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Nicola Ross: le trait d’union entre Maurice et l’Europe
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Nicola Ross: le trait d’union entre Maurice et l’Europe
Quinze ans après son départ pour la France, Nicola Ross, un conservateur de musée, est de retour sur son île natale. Avec un but. Celui de servir son pays, précisément les artistes mauriciens, après avoir été au service de leurs homologues étrangers. Rencontre.
C’est à la fin de décembre dernier que Nicola Ross est revenu dans son île natale. À présent, il souhaite rester à Maurice pendant trois à six mois, et le reste du temps à accompagner les artistes et transporter leurs œuvres en Europe. «Je suis revenu à Maurice car je sens que les choses bougent ici. Il y a un fort potentiel et il s’avère que les œuvres des artistes mauriciens ne sont pas collectionnées dans les musées publics en Europe. Un de mes projets c’est de valoriser cette scène artistique mauricienne et proposer leur travail aux institutions publiques internationales qui font des acquisitions d’œuvres d’art», affirme Nicola Ross.
Que fait Nicola Ross dans la vie ? Ce conservateur accompagne les artistes et les institutions (musées, théâtres, maisons d’opéra, galeries, collectionneurs privés) dans leurs projets bien en amont jusqu’à la fin. «Il peut s’agir du vernissage d’une exposition, de la publication d’un livre ou de la création de spectacles, entre autres. Il m’arrive aussi de travailler avec des chanteurs dans le cadre d’un projet lié à une institution telle que l’Opéra-comique, une maison d’opéra où j’interviens sur des recherches précises et poussées sur une œuvre. Le Carmen, à titre d’exemple», explique-t-il.
Dans ce cas précis, Nicola Ross dit être amené à faire des recherches sur la création de l’œuvre, soit comment elle a été reçue par la presse en 1975. «La presse était totalement abjecte contre cette œuvre qu’elle trouvait nullissime, et critiquée de manière négative alors qu’aujourd’hui, tout le monde l’apprécie», souligne-t-il.
Pour ce conservateur, l’art est aussi un marché, une économie. «Les artistes ont besoin de vivre, et il y a une économie derrière. C’est son savoir-faire, du temps passé. C’est du travail. Il y a des acteurs derrière qui œuvrent à cela et moi, je suis un intermédiaire», dit le trentenaire. «En ce moment je suis, notamment, en contact avec trois artistes dont deux qui veulent absolument venir travailler à Maurice en lien avec la société mauricienne», renchérit-il.
Pour Nicola Ross, on vit, aujourd’hui, dans un monde globalisé, donc, l’art l’est aussi. «Il ne peut pas s’inscrire uniquement dans un État insulaire et ne pas y sortir. Est-ce qu’on veut rester dans un statut quo ou envoyer cette richesse ? Je pense que quand on a grandi sur une île, il y a un moment où on veut savoir comment se passent des choses. Cela est valable dans n’importe quel secteur», estime-t-il.
Déclic
Et qu’est-ce qui explique ce retour aux sources ? Nicola Ross dit avoir eu le déclic alors qu’il travaillait sur un projet pour les 50 ans de l’indépendance de Maurice. Il s’agit d’une exposition qui a eu lieu à Paris, en avril 2018. «J’avais commencé à travailler sur le projet deux ans plus tôt. D’ailleurs, c’était la première fois que je travaillais sur un projet pour notre pays. J’ai eu l’occasion de voir la productivité de plusieurs artistes. À savoir, Pierre Argo, Robert Maurel, Serge Selvon, Didier Wong, entre autres. Je me suis dit que très peu d’artistes locaux sont connus à l’international. Plus j’avançais dans mes recherches, plus je voyais qu’il y a une production riche. Pourquoi n’est-elle pas présente dans les musées internationaux ?» s’est demandé le Curator.
La fascination de Nicola Ross pour les arts date de son enfance. Plus précisément à travers sa sœur aînée qui réalisait de grandes toiles. «Ensuite, en allant au théâtre du Plaza avec mes parents, j’ai découvert le monde des émotions. Puis, je me rendais aussi à la galerie Max Boullé pour voir les toutes premières expositions. Ça m’interpellait. Je ne comprenais pas tout, mais ça me faisait du bien d’y aller. J’avais alors 10 ans. Sans oublier les expositions organisées par l’ex-Private Secondary Schools Authority, aujourd’hui Private Secondary Education Authority, pour récompenser ceux qui avaient bien travaillé pour le School Certificate et le Higher School Certificate», relate Nicola Ross. D’ajouter qu’il était toujours très attiré par des portraits très réalistes, et les sculptures qui étaient des œuvres très rares dans les pratiques des étudiants.
C’est au collège du St-Esprit que Nicola Ross a étudié les arts. Mais, il souhaitait sortir du cadre… de l’A3. «Je me suis écouté. Mes parents m’ont fait confiance aussi. J’ai été faire des études artistiques culturelles. Et j’ai choisi la ville de Lille car, c’était la capitale européenne de la culture en 2004», raconte le jeune homme.
Après avoir complété sa double maîtrise en muséologie et médiation culturelle, et la politique culturelle à Paris, le jeune homme met le cap sur Marseille. Là où il a notamment assisté à la construction physique, scientifique et artistique du musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MUCEM) qui n’existait pas encore. Celui-ci ouvrira ses portes en 2013. Le travail de Nicola Ross consistait à chercher des artistes qui sont en accord avec le projet du musée.
L’autre projet de Nicola Ross : contribuer à la création d’un lieu de convergence à Maurice où on est conscient de nos différences culturelles, et du fait qu’il s’agit d’une force. «Notre pays peut devenir un exemple de vivre ensemble au moment où d’autres pays sont en train de se déchirer parce qu’ils ont peur les uns des autres. D’ailleurs, on est reconnu dans le monde entier pour être un peuple exemplaire», affirme le Curator.
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