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Shaybah Neetoo: «L’accent est mis sur notre capacité à stimuler la croissance de la firme»

23 janvier 2018, 17:39

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Shaybah Neetoo: «L’accent est mis sur notre capacité à stimuler la croissance de la firme»

Shaybah Neetoo a été une des premières femmes à faire leur entrée chez les hauts cadres du cabinet d’audit PricewaterhouseCoopers (PwC). Elle explique les facteurs qui ont contribué à l’aider à évoluer confortablement dans une sphère caractérisée par la prédominance de la gent masculine.

Qu’est-ce que votre élévation à la fonction d’Associate Director in Assurance, une première pour une femme de PwC, représente-t-elle pour vous ?
Il y a déjà eu une femme associée chez PwC après la mise en place du projet de merger de 1998. Néanmoins, la présence des femmes à un tel niveau de responsabilité reste un fait rare.

PwC est un réseau international. L’accès à la position d’Associate Director est l’avant-dernière marche avant de devenir une associée de la firme. Ma promotion relève d’un mécanisme de décisions complexes tant au niveau local que régional.

Cette étape de mon parcours professionnel m’a contrainte à affronter de nombreuses épreuves et entrevues. Ce sont des situations où l’accent est mis sur les compétences personnelles dont on est tributaire et sur notre capacité à stimuler la croissance de la firme dans le futur.

Lorsqu’on est promu Associate Director au sein de PwC, on évolue dans le cadre d’une organisation internationale. La promotion dont j’ai été l’objet découle d’une reconnaissance d’un travail assidu, de la confiance placée en moi et en mes capacités à faire grandir la firme. Ce principe de méritocratie a beaucoup de valeur à mes yeux. Cette promotion augmente considérablement le niveau de mes responsabilités envers PwC et mes clients.

Comment l’initiation aux implications associées à ces nouvelles responsabilités s’estelle faite ?
Une longue et rigoureuse préparation précède la prise de fonction du bénéficiaire d’une telle promotion. L’idée est d’atténuer l’impact de cette nouvelle fonction sur le préposé lorsqu’il sera mis en présence de l’étendue de sa nouvelle responsabilité.

Je me rends compte toutefois que cette promotion est aussi une source d’inspiration pour mes semblables et mes plus jeunes collègues. Je suis heureuse que ce soit ainsi. Lorsqu’on est confronté à une situation où on est considéré comme un modèle, cela vous force à être pragmatique par rapport aux aspirations de tout un chacun, loin d’un rêve utopique et encore moins d’une quelconque idéologie.

Quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés sur le plan professionnel pour exploiter tous vos potentiels afin d’atteindre la position à laquelle vous aspirez ?
PwC reconnaît et récompense le talent et la compétence. Mes objectifs maintenant vont consister à cultiver mes relations avec nos clients et les aider à résoudre leurs plus grands problèmes. D’autre part, j’aimerais identifier d’autres talents clés au sein de la firme, les accompagner dans leur parcours et les aider à exercer leur métier d’une manière enrichissante et stimulante.

En quoi votre affectation constitue-t-elle un avènement ?
J’ai reçu de nombreux messages de félicitations et cela fait évidemment plaisir. Toutefois, je n’ai jamais été habitée par l’idée que je ne suis qu’une femme évoluant dans un milieu essentiellement masculin. Pour moi, ma nomination reste principalement basée sur la performance et l’effort. C’est là ma plus grande satisfaction !

Pourquoi les sociétés devraient-elles faire tout ce qui est en leur pouvoir afin d’accueillir en leur sein les femmes qui ont les qualités et les talents de s’y trouver ?
En effet, la proportion des femmes aux postes de cadre est encore relativement faible à Maurice. Traditionnellement, la tendance reflétait plutôt le constat évoqué dans l’adage «qui se ressemble, s’assemble».

Cette tendance était caractérisée par l’attitude de bon nombre de Chief Executive Officers à recruter des cadres qui partageaient les mêmes idées et les mêmes points de vue qu’eux.

La tendance a maintenant changé. Elle a fait de la place à une culture qui permet de croire que l’optimisme dégagé dans «strength lies in differences, not in similarities», une citation de l’éducateur, auteur et homme d’affaires américain Stephen R. Covey, fait désormais partie des pratiques existantes dans de nombreuses entreprises.

En 2010, la campagne 30 % Club était lancée au Royaume-Uni. Elle avait comme principal objectif de veiller à ce que 30 % des membres du conseil d’administration des FTSE-100 soient des femmes. Actuellement, cette proportion a atteint les 27,9 %.

Plusieurs études ont démontré que le recours à un mécanisme qui garantit l’égalité des genres au sein des entreprises constitue aujourd’hui un des leviers susceptibles de dynamiser la performance économique des entreprises. Par conséquent, la nomination des femmes à des postes de responsabilité est une des voies privilégiées pour y parvenir.

Quelle est la situation à Maurice ?
Plus près de nous, l’étude conduite récemment par le Mauritius Institute of Directors a démontré que, malgré une meilleure performance à l’école, dans les études supérieures ou dans le cadre d’un nouvel emploi, les femmes mauriciennes se heurtent à l’existence du fameux «plafond de verre» qui les empêche de faire leurentrée parmi les cadres supérieurs. Encourager la diversité et offrir un soutien et une flexibilité à ceux qui en ont besoin témoignent de la volonté et de l’engagement d’une entreprise à participer activement à l’épanouissement professionnel de ses employés.

Une telle approche peut potentiellement multiplier la capacité d’une entreprise à s’attirer l’intérêt des personnes les plus talentueuses d’un réservoir de candidats à la recherche d’un emploi. Si cela devait se produire, tout le monde en sortira gagnant. C’est la raison pour laquelle, l’accent devrait être placé sur l’efficience, la performance et la capacité à innover, plutôt que sur la personne.

Cette réorientation devrait également permettre aux entreprises d’être plus réactives face aux changements. Le recours aux valeurs que proposent différents styles de management est aujourd’hui une stratégie indispensable pour mieux comprendre les attentes du personnel et les facteurs qui les motivent.

Que fait-il faire pour atteindre un juste équilibre entre les ambitions professionnelles et les obligations familiales d’une femme ?
Est-ce dans le film The Intern où Anne Hathaway joue le rôle d’une femme d’affaires accomplie alors que son mari a choisi de rester à la maison pour s’occuper de leur fille ? Je ne suis pas sûre que notre société en soit là, ni ici, ni ailleurs !

Dans le cadre de divers programmes de diversité et dans le but de retenir des talents sûrs, plusieurs entreprises offrent aujourd’hui différents soutiens à leurs employées. PwC s’attelle constamment à accroître la diversité de ses équipes et à garantir à ses collaboratrices les conditions indispensables à leur développement tant professionnel que personnel.

Par exemple, nous avons des crèches ou des salles d’allaitement au sein même des bureaux, etc. À PwC Maurice, notre politique de flexibilité cible les mamans. Elles peuvent arriver plus tard au travail ou rentrer plus tôt à la maison. Elles peuvent même travailler de la maison quand le besoin se fait sentir.

La révision de la politique de traitement à l’égard des femmes a-t-elle la chance de se généraliser ?
Il est grand temps de changer d’attitude à tous les niveaux. Il n’est pas toujours nécessaire de caler une réunion à 5 heures de l’après-midi sauf si des circonstances exceptionnelles l’exigent comme l’émergence d’un problème majeur qui nécessite une intervention immédiate et rapide. Cependant, la convocation régulière des réunions à cette période de la journée relève, à mon avis, d’un manque d’égard vis-à-vis de l’équipe.

Comment cela se passe-t-il au sein de PwC ?
À PwC, nous croyons en l’adage que «l’exemple vient d’en haut». Nous comptons donc sur nos dirigeants pour montrer l’exemple. Quelques agissements à éviter, par exemple, seraient de grimacer ou d’afficher des regards complices quand une femme partage ses idées lors d’une réunion.

Il y a encore cette tendance qui consiste à douter de la capacité de quelqu’un à participer au déroulement d’une réunion planifiée trop tard dans la journée ou dans un délai trop court. Les préjugés sexistes de même que les restrictions culturelles doivent être abandonnés dès qu’on est sur le point de franchir le seuil de l’entreprise ou la porte de sa maison.

Au-delà du monde du travail, il ne faut pas ignorer l’aide supplémentaire que nous recevons au sein de la famille. Il peut s’agir de la possibilité de pouvoir compter sur un mari compréhensif et coopératif, ou encore, sur les parents ou beaux-parents qui apportent leur aide dans l’organisation des activités familiales.