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Patrimoine culturel: mère et fille à la découverte de leurs racines à travers le séga tambour

14 décembre 2019, 16:15

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Patrimoine culturel: mère et fille à la découverte de leurs racines à travers le séga tambour

Le séga tambour des Chagos est désormais inscrit au patrimoine culturel et immatériel de l’Unesco depuis cette semaine. Une reconnaissance qu’attendaient avec impatience les représentants de la communauté chagossienne, présents à Maurice. Les Chagossiens comme Mimose Furcy n’ont pas attendu cette mention pour assurer que ce séga tambour soit une entité vivante. Grâce au groupe tambour Chagos, elle initie des jeunes et des moins jeunes aux pas du séga tambour. Parmi ses apprenties, Owenda Aglae et sa fille Amanda Jacques.

Mère et fille ont une même passion : la danse. Plus particulièrement la pratique de la danse du séga tambour. Véritable héritage de leurs ancêtres, le séga tambour représente pour elles une connexion avec le passé. Un douloureux passé connu de ceux qui ont été exilés de leur archipel et qui se sont brusquement retrouvés à Maurice. Pour ces habitantes des Chagos qui ont trouvé refuge à Pointe-aux-Sables, ce séga coule dans leurs veines.

Le groupe tambour Chagos au dernier Festival Kreol.

«Depuis que j’ai huit ans, j’ai découvert que j’aimais danser. J’aime la musique, oui, mais j’ai une passion pour le séga. Je pratique le séga mauricien et le séga tambour des Chagos. Je suis danseuse de séga professionnelle. Mais je n’ai jamais vraiment appris à danser, à proprement parler. C’est venu tout seul», explique Owenda Aglae. À 30 ans, la jeune femme dit fièrement qu’elle n’a fait que répondre à un cri du coeur. C’est là qu’elle a décidé de se perfectionner dans le séga tambour.

«Mon père est Chagossien ainsi que ma mère. Moi, je suis née à Maurice mais j’ai toujours ressenti cette douleur que ma famille a traînée depuis qu’elle a été forcée de quitter son île natale pour venir vivre à Maurice. J’ai le coeur gros lorsque je pense à la souffrance des Chagossiens. Parfois, je m’assois et je pleure en pensant à leur déracinement. Et un jour, pendant que je pensais une fois de plus à cela, je me suis dit pourquoi ne pas m’intéresser de plus près au séga tambour», affirme Owenda Aglae.

C’est alors que la jeune femme décide d’approcher le groupe tambour Chagos, dirigé par Mimose Furcy. C’était il y a quelques mois à peine. Mais son aventure ne commence pas là. «C’est dans les fêtes familiales que j’ai appris à danser le séga tambour. Je regardais faire ma famille et j’ai fait pareil et j’ai aussi encouragé mon aînée à en faire de même», relate-t-elle.

Ce qui lui fait le plus de mal, c’est de réaliser que son père n’aura possiblement jamais la joie de revoir son archipel. «Mon père ne peut pas voyager. Il ne pourra donc pas se rendre aux Chagos. Je ne comprends pas comment il y a actuellement des gens qui n’ont aucune histoire avec l’archipel, qui n’ont aucun lien mais qui arrivent à vivre sur l’île de mes parents. Nous, nous en sommes interdits», soutient-elle.

Afin que ses cinq enfants comprennent d’où ils viennent, c’est donc en compagnie de sa fille de 13 ans qu’Owenda Aglae se rend à des événements où il est prévu que dansera le groupe tambour Chagos. Comme la dernière fois, lors du Festival Kreol.

«Ce n’est pas difficile. Je comprends l’histoire qu’il y a derrière les chansons. Je sais que mes grands-parents ont beaucoup souffert lorsqu’ils sont arrivés à Maurice. Les chansons racontent leur vie dans l’archipel. J’aime la façon de danser des Chagossiens. Je voudrais être une danseuse plus tard», confie Amanda Jacques, l’adolescente de 13 ans.

Owenda Aglae pratique à la fois le séga mauricien et le séga tambour des Chagos.

Owenda Aglae, qui pratique à la fois le séga mauricien et le séga tambour des Chagos, arrive facilement à différencier les deux. La trentenaire souligne qu’en fait, il est difficile de les confondre. «D’abord, vous verrez que les vêtements sont très différents. Pour le séga tambour, la femme porte deux jupons sous sa jupe, de sorte que lorsqu’elle danse, on ne voit absolument rien sous sa jupe. Ensuite, la blouse qu’elle porte pour le séga tambour est longue et va à l’intérieur de la jupe. La manière de battre la ravanne est également différente. J’en joue également, ce n’est pas au même rythme. Mais j’aime vraiment les deux ségas. Je suis mauricienne mais mes racines sont chagossiennes », conclut Owenda Aglae.

 

 

Une inscription de plus, une reconnaissance de surcroît…

	<p style="text-align: justify;">Avant le séga tambour des Chagos, le séga tambour de Rodrigues avait été inscrit au patrimoine culturel et immatériel de l&rsquo;Unesco en 2017. Avant lui, le séga tipik et le geet gawai avaient obtenu cette reconnaissance mondiale. Dans cette catégorie, l&rsquo;Unesco reconnaît généralement aussi les traditions orales, les arts du spectacle et les rituels. Une fois que cette mention a été faite, l&rsquo;État doit mettre en place un plan d&rsquo;action afin de garantir la sauvegarde de ce patrimoine culturel immatériel. Sans doute que le groupe tambour Chagos sera appelé à contribution dans l&rsquo;élaboration du plan qui doit être soumis d&rsquo;ici deux ans. Au cas contraire, Maurice peut aussitôt perdre cette reconnaissance.</p>
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