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Changements climatiques: pression sur les assureurs pour le réajustement des primes
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Changements climatiques: pression sur les assureurs pour le réajustement des primes
Le changement climatique a modifié la donne dans l’industrie des assurances. Plus que jamais les risques liés aux catastrophes naturelles exercent de fortes pressions sur le montage de primes.
L’alerte est déjà donée. Le «World Risk Report 2018» classe Maurice comme le septième pays le plus exposé aux catastrophes naturelles. Ce qui doit interpeller les stake-holders à agir en conséquence alors que les assureurs, voire les réassureurs, sont confrontés à des risques d’une nouvelle nature, subissant des pressions pour des primes appelées à prendre l’ascenseur.
Habitué au passage de cyclones, Maurice assiste impuissant à de nouveaux phénomènes naturels. «Aujourd’hui, on est en présence d’un nouvel événement, le «flash flood» qui, en plus d’être très localisé, a une récurrence de plusieurs fois par an», analyse Louis Rivalland, CEO du groupe Swan. Il note toutefois que les assureurs ont un historique d’avoir réagi positivement aux nouveaux risques et autres calamités. Ce qui sera encore le cas pour des risques liés aux changements climatiques car «en dépit des inquiétudes, nous sommes prêts à accompagner le grand public ainsi que les entreprises pour leur besoin de transfert de risque».
Une analyse que partage le CEO du groupe d’assurances MUA, Bertrand Casteres. «L’assurance, en tant qu’activité économique, est fondée sur la loi du grand nombre, avec une politique de prix qui repose sur des probabilités. Les nouvelles conditions météorologiques de ces dernières décennies ont eu un impact direct sur le prix de nos polices d’assurance, aussi bien que sur le montant dont nous avons besoin en termes de réassurance», analyse-t-il. Et d’ajouter que les changements climatiques représentent évidemment l’un des défis majeurs de l’époque actuelle alors que le sujet du réchauffement planétaire fait toujours débat.
Ashok Prayag, Chairman de Quantum Insurance et professionnel de l’assurance, pousse la réflexion plus loin pour souligner que c’est un phénomène mondial alerté par les climatologues. «La fréquence et l’intensité des tempêtes tropicales, dont les cyclones, les typhons et autres ouragans sont les conséquences directes du réchauffement planétaire.» Pour lui, le récent été torride, les précipitations localisées imprévisibles et intenses causant des inondations, le cyclone dévastateur «Ida» qui a frappé le Mozambique, le Zimbabwe et le Malawi sont tous «des événements naturels catastrophiques qui ne trompent pas sur l’ampleur et les conséquences de ce réchauffement».
Résilience
Ce qui amène Jean Claude Lam Hung, CEO de CG Re (Afrique) Ltd, société de courtage en réassurance spécialisée sur le marché africain, à insister sur son rôle d’assister les gouvernements tant à Maurice qu’en Afrique et ailleurs pour gérer les risques liés aux changements climatiques. «Nous avons l’expertise pour apporter des solutions novatrices pour accompagner les gouvernements à développer de la résilience et à protéger les individus contre l’impact dévastateur de ces catastrophes naturelles», ex- plique Jean-Claude Lam Hung qui opère également pour le compte de Continental Re, un des leaders en réassurance en Afrique, qui projette d’aménager prochainement sa société holding à Maurice.
Certes, il faut que Maurice prenne conscience et se prépare à subir les effets du réchauffement climatique. Ashok Prayag trouve que les normes de construction doivent être revues, tenant compte de l’écosystème cyclonique. À cet effet, il rappelle que le dernier cyclone dévastateur qu’a été «Hollanda» avait mis Maurice à genoux en février 1994. Les gens ont tendance à oublier la réalité de notre écosystème et ont, depuis, privilégié l’esthétique à l’utilitaire et à la solidité dans le bâtiment.
Effet domino
«Nous avons été chanceux que Dame Nature nous a été providentielle et nous a épargné un cyclone catastrophique depuis 1994. Mais, comme le dirait tout statisticien, une longue période sans événement marquant augmente la probabilité de sa survenance» insiste le Chairman de Quantum Insurance. D’insister qu’un cyclone comme «Gervaise» en 1975, «Claudette» en 1980 ou «Hollanda», s’il frappait l’île, causerait des milliards de roupies de dégâts économiques et coûterait au- tant à l’industrie de l’assurance et de la réassurance, et ce au vu de la transformation des infrastructures physiques depuis le passage du cyclone en 1994.
Déjà, craignant des pertes potentielles, certains réassureurs, et pas des moindres, ont réduit leurs couvertures des risques catastrophiques sur Maurice, alors que d’autres se sont carrément retirés du marché. Mais la concurrence locale et internationale aidant, d’autres sociétés visiblement plus naïves les ont remplacées. Résultat des courses : le niveau actuel des primes reste bien en de- çà de celui qui reflèterait la réalité des risques auxquels le marché est exposé. «Un cyclone dévastateur, et c’est une question de ‘quand’ plutôt que de ‘si’, changerait la donne immédiatement. L’on verrait des réassureurs prendre la porte de sortie en quatrième vitesse et le taux de primes crever le plafond, comme on l’a remarqué en 1994», affirme Ashok Prayag.
D’ores et déjà, outre des dommages matériels et la perte de revenus sur le marché local, Louis Rivalland envisage un effet domino sur les taux pratiqués par les réassureurs en vue de refléter ces changements de risques pour le territoire local. «Cette situation fait que certaines hypothèses qu’on considérait auparavant pour arriver à notre prime technique sont condamnées à changer. Le montage de notre prime technique comprend déjà un élément de risques catnat (catastrophes naturelles)». Aussi, vu un accroissement de la fréquence ainsi que la sévérité de ces types d’évènements, le Group CEO de la Swan s’active à constamment revoir ses modèles actuarielles pour prendre en compte la probabilité de réalisation ainsi que l’impact des risques de catastrophes naturelles.
Continental Re vise à implanter sa société holding à Maurice
À Maurice les 28 et 29 mars pour participer au 6e CEO Summit organisé par Continental Reinsurance et dont le thème était «Leadership for sustainable insurance», Cassim Hansa, le CEO de la filiale botswanaise de Continental Re, a annoncé des négociations avec la Financial Services Commission pour lancer une antenne à Maurice. Ce bureau de Maurice jouerait un rôle stratégique auprès des six hubs du réassureur en Afrique au dire du CEO. Il s’agit de Tunis, qui s’occupe des opérations d’Afrique du Nord ; de Nairobi, ayant la responsabilité des opérations en Afrique de l’Est ; du Botswana, répondant aux attentes de la clientèle de pays de l’Afrique australe) ; de Douala, ayant la responsabilité des pays proches du Cameroun et de Lagos, au Nigeria, pour les pays jouxtant la Côte d’Ivoire. Ces six bureaux africains de Continental Re se rapporteront à la société holding qui élira domicile à Maurice. «Nous sommes confiants que les discussions aboutiront avec les autorités mauriciennes pour assurer notre présence à Maurice», a expliqué Cassim Hansa. Ce dernier, qui mène les discussions avec la FSC, s’est donné avant la fin de l’année pour assurer cette présence de la multinationale Continental Re.
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