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Relations internationales: maurice pris dans la guerre commerciale États-Unis–Chine

11 janvier 2019, 02:00

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Relations internationales: maurice pris dans la guerre commerciale États-Unis–Chine

Une société qui servirait de paravent au géant chinois Huawei pour ses transactions en Syrie est incorporée à Maurice. Une situation qui embarrasse le pays face aux États-Unis.

C’est un article publié sur le site de l’agence de presse internationale Reuters mardi qui a mis le feu aux poudres. Dans cet article intitulé New documents link Huawei to suspected front companies in Iran, Syria, les journalistes enquêteurs Steve Stecklow, Babak Dehghanpisheh et James Pomfret déclarent qu’ils ont des preuves irréfutables que le géant chinois de télécommunication et d’informatique, Huawei Technologies Co. Ltd, est impliqué dans des transactions commerciales avec l’Iran et la Syrie par le biais de deux sociétés. Et l’une d’elle est incorporée à Maurice.

En désaccord avec les États-Unis, l’Iran et la Syrie font l’objet d’un embargo américain. Une mesure qui constitue une épée de Damoclès contre tout pays qui ose, d’une façon ou d’une autre, entretenir des relations commerciales directement ou indirectement avec ces deux nations.

Maurice pourrait donc se retrouver dans une telle situation à moins que les États-Unis décident de ne pas faire pres- sion sur elle. Or, tout se serait bien passé pour Maurice si l’enquête des journalistes de Reuters n’avait pas dévoilé qu’une des deux sociétés quali- fiées de paravent pour Huawei par rapport à ses transactions avec la Syrie est incorporée dans le secteur mauricien des services financiers.

Appelé à commenter cette affaire, le service de communication de la filiale Huawei basée à Maurice a fait comprendre que vu l’ampleur de cette affaire, il lui faut plus de temps pour réunir les informations au sujet des allégations portées contre elle. Elle promet de transmettre la réaction de la maison-mère dès que les infor- mations seront prêtes.

Ne pas céder 

La publication des résultats de l’enquête des journalistes de l’agence Reuters place le secteur mauricien des services financiers dans l’embarras à deux niveaux. Premièrement, il n’est pas indiqué si les Américains, soucieux de réunir les preuves par rap- port aux allégations portées contre Huawei, approcheront les autorités mauri- ciennes pour confirmer ou infirmer les informations des enquêteurs britanniques.

Si cela devait se pro- duire, Maurice se retrouve- rait entre deux chaises. Et la situation sera complexe. Si la demande des États-Unis est acceptée et que les allégations portées par les journalistesenquêteurs sont confirmées, notre pays serait bien embarrassé à l’égard, cette fois, de la République populaire de Chine, avec laquelle il entretient d’excellentes relations. Si bien que cela a abouti à la signature, en août dernier, d’un accord de libre-échange (Voir hors-texte). Il ne reste qu’à ratifier le document.

Que se passera-t-il si Maurice décide de ne pas ac- céder à la demande des Américains ? Tout comme avec ses relations avec la Chine, le pays s’est déjà positionné pour négocier la conclusion d’un accord de libre-échange avec les États-Unis. Celui-ci devrait entrer en vigueur en 2025, à l’échéance de l’Africa Growth and Opportunity Act (AGOA) qui permet, depuis mai 2000, à 38 nations de la région subsaharienne d’exporter des produits vers le pays de l’Oncle Sam, franc d’impôt douanier.

Les Américains vont-ils reculer devant une oppor- tunité susceptible de contribuer à hausser la pression sur la Chine ? Rien n’est moins sûr. Car la déclaration faite le 6 décembre dernier par John Bolton, conseiller de Donal Trump, sur le plan de la sécurité nationale, contient les germes de la détermination des États-Unis à ne pas céder à l’égard de la Chine.

«Les grandes puissances qui sont nos concurrents directs, à savoir la Chine et la Russie, sont en train d’étendre de façon rapide leur influence tant financière que politique à travers l’Afrique. Ils sont en train de muscler leurs investissements dans cette région de façon délibérée et agressive. Cela dans le but d’avoir un avantage compétitif par rapport aux ÉtatsUnis», avait-il dit.

«Paradis fiscal»

À hier soir, dans les mi- lieux proches de la Financial Services Commission (FSC), qui a donné le feu vert à la société sur laquelle pèse une allégation de complicité avec la Syrie, on soutient que les Américains n’ont pas fait de demande d’informations sur la compagnie évoquée. On indique que l’instance reste vigilante et suit de près l’évolution de la situation dans le souci de veiller à la protection de la réputation du secteur des services financiers locaux.

Autre embarras occasionné par la publication des articles des journalistes-enquêteurs de Reuters : le qualificatif collé à la réputation du secteur mauricien des services financiers. Dans le premier texte, les journalistes qualifient la société soupçonnée de servir de paravent à Huawei et qui est incorporée à Maurice de «shell company». Une expression qui est attribuée à des compagnies qui n’existent que de nom dans une juridiction considérée comme étant un paradis fiscal. Entendez, un environnement où l’on ferme les yeux sur les pratiques de blanchiment d’argent.

Dans un autre article intitulé Report : Documents show extensive Huawei ties to suspected fronts in Iran and Syria, Tom McKay n’y est pas allé de main morte. «Il a été difficile de déterminer, à partir des documents publics, qui sont ceux qui contrôlent la société (…) vu que Maurice est un paradis fiscal comparable à celui des îles Vierges Britanniques», est-il écrit.

L’Economic Development Board a donc du pain sur la planche. L’instance vient de recruter par appel d’offres international, Burson Cohn & Wolfe (BCW), l’une des trois plus grandes firmes internationales dans le domaine des relations publiques. L’une de ses missions consistera à défendre la réputation de l’île lorsque celle-ci est attaquée.