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Vergers: les letchis sur le gril
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Vergers: les letchis sur le gril
Alors que les appels à location de vergers commencent à peine, les agriculteurs font déjà grise mine. Face aux intempéries et attaques de chauves-souris, les letchis ont déjà grillé. La récolte fruitière s’annonce mal. Reportage.
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«Avec le soleil, la pluie et le froid qui s’éternise, les arbres ont grillé. Les grappes étaient pourtant bien formées. Mais avec ces conditions climatiques, elles sont désormais complètement asséchées. La production sera très faible», se lamente Rajen Seewchurn, président de l’Arsenal Litchi Growers Association. Âgé de 69 ans, il gère un verger d’un arpent avec 24 autres agriculteurs de la région. Il y cultive et entretient 48 plants de letchis, ce qui avait rapporté une production de 4 à 5 tonnes en 2018.
Mais cette année, le rendement sera catastrophique. «L’an dernier, on avait travaillé pour Rs 200 000. En 2019, on aura à peine entre Rs 4 000 et Rs 10000. On ne sauvera que 3 à 4 letchis par branche.» Dans sa plantation où nous faisons incursion, les letchis sont presque sans vie. Au fond, on trouve quelques brindilles contenant quelques rares fruits verts. Cette faible production sera ensuite vendue au public.
Comme lui, Rabindranath Kowlessur, 54 ans, qui loue des vergers, est tout aussi pessimiste. Pourtant, des avis de location de vergers, émis par des groupes privés, se multiplient actuellement. «Sur un des vergers que je loue à une de ces entreprises, on avait des mandarines locales. Mais les arbres ont vieilli et ne rapportent plus. Il ne reste que des letchis, mais la production est grandement perturbée par les chauves-souris et le mauvais temps. Le rendement sera d’environ 50 %.» Il loue depuis 1995 à une entreprise privée un autre verger à Trou-d’Eau-Douce, qui comprend 1 500 arbres rapportant des mangues, jujubes, entre autres fruits.
Comment se fait la location des vergers ? Rabindranath Kowlessur a débuté à dix ans. «J’ai tout appris des marchands. Je vendais des mangues à Re 1 l’unité à Curepipe, Rose-Hill, Port-Louis, etc. Vers 20 ans, je me suis mis à mon compte. Je louais des arbres fruitiers dans des arrière-cours. Dans les années 1980-1990, un manguier coûtait Rs 200. Et un letchi, entre Rs 1 000 et Rs 2 000», se souvient-il. Ayant acheté des véhicules, il fait fructifier son entreprise. Vers 1995, il conclut des accords de location de vergers.
À Trou-d’Eau-Douce, par exemple, la location coûte Rs 700 000 par an. Elle donne à l’agriculteur l’accès au terrain et aux arbres qu’il entretient, taille et traite avec des fertilisants jusqu’à la récolte. Ensuite, il cueille les fruits progressivement et les vend aux marchands directement. «Pour les ananas, j’achète directement les fruits aux champs. Pour la location des vergers et achats de fruits, mon coût est de Rs 1,5 million par an», précise-t-il.
Pour les terrains de l’État, le processus est différent. Selon un responsable du FAREI, une demande doit être faite au ministère de l’Agro-industrie. Elle doit être soutenue par un projet agricole, par exemple la culture de vergers. «Lorsque cette demande est approuvée, un contrat de location est effectué. L’agriculteur paie Rs 1 000 par arpent de terrain. Ce bail dure sept ans. Il est renouvelable d’un commun accord», affirme un officier.
C’est sous un tel projet que les planteurs de l’Arsenal Litchi Growers Association ont bénéficié des 25 arpents. Rajen Seewchurn confie que son père, alors laboureur, s’est embarqué dans cette activité avant de lui passer le relais. Dans d’autres cas, des commerçants financent des locataires de vergers. «Ces derniers s’en occupent. À la récolte, nous venons les cueillir», déclare Vikram Hurdoyal, directeur d’Ocean Tropical Fruits Export Ltd.
Est-ce une activité rentable ? Rabindranath Kowlessur affirme parvenir à faire des profits, fort de ses 34 ans d’expérience. Cependant, la location de vergers ne s’annonce pas si fructueuse. «Je viens d’acheter Rs 120 000 de filets pour parer aux chauves-souris. Cela paralyse notre activité. Je continuerai pour les six ans à venir.» Et, en sus de ces prédateurs, il faut se protéger des rats, des mouches de fruits, des oiseaux et même des voleurs, soutient Rajen Seewchurn. «En temps de récolte, on renforce la sécurité dans les vergers. Sinon, ils sont pillés. Je crois toujours dans ce métier. C’est comme un enfant. Il faut juste bien s’en occuper. Un bon entretien permet de bien conditionner les arbres. Les intempéries sont difficiles à contrôler.»
Cela dit, certaines régions ont échappé à l’assèchement des letchis, notamment à Amaury, Montagne-Longue et le Sud de l’île. «Les récoltes se feront vers fin octobre ou en novembre», souligne l’agriculteur d’Arsenal. Toutefois, cette baisse de production entraînera sans doute une majoration des prix sur le marché, affirment nos interlocuteurs.
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