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Coronavirus: le racisme sous le microscope
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Coronavirus: le racisme sous le microscope
Le hashtag #JeNeSuisPasUnVirus. Pour contrer les mèmes comme «Palé Sinwa Palé»… Depuis que le virus «chinois» est apparu, la polémique se répand également sur les réseaux sociaux. Piques, propos racistes, commentaires désobligeants ou de mauvais goût sont légion. Chez nous aussi, certains en font les frais.
Alors que le Coronavirus continue à faire des ravages à travers le monde, avec plusieurs milliers de personnes infectées et plus de deux cents morts jusqu’ici – alors qu’à Maurice certains ont été placés en quarantaine à l’hôpital de Souillac – l’épidémie réveille également le racisme anti-asiatique, depuis peu. Entre moqueries et «pran enn ti nisa», des Mauriciens de la communauté chinoise se disent mal à l’aise…
Mais pas que chez nous. La preuve, c’est que, sur les réseaux sociaux, le hastag #JeNeSuisPasUnVirus a fait son apparition. La raison, justement, c’est que plusieurs personnes d’origine asiatique ont dû faire face à des propos jugés racistes, en France notamment. Des piques discriminatoires que des milliers d’entre eux subissent au quotidien. Que ce soit dans la rue ou au travail. Malheureusement, Maurice n’est pas en reste. «Avant, au travail, on me surnommait Sinwa, maintenant, les collègues m’appellent Corona…» Eric, qui est employé dans une compagnie sise aux alentours du port, soutient que si au début, cela l’amusait, désormais, c’est limite énervant. «J’aime pas du tout. Je trouve que c’est de mauvais goût. Et franchement, on le vit vraiment mal», déplore le jeune homme.
Hormis les publications sur Facebook, jugés racistes, qui stigmatisent toute une communauté, Eric soutient que dans la rue, à Port-Louis notamment, les gens semblent «bat karté» en le voyant. «Personnellement, j’ai été victime de cela. Les gens te regardent avec ‘de gros yeux’. Ça se voit qu’ils ont peur de toi, comme s’ils allaient tomber malade en nous approchant.»
Il y a aussi la couverture d’un journal francophone, (NdlR, Courrier Picard n’a pas hésité à titrer dans son numéro en date du 26 janvier 2020 «Alerte Jaune»), qui le chiffonne. «Quel message voulait-on faire passer ? Sachant très bien que des choses comme ça feront le tour de la Toile, en moins de temps qu’il n’en faut pour rire jaune ! Moi je dis qu’il faut plutôt prier pour les victimes, ceux qui souffrent, ceux de Wuhan, ceux qui sont touchés. Au lieu, que de diviser tout un peuple, une race, une communauté en particulier», lâche Eric. Le cri vient du cœur.
David Stafford fait également partie de ceux qui trouvent que tout ça n’est ‘pas normal’. «Si t’es Sino-Mauricien, dès que tu éternues, les gens commencent à te regarder bizarrement.» Ce dernier a des amis et de la famille qui vivent ce racisme au quotidien et surtout très mal. «Moi, j’ai un fort caractère. Les collègues au travail n’osent pas, je pense, venir m’embêter. Cependant, les petites piques planent toujours. Mo ti fek an konzé-la, zot demandé sipa mo finn res lakaz akoz coronavirus…»
«Après une épidémie, une pandémie, ça peut partir de n’importe où. Li pa get figir sa ! Li pa get ras. Kifer bizin ziz enn sel katégori dimounn?» Pour ce qui est des posts sur les réseaux sociaux, il dit en avoir ras-le-bol de voir la méchanceté des gens. «On nous oppresse. Zot dir li bon, la Chine sa. Il faut qu’on réalise que ce sont aussi des humains avant tout.»
Kenny Chan, lui, a développé le réflexe de «bred sonz». Il ne prête pas attention aux «ti jokes» de ses amis. «Zot fer sa pou pran enn ti nisa. Mais cela ne m’affecte nullement. Je m’y suis habitué et je ne dis rien. Cela ne me blesse pas. Au fond, on sait qu’ils nous taquinent, c’est tout. Pas au point de qualifier cela comme du racisme.»
N’empêche que cette épidémie de coronavirus l’inquiète au plus haut point. Étant donné qu’il a de la famille en Chine en ce moment. «Bon c’est vrai qu’ils ne sont pas tout près de Wuhan. Toutefois, le risque est là. Chaque jour, nous leur passons un coup de fil, on communique énormément pour s’assurer que tout va bien. Nou pran zot nouvel pou rasir noumem. La crainte est là. Nous juger n’aidera pas !»
Trevor Leung Kei abonde dans le même sens. Né à Rodrigues, il est à Maurice, depuis plusieurs années. Il est employé dans une compagnie privée située à Baie-du-Tombeau. «Je le vis très bien. Nous ne sommes pas contaminés à Maurice, pas vrai ? Alors pourquoi s’en faire ?» Même au travail, soutient-il, ses collègues ne le jugent pas, ne le fatiguent pas, pas de vanne en vue. «Non rien du tout !» Cela dit, les posts sur Twitter, Facebook et autres fleurissent chaque jour, certains puant le racisme de bas-étage à plein nez. Nombreux sont les internautes à travers le monde qui doivent faire face à une vague de moqueries rarement drôles. Des commentaires et une psychose souvent alimentés par des fake news – que ce soit des photos ou vidéos diffusées sur le Web – dans le but d’accentuer la crainte et le mépris ou tout simplement pour faire le buzz… «Inn ariv ler pou dimounn aret kwar tou seki zot trouvé lor internet», conclut David.
Bière Corona et Vona Corona…
<p>Les associations sont faciles, et ce sont les chiffres de Google qui le prouvent cette fois. Depuis que l’épidémie de coronavirus a éclaté, les recherches concernant le <em>«beer virus» </em>ont explosé. Pourquoi ? Tout simplement parce que des gens ont confondu la bière mexicaine Corona (qu’il faut consommer avec modération) et le virus. Entre le 18 et le 26 janvier, les recherches sur le moteur de recherches s’agissant du <em>«Corona beer virus»</em> ont augmenté de 2 300 % alors que celles concernant le <em>«beer virus» </em>et <em>«beer coronavirus» </em>ont augmenté par 3 233 %. Mais rassurez-vous, il n’y a absolument aucun lien entre la maladie et le produit. Et Corona a tenu à mettre les points sur les <em> «i»,</em> non sans un brin d’humour. <em>«No, you don’t get the coronavirus by drinking our beer ! Coronavirus symptoms include fever, runny nose and coughing. Symptoms of drinking Corona include gagging, craving Taco Bell and waking up next to someone you wish you wouldn’t have»</em>, a affirmé la compagnie mexicaine via a un post sur les réseaux sociaux. D’ailleurs, les produits locaux ne sont pas en reste. Depuis le début de l’épidémie, les jeux de mots et blagues sur le coronavirus et Vona Corona, la fameuse glace artisanale qui fait partie du patrimoine Mauricien, sont légion. Il n’a pas fallu longtemps pour que les mèmes apparaissent. Est-ce que cela a affecté le business ? Nawaz Jewon, responsable de Vona Corona, en rit. <em>«Absolument pas. Certes, il y a des clients qui font les blagues, mais sans plus.»</em> D’ailleurs, il voit en ces blagues et autres posts sur les réseaux sociaux une forme de publicité gratuite et il ne s’en plaint pas, surtout que cela n’a pas refroidi son chiffre d’affaires. <em>«Mais je vais vous confier quelque chose. Sa Vona Corona-la, enn viris mem sa. Kan ou pran enn, ou anvi enn deziem!»</em></p>
Non, pas de thé au fenouil…
<p>Des publications partagées des milliers de fois sur les réseaux sociaux affirment que des professionnels de santé recommandent l’ingestion de thé au fenouil pour combattre le nouveau coronavirus, identifié en Chine à la fin de l’année 2019. Selon ces publications, le fenouil possèderait la même substance que le médicament Tamiflu, utilisé dans le traitement de la grippe H1N1. Les spécialistes contactés par l’Agence France-Presse (AFP) ont démenti cette rumeur.</p>
<p>«Le thé au fenouil à la même substance que le médicament TAMIFLU, le médicament utilisé pour traiter la grippe A - H1N1. Il est conseillé de prendre le thé comme s’il s’agissait d’un café, après les repas. Un infectiologue de l’hôpital St. Dominic’s recommande de prendre la tisane toutes les 12 à 12 heures car elle tue le virus de la grippe. C’est à partir du fenouil que l’on fabrique le TAMIFLU. Ce message, copier-coller d’une publication extrêmement virale au Brésil, a été publié sur un groupe algérien le 29 janvier, et a récolté des dizaines de partages depuis sa publication.</p>
<p>Il est assorti d’une kyrielle de conseils (évitez les lieux bondés, mangez du foie de boeuf, etc.), et est présenté comme étant les recommandations d’un directeur d’hôtel brésilien à la suite du coronavirus. Cette rumeur a pris une telle ampleur au Brésil que le ministre de la Santé a publié un démenti le 29 janvier sur son site officiel.</p>
<p><em>«Les rumeurs prétendant que le thé au fenouil possède la même substance que le médicament Tamiflu sont fausses ! Le thé de fenouil ne possède pas le principe actif de ce médicament (phosphate d’oséltamivir)»,</em> affirme ce communiqué.</p>
<p>Ces propos ont été confirmés par les laboratoires Roche, fabricants du Tamiflu. <em>«Ce médicament contre la grippe est composé de phosphate d’oséltamivir [...] ainsi que de certains excipients, substances venant compléter la masse ou le volume des produits pharmaceutiques. Le fenouil ou l’anis étoilé ne font pas partie de la composition de ce médicament»,</em> ont précisé les laboratoires Roche à l’AFP.</p>
<p>L’hôpital de Sao Domingo, cité dans le message viral, s’est également fendu d’un démenti. Selon la Société Brésilienne d’Infectiologie (SBI), il est faux d’affirmer que le Tamiflu est un remède contre le coronavirus. Ce médicament n’a d’utilité qu’en prévention et traitement du virus de la grippe. Selon les laboratoires Roche, le Tamiflu est indiqué pour <em>«le traitement et la prophylaxie de la grippe».</em></p>
<p>Parce qu’il a été découvert récemment, il n’existe toujours pas de vaccin ou de médicament spécifique pour le nouveau coronavirus, également connu sous le nom de 2019-nCoV. Selon la SBI, seuls le repos et l’apport hydrique sont indiqués, <em>«en plus des mesures pour soulager les symptômes, tels que les analgésiques et les antipyrétiques»</em></p>
<p>L’association entre le fenouil – populairement connu au Brésil sous le nom d’anis – et le Tamiflu peut provenir du fait que l’anis étoilé chinois possède un acide utilisé dans la production d’oseltamivir, l’ingrédient actif du remède, comme l’explique le Conseil régional de Pharmacie de l’État du Paraná. Le CRF-PR précise cependant que l’acide anis étoilé n’a pas le même effet que le médicament, car plusieurs réactions chimiques complexes sont nécessaires pour le transformer en oseltamivir.</p>
<p>Détectée en Chine à la fin de l’année dernière, le nouveau coronavirus a déjà fait plus de 200 morts et infecté environ 10 000 personnes au 31 janvier. L’OMS a déclaré une situation d’urgence internationale.</p>
<p>Selon l’Institut français de la recherche médicale (Inserm), plusieurs pistes de traitements sont à l’étude contre cette maladie pour laquelle aucune thérapie n’a encore fait ses preuves.</p>
<p><strong>AFP </strong></p>
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