admirer un majestueux spectacle. D’un côté, la vallée, qui s’étend jusqu’à Moka. De l’autre, les arbres conduisent le regard jusqu’à des contrées lointaines.

Il ne faut pas être devin pour comprendre qu’une chute du haut du pont serait fatale. La cime des arbres pourrait l’amortir, mais les rochers, sans pitié, eux, se chargeraient du reste…













 

Qui était Sir Colville Deverell ?

	<div style="text-align: center;"><img alt="" src="/sites/lexpress/files/images/monument-sir-colville.jpg" /></div>

	<p>À l&rsquo;entrée de l&rsquo;escalier qui conduit sous le pont, une pierre discrète et sobre. Gravée dans la roche, une inscription : &laquo;Sir Colville Deverell Bridge&raquo;.&nbsp;Inauguré en 1962. Sir Colville Montgomery Deverell était un personnage éminent de l&rsquo;Empire britannique. L&rsquo;administrateur colonial, de nationalité irlandaise, avait une passion pour le cricket. Lors d&rsquo;un match opposant l&rsquo;université de Dublin à celle de Northamptonshire, en 1926, il était le principal batteur et s&rsquo;est mesuré à l&rsquo;écrivain Samuel Beckett, l&rsquo;auteur du célèbre &laquo;En attendant Godot&raquo;. Sir Colville Deverell était le 28e gouverneur de Maurice, en poste du 2 novembre 1959 au 10 juillet 1962.</p>
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