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Opération «kraz lakaz»: la vie de Thomas, squatteur, qui a obtenu 6 crédits au SC…
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Opération «kraz lakaz»: la vie de Thomas, squatteur, qui a obtenu 6 crédits au SC…
Il est squatteur mais cela ne l’a pas empêché de briller lors des derniers examens du School Certificate (SC). Thomas Niclair, 17 ans, habite Cité Tôle, Curepipe, depuis cinq ans… Qu’a-t-il à dire sur la situation actuelle et l’opération «kraz lakaz» du gouvernement ?
Il y a quelques mois, son «quartier» était sous les feux des projecteurs. Dans les pages des journaux, sur la chaîne nationale. Grâce aux prouesses académiques de Thomas Niclair, 17 ans. Le «squatteur» avait obtenu six credits aux examens du SC. Le 28 mai, la donne a changé. Et ce même «quartier» connaît la tourmente…
Entre peur et choc, Thomas Niclair et sa maman Sharon ne cessent de repenser aux événements de ce jour fatidique. Cloîtrés dans leur petite maison en tôle, dépourvue d’eau et d’électricité, où les rideaux font office de mur de séparation, ils ne sont pas restés insensibles aux cris et aux pleurs de leurs voisins, qui ont été priés de partir dans les plus brefs délais.
C’est surtout le jeune Thomas qui a été frappé de plein fouet. Lui, qui est devenu le symbole d’espoir de ses voisins à Cité Tôle, Malherbes, en janvier. Il s’en souvient comme si c’était hier. Les gens ne cessaient de féliciter; «ce squatteur» avait réussi. Mais les success stories, dans ces «quartiers», s’oublient vite, rétorque l’adolescent.
«Pou mwa li vréman difisil pou trouv bann dimounn dan sa sitiasion-la…» Ce qui le blesse aussi : les commentaires désobligeants à l’encontre des squatteurs comme lui, depuis que l’opération «kraz lakaz» a débuté. «Mwa mo dir tou zistwar pena enn sel version. Tou dimounn pé kritiké mé vini vinn gété ki arivé pou koné kifer nou pé viv koumsa…»
Thomas estime qu’il est la preuve vivante du fait que ne pas avoir un endroit où vivre ne fait pas d’eux des personnes qui ne veulent pas s’en sortir. Fils d’une cleaner, l’adolescent a été témoin de tous les sacrifices de sa maman. «Kan mo mama inn désid pou nou vinn res isi, sé parski pa ti éna swa. Dépi 2003, li fer démars NHDC é li pann gagné. Li pa ti fasil ditou pou mwa pou adapté o débu. Mé selma, ni mwa ni mo mama pann bes lébra.»
«Nous n’avons pas de courant à la maison. Nous achetons des tubes rechargeables alimentés par l’électricité des voisins. C’est avec cela et un package internet sur mon téléphone que je fais mes devoirs. L’eau de nos bains et celle de la pluie que nous récoltons dans des fûts. Si je travaille dur à l’école, c’est parce que je rêve d’avoir ma propre maison. Ce n’est pas par plaisir que l’on vient vivre sur le terrain de l’État…»
Toutefois, Thomas, qui brille aussi dans le domaine du sport, est honnête. Il assure que s’il n’avait pas reçu de l’aide à temps dans son parcours scolaire, il n’est pas certain qu’il serait arrivé là. «J’ai eu la chance d’obtenir l’aide de SOS village de Curepipe. Cette association m’aide énormément dans mes études. Mais si moi j’ai cette chance, ce n’est pas le cas de tous les enfants ici.»
«Bann zanfan ki res la anvi rési»
D’une voix remplie de tristesse, l’adolescent dit observer ces camarades qui vivent dans le même quartier. Il donne des leçons particulières à certains plus jeunes que lui. «Bann zanfan ki res la zot aprann, éna anvi rési zot ousi, mé éna pa kapav konsentré. Éna fer bokou zéfor pou sorti ladan, mé lamizer ek zot sirkonstans ratrap zot… Akoz saem mo dir sa bann dimounn ki zizé la vinn gété ek zot lizié…»
Pour Sharon Niclair aussi, cette situation que vit ses voisins la tourmente. Surtout qu’elle l’a vécue il y a quelques années de cela, lorsqu’elle venait de s’installer à Cité Tôle. «Pa tigit marsé nou’nn marsé pou kav res la. Dépi 2003, mo alimant enn kont PEL é zot inn trouvé kifer mo la. Gras a asosiasion Kapav mo’nn kav fer démars, mo’nn rési resté. É gras a SOS Village, mo zanfan pé kapav aprann.»
Néanmoins, son cœur de maman ne reste pas insensible aux misères et aux pleurs de ses voisins et voisines. «C’est horrible. Ma petite fille de cinq ans a été traumatisée par tout ce qui s’est passé jeudi dernier. Ici, on s’est toujours entre-aidés. Par exemple, je garde les enfants de ma voisine car elle doit cumuler plusieurs boulots dans la journée. On se connaît tous et on partage la peine des autres.»
Elle ajoute, comme son fils, être déçue par toutes les insultes face à la situation des squatteurs. «Le fait d’être dépourvu d’un toit ne fait pas de nous des paresseux. Nous sommes nombreux ici à faire des efforts pour s’en sortir. Il y a des cas genuines de pauvreté ici. Nous avons tous nos histoires…»
Des bénévoles au grand coeur…
Impossible de rester insensible face à cette détresse humaine. Il fallait agir et vite. Et pour cela, trois jeunes hommes n’ont pas hésité à se rendre auprès des ceux ayant été expulsés des terres de l’État à African Town, à Riambel, afin de soulager, à leur manière, ces personnes dans le besoin. Jordan Bienvenue, Simon Trettel et Cedric Domingue, avec l’aide et le soutien des expatriés italiens à Maurice, ont procédé à la distribution de vivres, de vêtements et de tentes, principalement. «Nous nous sommes rendus sur place, mardi soir, et cela nous a vraiment brisé le cœur de voir dans quel état certaines personnes devaient se résigner à dormir. Ce n’est pas évident, surtout pour les enfants, en ce temps hivernal. Les autorités auraient dû au moins prendre en compte leur sort, avant de démolir leur maison. Gouvernma pa ti kapav ed bannla ? Zot inn mem kraz bann twalet. Ésey imaziné kouma dimounn pé viv !» lâche Jordan Bienvenue. Ce dernier explique qu’il n’est pas question de rester les bras croisés en ces temps difficiles. Ce n’est pas le moment de se demander si les squatteurs ont tort ou raison. Pour lui, en tant que Mauricien, qu’être humain, il faut aider. D’ailleurs, une deuxième visite est prévue sur place ce dimanche, pour vérifier que les personnes aient au moins le strict minimum. Soit à manger, de quoi se tenir chaud, de quoi dormir le soir. Izra Peerally, lui, s’occupe de ceux qui sont dans la même situation à Pointe-aux-Sables. «La plupart de ceux concernés sont toujours sur place, là où il y avait leur maison, désormais en ruines. Nous essayons de leur apporter un peu de réconfort…
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