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Covid-19: quand le WAP en fait voir de toutes les couleurs
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Covid-19: quand le WAP en fait voir de toutes les couleurs
À hier, 16 heures, 11 440 demandes de «Work Access Permit» pour 229 832 individus avaient déjà été approuvées pour les secteurs public et privé, combinés. En sus, plus de 72 000 demandes à l’intention de 364 909 employés ont été reçues. Parmi ceux en attente du document pour pouvoir se rendre sur leur lieu de travail, «carers», assistants dentistes et ONG, entre autres, sont dans le flou. Alors qu’ils sont bloqués, ils se questionnent sur l’importance accordée à leur métier tandis que d’autres, jugés moins essentiels, ont pu reprendre…
«Carers». Aucune indication du nombre de permis émis
Difficile à dire combien de carers, soit des aides-soignants ayant la charge d’une personne âgée, alitée ou d’une personne en situation de handicap, ont reçu le Work Access Permit (WAP). Pour rappel, le 19 mars, le ministère de l’Intégration sociale, de la sécurité sociale et de la solidarité nationale avait émis un communiqué pour informer les carers qu’ils pouvaient soumettre, en ligne, leur application pour l’obtention du WAP. Au niveau du ministère de tutelle, on affirme ne pas être en mesure d’indiquer le nombre de carers qui ont réussi dans leurs démarches. Car, non seulement tout se fait au niveau de la police, mais aussi, il n’y a pas de registre de carers individuels. «Certes, il y a environ 24 000 bénéficiaires de l’allocation pour le carer. Cependant, il y a des cas où ce sont des membres de la famille habitant sous le même toit que la personne âgée ou handicapée qui agit comme carer. Dans ce cas de figure, il n’y a pas lieu d’avoir un WAP puisque le carer n’est pas à appeler à circuler», explique-t-on.
Cela étant dit, l’on souligne également qu’au départ, certains carers avaient des soucis à faire leur demande de WAP sur la plateforme BeSafeMoris. «La démarche n’aboutissait pas vu que les principaux concernés s’arrêtaient en voyant qu’il fallait insérer son business registration number (BRN). Or, ils peuvent y insérer leur numéro de carte d’identité», précise-t-on.
Les dentistes écartés
Tout comme c’est le cas chez les vétérinaires, les assistants de dentistes n’ont, eux non plus, pas encore obtenu leur WAP et même certains cabinets dentaires. Sollicité, le président de la Mauritius Dental Association, le Dr Alain Chung Fat, explique que c’est très difficile pour le dentiste seul à s’atteler à toutes les tâches. À savoir, d’offrir des soins au patient et à nettoyer après le passage de chaque client. D’autant plus que dans le contexte actuel, il faut bien désinfecter.
«Rien contre les coiffeurs, mais est-ce que les services qu’ils offrent sont plus essentiels que les nôtres ? Les dentistes sont très sollicités pour des urgences car les gens ne veulent pas se rendre dans les hôpitaux car on commence à avoir des cas positifs au Covid-19», laisse-t-il entendre. D’ajouter que si les médecins sont exemptés de WAP, les dentistes devraient en avoir. Raison : ils craignent que leur certificat d’enregistrement ou encore la carte émise par le Mauritius Dental Council ne soient pas acceptés par les policiers qui ne réclament que le WAP.
Cependant, l’inspecteur Shiva Coothen du Police Press Office précise que les dentistes ne sont pas autorisés à travailler. Car le virus traverse, notamment, par la bouche. «On a eu des appels de plusieurs dentistes. Mais c’est au-delà de nos compétences», dit-il. De ce fait, la question de WAP pour les assistants des dentistes ne se pose pas.
Des ONG dans la galère
Des organisations non-gouvernementales (ONG) aussi ne comprennent pas la politique du WAP. Caroline Assy-Sohun, coordinatrice de la plateforme ACTogether.mu, raconte que depuis l’annonce du confinement, certaines ONG ont eu le WAP alors que d’autres, tout aussi importantes, non. «Je ne sais pas sur quelles bases certaines l’ont eu, mais je sais qu’il y a des associations dont le travail est très important qui ne l’ont pas reçu.»
Des associations, comme l’atelier Mo’Zar. La directrice, Valérie Lemaire, explique que sa demande pour les WAP a été faite la première fois depuis la première semaine de confinement mais aucune réponse. «La deuxième fois, c’était à travers la National Social Inclusion Foundation, qui a pris l’initiative de regrouper les demandes de toutes les ONG n’ayant pas reçu de WAP pour une nouvelle demande. Mais après cela, aussi nous n’avons rien eu comme réponse jusqu’ici.» Selon elle et la directrice de l’APEIM, Jocelyne Beesoon, l’absence de WAP est un véritable problème pour gérer une association. «Tout récemment, nous avons reçu deux WAP pour ceux qui s’occupent du service à domicile. Toutefois, beaucoup d’autres n’ont pas été délivrés. Nous devons donc payer des chauffeurs et des gens en dehors de l’association qui ont le WAP», explique Jocelyne Beesoon. Elle ajoute que ceux qui travaillent dans l’administration aussi n’en ont pas obtenu. Et à cause de cela, l’ONG se retrouve dans l’incapacité de comptabiliser les salaires. Un problème que partage Valérie Lemaire. «C’est dommage que nous, qui faisons un travail de terrain, soyons aussi bloqués à cause du WAP alors que des firmes moins essentielles que nous en ont obtenu. Avec le WAP on aurait aussi pu conscientiser de nombreuses personnes en tant qu’ONG mais nous sommes bloquées», ajoute la directrice de l’atelier Mo’Zar.
Les entreprises d’entretien partiellement opérationnelles
Des compagnies offrant des services de housekeeping sont aussi de service. À l’instar de Rent A Maid qui compte 80 employés à plein-temps et 20 autres à temps partiel. «C’est à la deuxième semaine du confinement qu’on a obtenu des WAP pour certains de nos employés. Il s’agit de ceux qui font le nettoyage des banques et des supermarchés. Mais les autres, soit environ 50 % de notre personnel, ont repris le travail aujourd’hui (NdlR, hier), après l’obtention du WAP», souligne Manish Cushmagee, fondateur directeur de l’entreprise.
Mais ce n’est pas la joie car le travail n’a pas vraiment repris. En effet, 5 % à 10 % de ses clients, essentiellement des individuels, ont laissé entendre que post-confinement, ils feront savoir s’ils continueront à solliciter ses services. «On comprend, tout dépend de leurs moyens. Puis, il y a aussi des compagnies qui sont nos clients mais qui ne possèdent toujours pas de WAP. Donc, elles sont fermées. Sans compter qu’il y a aussi des clients qui réclament des travailleurs qui se sont fait vacciner. 40 % de notre personnel l’est déjà. On ne peut pas forcer un employé à se faire vacciner», explique Manish Cushmagee.
Les médecins exemptés
Tous les médecins, qu’ils soient du public ou du privé, sont exemptés de WAP. Confirmation d’une source autorisée au bureau du Premier ministre (PMO). Toutefois, «ils sont autorisés à se déplacer de leur résidence à leur lieu de travail et vice versa ou à faire des visites au domicile de leur patient uniquement», nous ditelle. Même interprétation pour le député Farhad Aumeer, également contacté au téléphone. Il ne devrait pas y avoir de problème, car «le communiqué de la police émis en ce sens est clair. Les médecins n’ont pas besoin de WAP pour se déplacer pour leur travail».
Même son de cloche du Dr Patrick How, président de la Private Medical Practionners Association. «Tous les médecins qui ont été contrôlés à ce jour à divers checkpoints de la police n’ont eu aucun souci.» Ont-ils aussi le droit de travailler dans des cabinets privés en ce temps de confinement ? Selon ce dernier, il n’y a pas eu de directives claires à ce sujet jusqu’ici, mais «il y a une poignée de médecins qui le font et n’ont pas eu de problème».
Les vétérinaires dans le flou
Depuis l’annonce du confinement le mois dernier, de nombreuses cliniques vétérinaires ont eu des problèmes pour l’obtention du WAP. Le Dr Radakrishna Veerapa, président de la Mauritius Veterinary Association (MVA), explique que pour lui comme pour beaucoup de ses confrères, le doute plane sur plusieurs facteurs. «Nous sommes nombreux à ne pas avoir eu le WAP la première fois. Mais je dois dire que les policiers ont été plutôt souples avec nous, les vétérinaires, jusqu’ici. Mais, par exemple, comme moi j’examine des animaux dans une ferme, je dois traverser la zone rouge pour y aller. Sauf qu’on a besoin d’un WAP spécial pour ça et nous n’en avons pas.» Il ajoute, par ailleurs, que beaucoup de vétérinaires rencontrent aussi des problèmes pour refaire une demande de WAP.
En effet, comme beaucoup d’entre eux ne l’ont pas reçu lors de la première demande, lorsqu’ils ont ressayé hier et avant-hier après l’annonce de la prolongation du confinement, ils n’y sont pas parvenus. Il était notamment inscrit qu’ils avaient déjà fait une demande. «Sauf que la première demande n’a pas été délivrée. Donc beaucoup de cliniques vétérinaires sont dans le flou.» Et même si les vétérinaires eux-mêmes peuvent se déplacer sans WAP, le Dr Radakrishna Veerapa déclare qu’il ne faut pas oublier qu’une clinique ne peut pas opérer seule, elle a besoin d’autres employés et de chauffeurs, qui, s’ils n’obtiennent pas leur WAP, ne pourront pas s’y rendre. «Il s’agit là de la vie des animaux qui est en jeu et on a besoin de réponses.»
À ce propos, sollicité, l’inspecteur Shiva Coothen du Police Press Office indique que les vétérinaires sont autorisés à travailler. Et à ces fins, ils ont besoin d’être en possession du WAP. Il revient aussi aux vétérinaires de soumettre la demande pour que leurs assistants puissent obtenir le WAP. Mais comment faire s’ils n’arrivent pas à refaire une demande ? Un mystère…
Salon de beauté v/s salon esthétique
Plus de 300 coiffeurs attendaient toujours que leur demande de WAP soit approuvée par la police. Selon plusieurs, le flou persiste car le communiqué parle de salons esthétiques qui resteront fermés alors que les salons de beauté seront opérationnels. «Mais nombreux d’entre nous avons une licence de beauty palour (esthétique), et offrent plusieurs services dont des soins de la peau, des massages, et font également la coiffure. Be ki nou fer la nou? O mwin nou ti pou kapav travay ek fer zis bann kwafer», explique Josué, un des concernés. Selon lui, un groupe regroupant plus de 300 personnes dans la même situation a été créé. «Ek personn pa finn gagn WAP.» Ils ont une nouvelle fois fait la demande le 26 mars, en vain.
Ceux qui peuvent circuler…
Les membres de la police et qui sont «on official duty», les élus de l’Assemblée nationale qui se rendent aux séances de l’Assemblée ou à une réunion y relative, les juges, avocats et magistrats ou encore les pharmaciens n’ont plus besoin de WAP.
Également exemptés sont ceux qui sortent pour rechercher des soins médicaux ou des médicaments. Idem pour une personne devant se rendre en cour ou encore qui emmène son animal de compagnie pour des soins chez le vétérinaire.
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