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Incendies: le cauchemar éveillé de Mauriciens en Australie

6 janvier 2020, 22:30

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Incendies: le cauchemar éveillé de Mauriciens en Australie

Les réseaux sociaux sont inondés d’articles de presse. Les images sont effroyables. «Pray for Australia», peut-on lire. Le pays qui fait rêver des milliers de Mauriciens vit aujourd’hui l’un des pires moments de son histoire. Le haut-commissariat mauricien à Canberra a même dû fermer en raison de l’état d’alerte. L’annonce a été faite ce lundi 6 janvier. Nos compatriotes racontent l’horreur.

«C’est horrible. Vendredi, il y avait de la fumée partout dans La City (NdlR : Melbourne), car des feux de brousses s’étaient déclenchés à 30 kilomètres de la ville, soit à Victoria. Nous avions non seulement des problèmes à respirer mais la visibilité était aussi réduite». Propos de Zaf Bhaukaurally. Avec son époux Yash Bundhoo, le couple a élu domicile en Australie depuis cinq ans maintenant. Et un tel drame, ils n’en ont jamais vécu jusqu’ici.

Pour cause, en ce début d’année, plus d’une centaine de feux de brousse se sont déclarés à plusieurs endroits de l’île-continent. Tantôt dans le nord, l’Est et le Sud-Est, les sites internationaux rapportent qu’une superficie équivalente à deux fois la taille de la Belgique est partie en fumée à ce stade. Les pertes sont énormes. Si 24 personnes sont mortes et des villes et villages entiers détruits, l’on estime à 500 millions le nombre d’animaux qui ont péri dans les flammes. Chevaux, kangourous, koalas, chats sauvages ou encore divers types d’amphibiens… L’incroyable biodiversité de ce grand pays est plus que jamais menacée.

Les koalas meurent

Une situation qui interpelle Zaf Bhaukaurally. «Cela me fend le cœur de voir mourir ces petits koalas et kangourous. Ils sont des millions à souffrir, nous ne pouvons y être insensibles.» Des propos partagés par Takshika Persand, Mauricienne qui réside à Melton South, Victoria. «J’ai beaucoup pleuré en voyant des images d’animaux morts, de gens qui doivent évacuer leurs maisons et de pompiers qui risquent leur vie.» À seulement 20 minutes de route de son domicile se trouve un brasier. La jeune femme est terrifiée. «Le plus gros feu est à quatre heures de route d’ici. Nous vivons dans une angoisse permanente, priez pour nous. Et si les flammes se rapprochent ? Nous surveillons toujours le périmètre autour de notre demeure, nous suivons la situation de près.»

À Sydney, Vikash Sonea se trouve lui, à quelque 350 kilomètres des incendies. Toutefois, il n’y est pas insensible. «Nous avons noté un changement de température. Pe fer de pli en pli so», dit celui qui habite le continent depuis une décennie. «Nous avons peur, car personne n’est à l’abri. Avec le vent, le feu peut se propager rapidement. Nous ne fermons presque pas l’œil la nuit. Nou vey sak ti etinsel dan lesiel.»

Élan de solidarité

Une inquiétude partagée par Ravish Permala, qui réside, lui, à Perth. «C’est un drame sans précédent. Les feux déclarés principalement à New South Wales et à Victoria empirent. Plusieurs villes ont dû être évacuées, sans compter les animaux morts…»

Toutefois nos compatriotes sont unanimes à faire ressortir le véritable élan de solidarité nationale et internationale. «Des stars à travers le monde se sont engagées à aider l’Australie. De nombreux dons ont été promis. En outre, le Canada ou encore les États-Unis ont dépêché chez nous des pompiers», explique Ravish Permala. Les Mauriciens ne sont pas en reste et contribuent aux mouvements de levée de fonds sur les réseaux sociaux. «La somme recueillie pour le moment avoisine 25 millions de dollars. De plus, lorsqu’on fait des courses dans ses supermarchés, à la caisse, nous avons le choix de contribuer pour venir en aide aux victimes. Mem enn dolar, li fer so diférans sa. Tout le monde à travers le pays y met du sien, c’est déjà énorme», indique Takshika Persand.

Quant à Vikash Sonea, il explique que des étrangers dans son entourage font de leur mieux pour venir en aide aux locaux. «Des Sud-africains, par exemple, offrent de l’eau et de la nourriture aux sinistrés. Par ailleurs, des hôtels accueillent bénévolement des pompiers ou ceux qui ont perdu leurs maisons», dit-il.

Des dégâts énormes

Le Premier ministre australien Scott Morrison visite une ferme détruite par des feux de forêt à Sarsfield, dans l’État de Victoria.

Les incendies ont coûté la vie à 24 personnes jusqu’à présent. Et un demi-milliard d’animaux ont péri. Parmi eux, 8 000 koalas morts. Plus de six millions d’hectares de terre ont été détruits, entraînant la destruction d’au moins 1 400 maisons et bâtiments. Selon des médias locaux, il se pourrait que ce premier bilan soit bien plus lourd. Un état des lieux beaucoup plus réaliste ne pourra être effectué qu’après l’extinction des flammes. Toujours est-il qu’environ 10 millions de personnes respirent des émanations toxiques. Ces millions de personnes délocalisées représentent la plus grande évacuation jamais réalisée en Australie. Les états de Nouvelle-Galles du Sud et de Victoria, sévèrement touchés, sont en état d’urgence, alors que plusieurs des habitants ont trouvé refuge sur des plages. Toujours selon les médias locaux, si la chaleur intense persiste, les feux ne devront pas prendre fin avant les mois de mars ou avril.

Pluie bénie...

Des Australiens dansant sous la pluie. Hier, dimanche 5 janvier, en début de soirée, des milliers d’internautes ont partagé des images lourdes de sens. Dans certains endroits rongés par des flammes, de grosses gouttes d’eau, accueillies comme une véritable bénédiction, ont commencé à tomber. Nos compatriotes s’en réjouissent également. «Il a commencé à pleuvoir et la température est redescendue. Il faisait ce matin (NdlR : dimanche matin) dans les 17°C», souligne Zaf Bhaukaurally.

Takshika Persand a été, elle, surprise mais reconnaissante en constatant les premières averses. «Nous espérons que la pluie durera plusieurs jours. The country is on fire. C’est la première fois que nous faisons face à une telle situation. Bann dimounn pé bizin al dan lamer pou sové, éna bann bato militer si pé édé. Nous nous préparons au pire dans les mois à venir car la température pourrait continuer à grimper…»

Koalas et kangourous en danger !

Des images de koalas cherchant de l’aide auprès de pompiers et des passants font le tour des réseaux sociaux. Vulnérables et désespérés, ils s’accrochent à la vie. Le ministre fédéral de l’environnement australien a expliqué que depuis septembre, près de 30 % des koalas de Nouvelle-Galles-du-Sud auraient disparu dans les flammes. Une évaluation basée sur la perte de leur habitat. Mais ce chiffre pourrait être revu à la hausse. Cet animal emblématique de l’île-continent meurt le plus souvent intoxiqué par la fumée, est pris au piège des flammes ou meurt de déshydratation en cette période de forte chaleur. Les kangourous ne sont pas non plus épargnés. Plusieurs de ceux qui arrivent à être sauvés témoignent de leur gratitude en partageant un «hug» avec des humains. D’autres images insoutenables d’eux couverts de brûlures et incapables de bouger circulent sur la Toile. La souffrance est telle que certains vétérinaires bénévoles ont opté d’effectuer des euthanasies en masse sur les animaux qui souffrent.

Des milliers de soldats du feu risquent leur vie

Sur les 3000 pompiers qui combattent les flammes, seuls 1300 sont des professionnels. Plus de la moitié est composée de citoyens bénévoles. Épuisés mais courageux, ils peuvent désormais compter sur l’aide de la communauté internationale. Le Canada, les États-Unis ou encore la Nouvelle-Zélande ont envoyé sur le sol australien de nombreux pompiers. Mais contrairement à d’autres pays, à l’instar du Canada, l’Australie n’a pas beaucoup d’eau. C’est d’ailleurs le continent le plus chaud de la planète. 70% de cet immense pays est désertique ou semi-désertique.

Des stars mondiales interpellées

La chanteuse Pink, a promis de donner 500 000 dollars aux pompiers australiens, pour leur donner les moyens de continuer à combattre le feu. «Je suis totalement anéantie en voyant ce qui se passe en Australie en ce moment avec ces feux de brousse horribles», a-t-elle twitté. L’actrice australienne Nicole Kidman, a promis d’en faire de même. Sur sa page instagram, elle a posté les liens de différentes unités de pompiers, à travers desquels des gens peuvent faire des donations. Elle a été rejointe par son compatriote Hugh Jackman. Ce dernier a également mis à la disposition du public des liens sur lesquels il est possible de faire des dons.

La famille royale en Grande-Bretagne, a quant à elle émis un communiqué, signé par la Reine Elizabeth II. «J’ai été profondément attristée d’apprendre que les feux de brousse continuent en Australie (…) Je remercie les services d’urgence et tous ceux qui mettent leur vie en péril afin d’aider ceux qui en ont besoin (…)», peut-on y lire.

Des incendies provoqués par la chaleur extrême

Les feux de brousse se produisent régulièrement lors des mois les plus chauds de l’année, en raison notamment des climats chauds et secs de ce pays et s’étendent sur de vastes espaces. Depuis le mois de novembre, le mercure atteint des sommets dans divers endroits sur le continent. Cela fait des semaines déjà que des feux de brousse se sont déclarés et se sont étendus sur des kilomètres. Des images montrent un véritable enfer : hommes et animaux fuyant le piège des flammes.

Deux états sont les plus sévèrement touchés : celui de Nouvelle-Galles du Sud et Victoria. Autour de 140 incendies actifs continuent à se propager et ont obligé des milliers de gens à quitter leurs maisons.

Par ailleurs, un nouveau record absolu de température a été atteint à Canberra, la capitale du pays samedi dernier, soit le 4 janvier. Le thermomètre affiché 47°C. Le précédent record était de 42,8°C le 11 janvier 1939, enregistré à l’ancienne station d’Acton et de 42,2°C noté à l’aéroport de Canberra le 1er février 1968. Jusqu’ici, on estime à plus de cinq millions le nombre d’hectares partis en fumée ces trois derniers mois. Parmi ces brasiers, un «méga incendie» couvre à lui seul 250 000 hectares. Celui-ci se trouve à moins d’une heure de route de Sydney, la plus grande ville australienne, sur laquelle des cendres sont parfois tombées.