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Hong Kong, ma douleur

17 juin 2020, 15:27

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Hong Kong, ma douleur

Un peu d’histoire pour le contexte pour reprendre «Chine, ma douleur» du cinéaste écrivain Dai Shijie et qui aborde (aussi dans «Balzac et la petite tailleuse») le thème des victimes de La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne dont on ne se sait toujours pas combien ont payé de leur vie cette campagne menée par une fraction du Parti Communiste Chinois (PCC) dans les années 1966 à 1969. Le Président Mao était contesté depuis l’échec du Grand Bond en avant (1958 à 1961) qui a aussi fait des millions de victimes, notamment à cause de la famine qui s’est répandue dans toute la Chine.

C’est à partir de ces évènements clés de l’arrivée du PCC au pouvoir, que les «révisionnistes» (y compris Deng Xiao Ping, qui va devenir le père du «socialisme de marché») vont être pourchassés. Les Gardes Rouges de la Révolution Culturelle vont réprimer les bourgeois révisionnistes, forçant certains à se «suicider» (sinon battus à mort, comme le grand écrivain Lao She) seulement parce qu’ils étaient réfractaires au «Petit livre Rouge» du guide suprême, Mao Ze Dong en personne, supposé “la pureté révolutionnaire”. Lui a été un fin stratège militaire (“Au Bord de l’eau”, histoires de Robin des Bois chinois aurait été un de ses livres de chevet) et en tant que bon philosophe politique, il avait sorti une théorie des contradictions pour les ennemis, la “principale” = les envahisseurs japonais et la “secondaire” = les nationalistes du Kuomintang.

Beaucoup comme moi avons adhéré à la cause de la RPC dans notre jeunesse. Dans notre pays, à cette époque, se faire traiter de “communiste” n’était pas bien vu. La majorité de la communauté chinoise était plutôt pro Parti Nationaliste de Chang Kaishek, sous la houlette des conservateurs du PMSD. Ceux qui soutenaient la Chine communiste étaient rares. Mes lectures de support étaient aussi le magazine de propagande «La Chine en construction» et j’ai même encore le Petit Livre Rouge comme « souvenir. Tous mes livres, parmi lesquels “Les Œuvres Choisies du Président Mao”, furent saisis par la CID de l’époque (y compris, quel dommage, Namasté que Marcel Cabon m’avait paternellement dédicacé).

Je ne fus pas le seul à “gober” cette propagande. Sartre et d’autres grands noms de l’intelligentsia parisienne en faisaient autant dans les années 70. Il y a même eu un professeur d’économie de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, spécialiste de l’URSS de l’époque, qui démissionna de l’Association des Amitiés Franco-chinoises refusant de travailler pour un pays devenu « révisionniste » quand Deng Xiaoping a repris les rênes du Parti et du pays. Il avait sollicité l’aide de Lee Kuanyew, ex premier ministre de Singapour pour l’aider à construire le “socialisme à l’économie de marché”.

Malgré tout, grâce à Mao et le PCC dans un premier temps, la Chine sera debout et deviendra ce qu’elle est aujourd’hui, le grand rival des USA, l’autre pays impérialiste de toujours. Dans ce nouveau contexte de capitaliste d'’Etat, la République Populaire de Chine (RPC) n’agira plus comme pays “frère” des autres pays du tiers monde pour combattre les impérialistes (y compris l’URSS), en Afrique notamment. Fini les stades, hôpitaux ou hôtels de l’Amitié au nom de la solidarité tiersmondiste. Business avant tout mais surtout pour combattre l’autre République de Chine (RoC, Taiwan). On trouve aujourd’hui des Instituts “Confucius” qui essaiment, des chaînes de télévision très “CNN” dans différentes langues, des Ambassadeurs qui écrivent des articles dans les journaux des pays où ils sont affectés, pour faire …........ de la propagande. Des personnalités en vue et des journalistes sont invités à faire des reportages/voyages dans ce pays extraordinairement beau (surtout dans ce qui reste de ses périodes de grandes dynasties). La Chine réunit la toundra de Sibérie jusqu’aux cocotiers subtropicaux de Hainan. Nous aimons ce pays qui a aussi libéré la femme chinoise des “pieds bandés”, celles qui arrivent à manœuvrer des grues pour construire les gratte-ciels, conduisent des poids-lourds et autobus.

Une seule Chine, pas deux systèmes !

Hong Kong, sans conteste, est chinois, volé et/ou cédé de force à la Grande Bretagne qui n’avait qu’une obsession = soumettre les chinois à la mondialisation telle que vue par les colonialistes de l’époque (avec les Français, les Allemands et les autres conquérants). Du saccage de l’ancien Palais d’été à Pékin aux Traités Inégaux, la Guerre de l’opium, le Mouvement des Boxers jusqu’aux 300 000 victimes des Japonais à Nankin, la Chine va traverser une longue période d’humiliation. Les Occidentaux avaient des concessions, les ports notamment et certains quartiers étaient interdits aux “chiens et aux chinois ». La Grande Bretagne en tête ne voulait qu’une chose = commercer selon la volonté de l’Empire, pour le « English Tea », comme en Inde. L’opium sera l’arme fatale et HK sera une des plaques tournantes avec ses “sociétés secrètes” et les fameuses triades jusqu’à la proclamation de la première République en 1911 avec Sun Yatsen puis l’arrivée du PCC au pouvoir en 1949.

Par la suite, la colonie de Hong Kong s’est constituée complètement en dehors du système communiste chinois et s’est enrichie pour devenir un des piliers du capitalisme mondial, Hong Kong and Shang Hai Bank en tête, Standard Chartered, Jordine & Matheson sont encore richement bien implantées.  Certains oligarques chinois du pouvoir actuel ont aussi bien garni leurs comptes personnels et en profitent toujours. C’est pourquoi le PCC a fait aux Hongkongais les yeux doux dans un premier temps - Un pays, deux systèmes. HK n’est pas « propre » non plus dans sa pratique du capitalisme « barbare », ne serait-ce que pour le traitement réservé aux employés de maison (surtout, les femmes des Philippines), digne d’une pratique féodale. Mais ils sont avant tout presque tous chrétiens et libres de penser, d’écrire, de bouger ou manger comme bon leur semble. Ils vivent comme les occidentaux et non comme les chinois du continent.

Le PCC accepte-t-il que le continent puisse faire pareil = impossible. Instaurer son autorité et mater ces “contrerévolutionnaires antichinois” pour se débarrasser de cette notion de deuxième système pour HK, voilà le but. Les Hongkongais ont peur, ils ne veulent pas connaître le Laogai (travail forcé dans des camps de rééducation), ils ne veulent pas avoir peur de leur propre ombre qui risque de les dénoncer à la cellule du quartier pour “mauvais comportement”, ils ne veulent pas que leurs enfants soient obligés tous les matins de “chanter la gloire du PCC, sinon de Mao Zhuxi (Mao, le Président) avant de rentrer en classe, ils ne veulent pas de la dictature prolétarienne du PCC. Voilà donc ce que représente la lutte de cette jeunesse qui brave l’autorité du PCC.

2e Hong Kong

Comme disait Edgar Faure, ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent. Même le Kuomintang de Chiang Kaichek à Taiwan, hier ennemi obsessionnel du communisme, s’est aujourd’hui rangé du côté du PCC, sans aucun doute par opportunisme. Ce même Kuomintang qui, dans sa débandade, a rempli des trains et des bateaux par milliers pour créer un des plus beaux musées de la Chine Antique aujourd’hui à Taipei.

L’actuel Minjindang au pouvoir, le Parti Démocrate Progressiste, n’y croit pas du tout à ce slogan « un pays, deux systèmes”. Il y a cette malheureuse réalité = Taiwan ne peut faire face au PCC que grâce à l’aide des USA. Des menaces sont régulièrement tenues avec des manœuvres navales et aériennes pour intimider, et les Taiwanais, et les voisins vietnamiens, hier frères d’armes, aujourd’hui concurrents. 

JC de l’Estrac soulève la question de l’Himalaya dans un excellent article récemment. En effet, La Chine et L’Inde pointent leurs canons et jouent avec le feu en permanence. Les 5 grandes fleuves, le Brahmapoutre, Le Gange, Le Yang Tse, Le Fleuve jaune et le Mékong sont des objets de tension qui peuvent amener “à la guerre de l’eau” (ou qui en sera le prétexte).

HK, je te pleure. Comme ceux qui le font courageusement chaque année pour les victimes de la place Tian Anmen depuis plus de 30 ans. Si j’étais taiwanais, j’aurai tout simplement peur.