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Guy Dupuche: ses quatre vérités sur la MBC

5 juin 2018, 00:30

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Guy Dupuche: ses quatre vérités sur la MBC

Homme de radio et de télévision, Guy Dupuche a été le «monsieur Culture» de la station nationale. Il n’a rien oublié des ingérences dans son travail, son licenciement injustifié, ni de la bataille légale qu’il a gagnée. Plus de 20 ans après, Guy Dupuche revient sur les faits dans Prémices et promesses, paru chez Pamplemousses Éditions. 

Guy Dupuche parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Mais à le lire, c’est à se demander si nous avons vraiment changé d’époque. Son témoignage accablant sur ses longues années passées à la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC) a valeur de document. Brûlant. Tant il colle à l’actualité. Tant le timing de la parution de ce récit précis intervient dans la foulée de la récente démission du précédent directeur général de la station nationale, il y a trois semaines. Ravivant les braises du débat sur l’impartialité de la MBC. Un débat nourri au gré des régimes politiques.  

L’auteur attend la toute fin de Prémices et promesses pour revenir sur «l’injustifiable limogeage», dont il a été victime après les élections générales de 1991. Cela dans un récit autobiographique placé après des fictions largement inspirées de la réalité. Prémices et promesses vient de paraître chez Pamplemousses Éditions, avec le soutien financier du President’s Fund for Creative Writing.  

«Changement de gouvernement, chambardement des structures de la MBC, je suis démis séance tenante de mes fonctions pour des raisons futiles.» Guy Dupuche raconte 1991. On dirait 2018. L’offensé décide de se battre. Il ira jusqu’en Cour suprême. Ironie de l’histoire, son avocat d’alors s’appelle Ivan Collendavelloo, devenu aujourd’hui vice-Premier ministre. Un rang qui exige que ses déclarations ministérielles soient abondamment relayées par la station nationale.  

Avant qu’on ne finisse par lui montrer la porte, Guy Dupuche passe par les affres «d’intolérables ingérences politiques dans l’exercice» de sa profession. L’auteur n’est pas avare d’exemples.  

Tentative d’ingérence  

Comme ce documentaire de 45 minutes sur le Château du Réduit, pour son 230e anniversaire, qu’un «conseiller dont nous avait doté un pays ami» souhaite orienter. Qui croit naïvement que les tentatives d’ingérence concernent surtout la mise en valeur de l’un ou l’autre personnage de l’État est vite détrompé. Guy Dupuche prouve qu’un documentaire à visée, «exclusivement culturelle» n’échappe pas à «de fumeuses considérations d’ordre politiques ou autres». 

La chute de l’histoire est surprenante. Dans un premier temps Guy Dupuche a à «subir les véhéments reproches pleins d’amertume du donneur de conseils non sollicité». L’auteur en profite au passage pour y aller de son petit couplet : «J’étais avant tout un journaliste intègre et non un servile manieur d’encensoir.» Avant de nous confier que son geste lui a valu la proposition du poste de rédacteur en chef du journal Advance, offert «sur un plateau par nul autre que sir Seewoosagur Ramgoolam». Un siège éjectable que Guy Dupuche choisit de refuser, en faisant la sourde oreille. 

La plupart des protagonistes de l’histoire vécue racontée par Guy Dupuche ne sont plus de ce monde. Mais cela ne diminue ni la force de son témoignage, ni le courage qu’il lui a fallu pour le publier. Dans une station où les placards sont nombreux, où l’omerta fait souvent loi, Guy Dupuche fait figure de pionnier. Il est loin d’être le seul à avoir subi les vicissitudes d’une radiotélévision d’État. Mais il est parmi les rares à avoir osé parler à visage découvert. Retrouvant la parole qu’on lui avait ôtée. 

Extrait  

En avant-propos, Guy Dupuche philosophe sur le pourquoi d’écrire, dans Prémices et promesses. Voici un extrait de sa réflexion.  

«Est-ce le résultat d’un exhibitionnisme, d’un nombrilisme compulsif et indécent ? Car mettre son âme à nu devant témoins, n’est-ce pas un geste impudique, un strip-tease moral, telles – par exemple – ces intempestives déclarations d’amour par radio interposée, à l’occasion de la Saint-Valentin, et qui devraient plutôt être murmurées «au confessionnal du cœur» Mais peut-être est-ce aussi ce désir de communiquer avec l’autre, puisque l’homme est un être grégaire, qui a cette impulsion incoercible de s’entourer de ses semblables. Cependant, le grégarisme comporte une connotation négative qui dérange, puisque ce mot, au sens étymologique, signifie : tendance à se comporter comme un troupeau (…) Alors, pourquoi écrire, si ce n’est pour être lu ?»