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Déclaration ethnique: changer de l’intérieur façon Lalit ou attaquer de front style Rezistans ek Alternativ ?

18 octobre 2019, 22:00

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Déclaration ethnique: changer de l’intérieur façon Lalit ou attaquer de front style Rezistans ek Alternativ ?

Lalit a présenté, hier, ses 24 candidats aux élections générales. Tous ont participé à un tirage au sort pour savoir sous quelle classification communale ils vont s’inscrire comme candidats le 22 octobre. Le but : démontrer les limites du système électoral. «Nos candidats ont tout le mal du monde à se classifier eux-mêmes», explique Lindsay Collen, porte-parole du parti. Il se peut qu’un mari et sa femme soient de deux communautés différentes mais ont le même mode de vie. Or, la Constitution classe la population selon leur «way of life» C’est le seul moyen que Lalit ait trouvé pour contourner le problème et montrer les limites du Best Loser System (BLS). Chaque candidat a écrit à la commission électorale pour l’informer que s’ils seront choisis parmi les best losers, leur correspondance ferait office de démission en tant que député.

Le but du tirage au sort est de présenter des candidats et un programme à l’électorat. En ce qui concerne sa lutte contre le communalisme, Lalit estime qu’il faut une réforme électorale où les candidats repêchés seront issus d’une liste soumise par les partis.

«Si le leader estime que le problème est la représentation féminine, il mettra des femmes en haut de sa liste. S’il estime que le problème est la représentativité communale, il agira en conséquence.» Certes, la question de religion sera toujours présente mais elle ne sera pas prioritaire pour le choix des candidats repêchés et, surtout, elle sera invisible.

Système démographique fragile

Pourquoi ne pas se joindre au combat de Rezistans ek Alternativ ? «Parce que le judiciaire est composé de personnes nommées et non d’élus. Donc, elles ne peuvent pas se prononcer sur un système démocratique», explique Lindsey Collen. Le système démocratique est fragile et, pour le changer, il ne faut pas brusquer les choses, mais le modifier de l’intérieur.

«Faire pression sur le système judiciaire et l’Electoral Supervisory Commission n’est pas une bonne idée.» Lindsay Collen ajoute que l’avis émis par les Nations unies a aidé à vernir de respectabilité le communalisme.

«Lalit voit la défaite de la contestation judiciaire de Rezistans ek Alternativ (R&A) comme prévisible. Il a été clairement impossible de demander à la cour de modifier la Constitution. Pour se débarrasser du BLS communal, nous avons besoin d’une majorité de 3/4 des députés élus de l’Assemblée nationale pour se mettre d’accord sur un amendement comme la démocratie l’exige.» Chaque fois qu’il a présenté des candidats aux élections générales, Lalit a contourné la classification communale imposée par le BLS par un tirage au sort pour remplir les documents de candidature, pour «participer aux élections. En même temps, nous poursuivons notre lutte politique contre le BLS communal».

Pas d’autre moyen pour R&A

Du côté de R&A, il n’y a pas d’autre moyen de combattre le système que l’attaque frontale. Stefan Gua avance que Lalit a sa stratégie, mais qu’elle n’est pas partagée par le comité de son parti. «Nous avons opté pour ne pas remplir cette section du Nomination Paper. Nous ne sommes pas d’accord avec la catégorisation de la population.»

Si la candidature des 20 candidats est rejetée, le 22 octobre, pour non-déclaration de leur appartenance ethnique, R&A se réserve le droit de contester les résultats des élections. «Nous prendrons des actions aux niveaux national et international une fois que nous aurons la confirmation du rejet de nos candidatures. On fait appel aux Mauriciens pour nous soutenir.» R&A a décidé quelles seraient ses actions. «Nous ferons appel aux Nations unies, entamerons des actions politiques. Celui qui rejettera nos candidatures devra assumer. Zame mo’nn klasifié mwa pou partisip dans enn eleksion

Stéfan Gua ajoute qu’il n’est pas exact de dire que les Nations unies ont demandé un recensement ethnique. «Dans cet avis, il a été dit que Maurice doit mettre à jour le fameux recensement ethnique de 1972 ou perpétuer un système communal. Il a aussi été dit que tous les candidats qui n’ont pas souhaité déclarer leur appartenance ethnique doivent avoir un effective remedy.» Et, conclut Stéfan Gua, si le combat était si facile, l’État n’aurait pas opposé autant de résistance.

Contestation

Lorsque R&A a porté l’affaire devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies en 2005, le jugement prononcé en 2012 avait préconisé deux solutions. Revoir le BLS ou faire un nouveau recensement ethnique.

«Mais avant ça, dans les années 2000, la bataille était presque gagnée. Tous les partis étaient contre ce système. Le processus enclenché ensuite devant la justice et les Nations unies a renversé la vapeur», souligne Lindsay Collen.

En 2010, la candidature des membres de R&A est rejetée par la commission électorale pour non-déclaration de leur appartenance ethnique. Le juge Eddy Balancy avait tranché en faveur de R&A. Fort de la décision favorable des Nations unies obtenue en 2012, ce parti maintient son procès contre l’État pour contester l’obligation faite aux candidats de déclarer leur appartenance ethnique.

En 2014, un mini-amendement transitoire permettant aux candidats de ne pas déclarer leur communauté pour se présenter aux élections est voté et l’État s’engage à revoir le système électoral. Ce procès, renvoyé à plusieurs reprises, ne devrait pas trouver de conclusion avant le Nomination Day. La réforme enclenchée au Parlement pendant le dernier mandat n’ayant pas abouti en septembre 2018 faute de consensus, l’option la plus probable était le retour du mini-amendement. Mais le 8 octobre, le décret présidentiel a rendu la déclaration obligatoire. 

Population générale, ki été sa ?

Lalit a toujours fait un tirage au sort pour ses candidats aux élections générales. En 2000, la déclaration de ses candidats est contestée. Le juge Dheerujlall Seetulsingh avait rejeté la contestation et classifié tous les candidats dans la catégorie «population générale», peu importe leur appartenance ethnique.

Selon la First Schedule de la Constitution, toute personne dont le style de vie ne le catégorise pas dans «Hindu, Muslim or Sino-Mauritian», est automatiquement catégorisée dans la population générale. Cependant, selon une analyse du juriste Parvez Dookhy, ce groupe n’est pas un groupe religieux car il n’y a «aucune référence à une appartenance religieuse ou communautaire». C’est donc un groupe «générique» qui ne met pas en avant son appartenance communautaire.

Toutefois Stefan Gua n’a pas la même interprétation de la Constitution. Cette lecture oblitère l’historique de la «population générale, qui, à l’origine, visait à classifier la population». De plus, si les candidats de R&A se définissent comme population générale, cela stabilise le système actuel et le calcul ethnique va perdurer.

Même lecture pour Alain Ah Vee de Lalit. Même si le parti a décidé de procéder au tirage au sort, la classification des candidats n’est pas une option. «Être dans la population générale actuellement, c’est accepter de facto que les autres catégories existent