Publicité

Transparence et liberté: Maurice glisse vers une autocratie selon V- Dem Institute

6 avril 2021, 18:30

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Transparence et liberté: Maurice glisse vers une autocratie selon V- Dem Institute

C’est quoi une autocratie ? C’est un régime où toutes les décisions sont prises par un seul homme, qui détient ou qui s’est arrogé tous les pouvoirs dans un pays et où la démocratie n’est pratiquée qu’au moment des élections. Et encore… 

50 % de notre Produit intérieur brut (PIB) avec l’Europe, qui nous condamne aujourd’hui 
«Choquant, très grave !» Telle est la première réaction de l’avocat Richard Rault. «On ne comprend pas que V-Dem est une institution respectée et soutenue par l’Union européenne. Cette dernière contribue 40 à 50 % de notre PIB.» Ce rapport aura donc une incidence négative sur notre économie. 

Pour Me Rault, la mobilisation excessive des forces de l’ordre lors de la comparution en Cour de l’ex-ministre Yogida Sawmynaden, les arrestations des Seenauth et Malherbes et autre Percy Yip Tong, la tentative de mettre sous contrôle le Directeur des poursuites publiques, la suspension de quatre députés, la semaine dernière, tout cela ne doit plus être considéré comme des incidents isolés mais comme une dérive comme la qualifient des organisations internationales. 

«Alors que Madagascar, que l’on regardait de haut, a fait des progrès en termes de démocratie selon le rapport, nous, nous suivons les mauvais exemples de la Russie, de la Chine et de l’Inde.» Il ne faut surtout pas prendre à la légère ce rapport, demande Me Rault.

Pourrissement des institutions 
Pour Milan Meetarbhan, avocat et spécialiste en droit constitutionnel, ce rapport comme celui du département d’État américain ou encore le classement du FATF/ EU, nuisent à l’image de marque du pays, bien que ces évaluations «ne nous étonnent guère car nous assistons depuis quelque temps à un recul de la démocratie dans le pays. On l’a encore constaté au Parlement la semaine dernière. En fait, le spectacle affligeant dans l’hémicycle est le reflet d’une situation, qui va au-delà de l’Assemblée nationale car on assiste à l’affaiblissement, pour ne pas dire le pourrissement de nos institutions.» 

Les questions à se poser, selon lui, sont : est-ce que les dernières élections étaient «free and fair and credible» ? L’opposition est-elle respectée ? Quel est le rôle de la Mauritius Broadcasting Corporation, ainsi que celui des régulateurs et des Law Enforcement Agencies ? Il rappelle comment les Investigative agencies sont utilisées comme parade afin de ne pas répondre aux questions au Parlement et maintenant pour refuser de remettre des dossiers à une institution, qui dispose pourtant d’un droit constitutionnel pour y accéder. «Des institutions qui sont censées être les chiens de garde de la transparence et de la démocratie deviennent des instruments qui permettent de renvoyer aux calendes grecques l’éclatement de la vérité sur les scandales. Elles sont de plus en plus le prétexte idéal pour éviter le Parliamentary scrutiny, ainsi que les poursuites en justice», dit-il. 

Nomination d’exécutants loyaux et serviles 
Milan Meetarbhan est d’avis que l’affaiblissement de nos institutions est aussi dû à la qualité de ceux qui sont nommés à leur tête. «Pour que l’institution soit forte, il faut que ses dirigeants soient forts parce qu’ils sont compétents, qualifiés pour le poste qu’ils occupent et par conséquent, disposent des moyens et de la volonté d’exercer leurs responsabilités de façon indépendante. Or, depuis quelque temps, on a l’impression qu’il y a une politique délibérée pour favoriser essentiellement la nomination d’exécutants loyaux et serviles.» 

Comment a lieu le passage d’une démocratie libérale vers une autocratie ? Selon le V-Dem Institute, «ruling governments first attack the media and civil society, and polarize societies by disrespecting opponents and spreading false information, only to then undermine formal institutions.» Et durant la pandémie, «further anti-democratic measures were enacted, including the suspension of parliament in December 2020…» Pourtant, dit le même rapport : «The recent developments in Mauritius come as a surprise to many observers. The island has been a democracy for over 40 years.»

Poursuite stratégique contre la mobilisation publique 
La première attaque donc se fait à l’encontre de la presse libre, dit le rapport. Selon des journalistes, «l’État utilise les procès en cour pour fatiguer et affaiblir une presse indépendante. Même si l’issue du procès n’est pas gagnée d’avance pour le gouvernement, le procès tend à épuiser financièrement le titre de presse et à décourager les journalistes, qui peuvent aussi faire aussi face à des poursuites au pénal pour criminal defamation».