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Metro Express: les vibrations ne sont pas écartées à La Butte

25 juin 2019, 21:22

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Metro Express: les vibrations ne sont pas écartées à La Butte

Après l’effondrement d’un barrage à La Butte dimanche, les habitants craignent que, lors du passage du Metro Express, des vibrations se fassent ressentir dans cette région. Qu’en est-il réellement ?

Interrogé, un ingénieur civil qui connaît bien la région, affirme que les risques de vibration sont bien réels. «Il n’y aura pas de vibrations sur la terre. Les pilotis ont été dimensionnés pour les absorber. Quand on fait le design d’un pilotis ou d’une poutre, il faut prendre en considération la sollicitation dynamique à cause du métro qui sera en mouvement. Mais c’est sûr qu’il y en aura qui vont directement dans la terre car elle est toujours en mouvement et ne pourra pas s’arrêter.»

Il est rejoint dans son analyse par Poorranarnenden Sungeelee, ingénieur mécanique et membre de l’Association des consommateurs de l’île Maurice. Selon lui, il y aura bel et bien des vibrations qui seront ressenties à La Butte quand le métro sera en opération. Il s’interroge cependant sur les matériaux utilisés pour les estomper. «Ki materyo pé mété pou pa vibré? Ki kalité sousol zot meté? Quel caoutchouc est utilisé comme amortisseur ? Quel quantité de vibrations y aura-t-il ?» Des questions dont il attend toujours des réponses des autorités concernées.

Un autre ingénieur civil n’est toutefois pas du même avis. Il estime que les vibrations seront bien loin d’être discernées. «Les trains vont produire des charges cycliques sur le sol. Et ainsi, celui-ci sera de plus en plus compacté et plus dense. Et les matériaux denses ne glissent pas et ne s’érodent pas. Ils agissent comme un bloc.»

Rencontré à La Butte, hier, lundi 24 juin, lors d’une visite des lieux, G. Vinod, directeur de projet de Larsen & Toubro (L&T), a tenté de minimiser les risques de vibrations. «Cela ne se produira pas. Nous avons fait des études de vibration et de bruit. Nous avons installé des plinth rails de nature différente. Nous avons utilisé des tapis de vibration sous le tracé qui vont réduire l’impact des vibrations et du bruit. Nous avons installé des pilotis loin des habitations. Les conditions de sécurité par rapport au domicile le plus proche ont été respectées.»

Les ingénieurs civils interrogés ont des points de vue différents sur le rôle des tapis de vibration. Pour l’un d’eux, ces tapis de vibration ou néoprène sont utilisés sous les rails pour que le béton ne s’effondre pas. «Ils n’amortissent pas à 100 % des vibrations. Li pran enn sertenn vibrasion. Mé vibrasion ki resté pou al dan later. C’est négligeable à cause du mouvement naturel du sol. Et là-bas le sol est instable.» Un autre ingénieur civil affirme que les pi- lotis sont généralement placés à une profondeur inférieure à la circonférence du cercle de glissement. «En termes simples, tout glissement ne nuira ni aux piliers ni aux rails, car ils reçoivent un soutien plus bas que la partie qui pourrait glisser.»

L’érosion pas crédible

Érosion ou glissement de terrain à La Butte ? Les avis divergent. Une délégation composée de Metro Express Ltd (MEL), Larsen & Toubro (L&T), Rites, Singapore Cooperation Enterprise (SCE), Japan International Cooperation Agency (JICA), a visité les lieux, hier.

Pour Das Mootanah, Chief Executive Officer (CEO) de MEL, il n’y a aucune rai- son d’être alarmiste. «Sé enn ti érozion dan enn plas lokalizé. Inn met inpé beton pou ranforsi li, amelior so stabilité. Pe met plizir kous béton ki pou azir kouma kontrépwa. Sé ki asé pou kontenir sa plas-la.» Selon lui, des tests ont été effectués dans toute la région. S’il confirme que le dernier rapport date de 1990, il explique que toutes les précautions ont été prises par l’entrepreneur, après discussions avec les consultants Rites et JICA.

Ce que confirme Ichikawa de JICA. Depuis le glissement de terrain de 1990, JICA a pris toutes les mesures de sécurité, y compris la collecte d’eau dans des puits différents. «C’est la raison principale pour laquelle la région entière a été stabilisée.» G. Vinod rassure que, pendant la phase de préconception du projet et lors de l’appel d’offres, ils ont pris connaissance du rapport de JICA. «Nous avons pris en considération les facteurs et les paramètres de JICA durant le detailed design. Nous faisons aussi nos propres tests géotechniques.»

Un autre ingénieur civil est tout aussi catégorique. «C’est bien une érosion et non un glissement de terrain, qui se produit perpendiculairement à une pente. Celle-ci s’est déroulée le long d’une tranchée. C’est un affaissement des murs de la tranchée.» Cela survient avec l’augmentation de la teneur en eau. Les particules deviennent plus lubrifiées et la partie du côté de la tranchée s’effondre.

Par ailleurs, un ingénieur qui connaît bien la région ne partage pas cette théorie. Il maintient que c’est un glissement de terrain. «Une érosion aurait été causée par l’eau de pluie qui dévale à grande vitesse. Et elle n’au- rait pas été localisée.» Selon lui, pour une région sujette à des glissements de terrain, les études géotechniques ne sont pas généralisées, mais ponctuelles. «Si un tronçon est long d’un km, des tests doivent être faits sur chaque 50 ou 100 mètres. À Maurice, il n’y a pas de radar qui va à une profondeur de 12 m. JICA a dû déterminer la ligne de glissement en dessous. Est-ce que cette ligne a changé ? C’est possible qu’une vibration l’ait changée. Une érosion est impossible. Elle aurait balayé une partie de la route. Ça, c’est un petit glisse- ment de terrain.» L’ingénieur mécanique, Poorranarnenden Sungeelee, exprime, par ailleurs, des doutes sur la solidité de la région. «Dans les années 50, on avait essayé de construire une route autour de la Montagne-des-Signaux. Les bulldozers utilisés glissaient à chaque fois. Aster-la pé pran trin pé met lor sa trasé-la.»

Mur de soutènement construit

370 m3 de béton ont été coulés, dimanche. Un mur de soutènement sera construit pour renforcer le côté de la rue Maupin ainsi qu’un nouveau drain. Ces changements seront faits dans la région de La Butte pour améliorer les conditions des habitants, a annoncé Antonin Coantic, Project Manager de MEL.

La famille Julien relogée

Pourquoi la famille Julien qui habite à 20 mètres du tracé sera-t-elle relogée s’il n’y a pas de risque de glissement de terrain à la Montagne-des-Signaux ? En effet, Priya Julien avait affirmé dans l’édition de «l’express-dimanche» du 5 mai que sa famille avait peur que le toit ne leur tombe sur la tête et que les murs étaient lézardés. Il y avait même des débris dans le salon. Antonic Coantic explique qu’il y avait des défauts structurels sur sa maison depuis les glissements de terrain des années 90. «La maison se trouve en dehors de l’alignement. La structure était tellement faible que même du vent ou une pluie forte pouvait l’endommager. Comme c’était non loin du chantier on a préféré être du côté de la sécurité.» Ce qui ne convainc pas…