Publicité

Rémunération: l’attente s’éternise pour la commission d’enquête sur la drogue

18 décembre 2018, 22:00

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Rémunération: l’attente s’éternise pour la commission d’enquête sur la drogue

Le comité présidé par Nayen Koomar Ballah étudie toujours les réclamations de Rs 31 millions pour le travail des membres de la commission Lam Shang Leen. Qui se demandent pourquoi ils ont droit à ce traitement méprisant.

Si, généralement, tout travail mérite salaire, dans le cas de la commission d’enquête sur le trafic de drogue, la réalité est tout autre. Voilà près de cinq mois que l’ancien juge Paul Lam Shang Leen, ses assesseurs et les 30 fonctionnaires attachés à la commission n’ont pas été rémunérés.

Au niveau du gouvernement, l’on répond que la question n’a pas été tranchée encore. Le High-Powered Committee étudie toujours les réclamations de Rs 31 millions, dont il a proposé une révision à la baisse. Ce comité est présidé par le secrétaire du cabinet et chef de la fonction publique, Nayen Koomar Ballah. Son rapport devra être soumis pour approbation par la suite au Conseil des ministres qui devra, à son tour, faire des recommandations au président de la République. Ces longues procédures exaspèrent les membres de la commission.

Si les réclamations de l’ancien juge s’élèvent à Rs 15 millions sans taxes (Rs 17,2 millions après taxes), pour les deux autres assesseurs, Sam Lauthan et le Dr Ravin Kumar Domun, il s’agit de 40 % des honoraires de Paul Lam Shang Leen, soit environ Rs 6 millions chacun. Les rémunérations à payer à l’assistant surintendant de police Hector Tuyau s’élèvent à Rs 500 000 et les frais du secrétariat se chiffrent à Rs 600 000.

«Nous attendons patiemment. Ce n’est pas que nous sommes des assoiffés d’argent, d’ailleurs nous avons accepté de travailler pour une cause d’ampleur nationale sans le sou pendant tout ce temps. Mais la manière de faire du gouvernement n’est pas correcte», se plaint l’un d’eux. D’autant qu’au niveau des autorités, selon un proche collaborateur, il n’y aurait pas eu de communication sur les réclamations avec ceux faisant partie de la commission, alors que les rémunérations auraient «délibérément fuité» dans la presse pour jeter le discrédit sur le travail de la commission.

Début novembre, lors d’une question parlementaire, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, avait soutenu qu’il n’était pas approprié de divulguer le montant des honoraires. «Toutefois, une fois que ce sera réglé, je tiendrai informée la Chambre», avait assuré Pravind Jugnauth.

Entre-temps, l’ancien juge s’attelle depuis octobre à présider le Fact-Finding Committee sur la «disparition» de 16 kg d’héroïne. Si, dans les milieux concernés, cette nouvelle responsabilité représente une marque de confiance des autorités, plusieurs croient qu’il y a eu une tentative de «undermine» le travail de près de trois ans de la commission.

Rs 19 millions à Kailash Trilochun

«Sinon, pourquoi pinailler sur les rémunérations ?» se demande un travailleur social qui a témoigné devant les assesseurs et qui n’hésite pas à citer l’exemple des honoraires de Rs 19 millions payés à l’avocat Kailash Trilochun, malgré le tollé général soulevé.

Dans le cas des membres de l’équipe de Paul Lam Shang Leen, même si l’opposition trouve énorme le montant de Rs 31 millions, elle est en faveur du paiement. «Il faudrait les payer une fois pour toutes», avait notamment déclaré le leader du Mouvement militant mauricien (MMM), Paul Bérenger. Le MMM juge toute la situation ridicule, inacceptable et témoignant d’un manque de respect envers l’ancien juge Lam Shang Leen.

Pourquoi ce traitement méprisant, s’interroge-t-on au niveau de la commission qui fait état de «mixed signals » de la part du Premier ministre. Pravind Jugnauth avait, dans un premier temps, salué le travail abattu. Mais de l’autre côté, il a défendu par exemple l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) malgré les grosses lacunes notées dans le rapport Lam Shang Leen. Rapport qui a aussi provoqué la démission de deux membres du Mouvement socialiste militant.

Au gouvernement, on continue à se renvoyer la balle en indiquant que tout est fait selon la clause 16 de la Commission of Inquiry Act sur la rémunération des commissaires. L’une des dispositions stipule que «the President may direct what remuneration, if any, shall be paid to a Commissioner, to the Secretary, and to any other person engaged in the work of the Commission, and what expenses, if any, incurred in the holding of the inquiry shall be paid; and (ii) any remuneration or expenses directed to be paid under subsection (1) shall be a charge on the Consolidated Fund».

Un autre motif de ralentissement a trait au paiement des taxes. Les procédures définies par le ministère de la Fonction publique prévoient que les demandes de rémunération sont traitées au cas par cas. La commission d’enquête sur la drogue a été instituée le 14 juillet 2015. Elle a remis son rapport au président de la République par intérim le 24 juillet 2018.

 

Sam lauthan : «Mon argent ira dans un trust»

<p style="text-align: justify;">La somme de Rs 30 millions est-elle exagérée et injustifiée ? La question embarrasse quelque peu les membres de la commission qui, pour des raisons d&rsquo;ordre éthique, ne peuvent se défendre en public. <i>&laquo;Paul Lam Shang Leen est un éminent juge qui a mis ses activités professionnelles en veilleuse pour se consacrer aux travaux de la commission&raquo;,</i> soutient un de ses proches collaborateurs<i>. &laquo;En trois ans, la pratique privée lui aurait rapporté beaucoup plus</i>.&raquo; Notre interlocuteur met aussi en avant le fait que les membres de la commission n&rsquo;ont pas failli à leur tâche, malgré les menaces de mort, entre autres. Interrogé, Sam Lauthan estime n&rsquo;avoir aucun choix que d&rsquo;attendre. <i>&laquo;Une fois le paiement effectué, je compte utiliser l&rsquo;argent pour la création d&rsquo;un trust pour la prévention de la toxicomanie et la prise en charge des usagers de drogue.&raquo;</i></p>