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Travailleurs étrangers : Maurice ouvre davantage ses frontières

15 novembre 2018, 23:00

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Travailleurs étrangers : Maurice ouvre davantage ses frontières

Le gouvernement joint le geste à la parole, cinq mois après l’annonce de la réforme du work permit, lors du dis- cours budgétaire. Trois étrangers pour un Mauricien : c’est le nouveau quota pour les per- mis de travail, qui entre bientôt en vigueur dans les secteurs où le recrutement de la maind’œuvre est déjà permise.

Ce n’est pas tout. La possibilité d’en faire venir sera également étendue à de nouveaux secteurs, tels que la santé gériatrique ou encore la floriculture pour l’exportation. Des décisions prises par le ministère du Travail pour répondre aux attentes des opérateurs des secteurs ciblés.

«C’est surtout pour la boulangerie, l’agriculture les secteurs manufacturiers comme le textile ou la menuiserie et les industries orientées vers l’exportation que le quota de travailleurs étrangers passera d’un étranger pour un Mauricien à trois étrangers pour un Mauricien», explique le ministre Soodesh Callichurn.

Des augmentations de quota, d’une moindre pro- portion toutefois, sont prévues dans d’autres secteurs où l’importation de main-d’œuvre est permise. Dans le cas de la construction, par exemple, les demandes de permis pour les travailleurs étrangers seront revues au cas par cas. Le ministre du Travail d’ajouter qu’«il y a aussi de nouveaux secteurs où le recrutement de maind’œuvre sera permis. Par exemple l’économie océanique, la floriculture ou la santé gériatrique».

La raison de ces changements ? Le manque de main-d’œuvre pour les travaux manuels à Maurice. «Il y a des secteurs prometteurs qui ont besoin de main-d’œuvre mais qui n’arrivent pas à en trouver à Maurice. Les opérateurs ont d’ailleurs fait plusieurs représentations», indique Soodesh Callichurn.

Sollicités, les opérateurs de secteurs ciblés se font l’écho de ces inquiétudes. Dans la boulangerie, par exemple, les opérateurs soulignent que l’ancien quota d’un employé Mauricien pour un employé étranger était dépassé depuis longtemps. «Sa enn Morisien laem pa pé kapav trouvé», déplore Naseer Mooraby, président de l’Association des propriétaires de boulangerie.

Même constat pour Anthony Chelvan, propriétaire de Chelvan Furniture Ltd, spécialisé en menuiserie. «J’emploie de la main-d’œuvre mauricienne, indienne et bangladaise. Sé enn sitiasyon ki pé anpiré de zour an zour. Bann ménwizié ki la, la dépi des décennies. Mé péna la rélev», soupire-t-il.

Pour les nouveaux secteurs où l’importation de main-d’œuvre est désormais permise, c’est un ouf de soulagement. Sylvain Collendavelloo, administrateur de la St Hugh’s Anglican Home, admet qu’il est très difficile de trouver du personnel pour s’occuper des personnes âgées. «Il faut que l’on puisse compter sur eux. Mais nous ne trouvons pas de candidats pour ce genre de postes. Et encore moins de skilled candidates.» La maison de retraite offre donc la formation requise.

La possibilité d’employer de la main-d’œuvre étrangère pourrait même aider à redynamiser certaines industries comme la culture de fleurs pour l’exportation, qui connaît une régression depuis ces dernières années. «Il est impossible de trouver des hommes et des jeunes pour travailler dans les plantations. Mais il manque aussi les compétences, comme les gens qui savent croiser le pollen, par exemple», dit Devarajen Samoo, propriétaire de Little Cottage Ltd, qui exporte des anthuriums. Pour soutenir cette industrie, le pays pourrait, avec l’ouverture préconisé, se tourner vers l’expertise kenyane, par exemple, fait valoir le ministre Callichurn.

Si la plupart des opérateurs se réjouissent de ces nouvelles mesures, dans certains secteurs, d’autres déplorent encore la paperasserie avant l’obtention des permis (voir encadré). Aussi, l’on voudrait plutôt voir la mise en place d’un créneau de formation pour les jeunes. Alain Langlois, ancien directeur de Raphael Fishing et ex-General Manager de St-Brandon, soutient que les jeunes pourraient s’intéresser à la pêche, un secteur ou le ministère va aussi ouvrir les frontières. «Nous n’avons pas de problèmes de main-d’œuvre, mais des problèmes techniques. En 25 ans à St-Brandon, je n’ai jamais eu besoin d’avoir recours à des pêcheurs étrangers. Il y a une abondance de pêcheurs mauriciens et de rodriguais», avance-t-il.

S’il conçoit qu’il pourrait y avoir un besoin d’expertise étrangère, il préconise plutôt l’orientation et la formation des jeunes. «On ne leur montre pas qu’il y a un avenir là-dedans», déplore-t-il. Pourtant, les salaires dans le secteur peuvent monter jusqu’à Rs 35 000.

La paperasserie embête toujours…

Si les opérateurs se réjouissent de l’augmentation du quota, ils demandent quand même que les procédures de demandes de permis soient revues. «Ces procédures sont décourageantes, surtout pour nous, les PME», déplore Anthony Chelvan. Il révèle que ce n’est qu’après plus de huit mois de démarches qu’il a obtenu son Permission

in Principal to Import (PIP). Entretemps, il lui fallait avoir le capital ainsi que les locaux, alors que son entreprise n’était pas opérationnelle. «Il m’a fallu payer des locaux pendant plus de huit mois. C’était très difficile. Les PME n’ont pas beaucoup de capital.»

Au dire de Soodesh Callichurn, il est difficile de revoir ces procédures puisque le ministère du Travail doit absolument s’assurer que l’entreprise est en bonne et due forme. «Si les opérateurs ont des demandes précises, ils doivent venir nous voir et nous ferons ce que nous pourrons dans la mesure du possible», déclare-t-il. Il explique que le ministère travaille actuellement à faciliter le plus possible la tâche des employeurs. «Par exemple, nous revoyons la publication obligatoire dans les journaux des places vacantes.»