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Consultations pré-budgétaires: la voix aux syndicats et institutions
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Consultations pré-budgétaires: la voix aux syndicats et institutions
Devesh Dukhira, CEO du Mauritius Sugar Syndicate :«Il est important que l’on reste compétitif»
Impact direct du Covid-19, le manque de devises étrangères sur le marché est source d’inquiétudes depuis des mois déjà avec pour résultat les interventions répétées et nécessaires de la Banque centrale qui vend et donc fournit le marché en devises étrangères. Face à ce problème, tous les secteurs pourvoyeurs de devises étrangères, à l’instar du secteur sucre, sont donc importants dans la conjoncture économique actuelle. On se rappellera de certaines mesures du budget 2020-2021 qui visaient à promouvoir et protéger ce secteur traditionnel, incluant la taxe à l’importation passant à 100 % ou encore un programme pour encourager la replantation de nos champs.
Il se trouve que certaines mesures n’ont pas été aussi efficaces que l’on pouvait s’y attendre. «Malgré l’imposition et la hausse de cette taxe, certains pays ont un accès préférentiel à notre marché et peuvent donc continuer à exporter leur sucre ici; les utilisateurs industriels, qui sont aussi exemptés de cette taxe, peuvent donc importer librement. Finalement, il y a encore des efforts à faire pour protéger le marché local. Maurice est un pays producteur excédentaire et c’est ironique que nous importions du sucre. Pour aller droit au but, je dirai qu’il y a urgence à tout simplement interdire ces importations», explique Devesh Dukhira, le CEO de la Mauritius Sugar Syndicate.
Zoom sur ces mesures que le Syndicat des Sucres souhaite voir dans le prochain budget, mais avant cela quid de la demande sur le marché international avec un équilibre chamboulé entre l’offre et la demande, pandémie et confinement nationaux dans le monde obligent ? «La canne continue de pousser, confinement ou pas, et la demande est toujours là. En effet, certains segments sont affectés, à titre d’exemple, les restaurants et hôtels sont encore fermés en Europe mais en même temps, en confinement, les gens font plus de pâtisserie à la maison. Il y afinalement une baisse minime dans la demande et nous n’avons eu aucune annulation de commandes pour l’instant. Au contraire, on espère qu’avec la fin de la troisième vague de la pandémie en Europe, la consommation pourra reprendre.»
Bon signe pour le secteur sucre, où on espère qu’à la fermeture des comptes en juin, le prix ex-syndicat pour la tonne de sucre de la récolte 2020 devrait être au moins Rs 13 000, contre les Rs 12 000 estimées en septembre dernier, Rs 11 383 en 2019 ; et Rs 8700 en 2018. Toutefois, ce prix reste en dessous de ce que les planteurs devraient pouvoir obtenir avec une optimisation des sous-produits de la canne et un rendement optimal dans les plantations.Voyons ces mesures attendues.
«Il est important que l’on reste compétitif car nous avons des concurrents dans les différents segments du marché desservis et il y a des améliorations à faire pour maintenir cette compétitivité. Dans ce contexte, des réformes qui ont été discutées profondément avec les consultants de la Banque mondiale sont attendues et l’on espère que leurs recommandations seront bientôt officialisées, sinon dans ce budget. Il y a plusieurs aspects du secteur qui méritent une attention particulière et urgente, à l’instar des rémunérations pour les sous-produits de la canne; il faut accorder sa juste valeur à la bagasse et à la mélasse ainsi qu’aux coûts tout au long de la chaîne d’approvisionnement.» Dans cette optique de maintenir notre compétitivité justement, il nous faut plus d’efficience en termes de coût de production mais il nous faut aussi optimiser le rendement dans nos champs de cannes. «Il faut un soutien pour que les planteurs puissent replanter sur une période de sept ans; cela nous donnera un rendement optimal contrairement à la moyenne actuelle d’au moins dix ans.»
Autre point important, la durabilité. C’est une des de- mandes de plus en plus pressantes, que notre production soit labellisée durable. «Si tous les producteurs pouvaient investir dans ce label, cela aiderait à assurer la demande pour nos sucres dans les segments les plus porteurs et ainsi avoir de meilleurs prix à la vente.» Sur la page innovation, il ne faut pas oublier la demande croissante pour le sucre organique, c’est-à-dire, le sucre bio. «Nous embarquer dans cette aventure représente un coût et il faut une bonne stratégie. Pour être certifié bio, il nous faut stopper toute utilisation de fertilisants ou autres produits chimiques pendant au moins trois ans. Mais cette transition aura un impact sur le rendement de la canne et donc sur les recettes dans l’intérim. Il nous faut donc planifier un accompagnement des planteurs concernés.»
Deepak Benydin, président de la FPBOU : «les nominés politiques n’ont pas toujours une formation dans des domaines précis»
Tombant sous différents ministères, les corps paraétatiques ont tout autant besoin de l’attention du ministre des Finances en cette période économique. «Budget après budget, les corps paraétatiques reçoivent de moins en moins d’argent chaque année alors qu’il y a plusieurs postes vacants dans différentes institutions tombant sous plusieurs ministères, je ne parle bien évidemment pas des cadres ; des nominés politiques mais de l’exécutif», explique Deepak Benydin, président de la Federation of Parastatal Bodies and Other Union (FPBOU). Il maintient que les corps paraétatiques ont un rôle important et il faut une réforme dans plusieurs secteurs. «Les activités de l’Agricultural Marketing Board (AMB) doivent être revues. L’AMB doit pouvoir apporter un service de stockage plus efficace ; on a vu l’importance d’un meilleur stockage avec ces deux confinements et le mauvais temps.»
Autre refonte nécessaire, la fusion de certains corps paraétatiques tombant sous un même secteur. «C’est un projet gouvernemental qui date. Or, au lieu d’une réduction, on voit au contraire une augmentation du nombre de corps paraétatiques. Ce n’est pas de l’efficience ça ; au contraire, les ressources sont dispersées ; on ne peut pas continuer le gaspillage, surtout pas en cette période.» Selon le syndicaliste, le cahier des charges de certaines institutions doit aussi être revu. «Il est nécessaire d’avoir un mécanisme de surveillance des fonds publics alloués et utilisés par les corps paraétatiques. Je propose la mise sur pied d’une parastatal service body commission pour s’occuper de la gestion des équipements et des fonds ainsi que du recrutement pour s’assurer que tout le monde puisse avoir ses chances. Les nominés politiques qui président les conseils d’administration ne sont souvent pas formés pour opérer et prendre des décisions dans certains domaines précis.» Dans le même élan, le syndicaliste estime que la mise sur pied d’une instance opérant comme un appeal tribunal aiderait à y voir plus clair en cas de licenciements abusifs.
Radhakrishna Sadien, président de la SOEF: «que le gaspillage cesse et que l’argent public soit utilisé à bon efficient»
Vu que le pays a déjà fait face à une première vague de Covid-19 en 2020, Radhakrishna Sadien, président de la State and Other Employees Federation (SOEF), trouve qu’il y a eu des manquements lors de la nouvelle vague et estime que Maurice aurait dû être mieux préparé, par exemple, par rapport au business conti- nuation plan. Dans ce contexte, parmi ses propositions, il suggère que le gouvernement fasse une risk assess- ment avec les moyens nécessaires. «Une réduction de 25 % des dépenses du budget 2021/2022 est irréalisable. Comme la dit l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il faut investir davantage dans le secteur de la santé et des services. Car il faut assurer des médicaments, de nouveaux équipements...»
Autre point relevé : le gaspillage continu dans diffé- rents secteurs dû à la mauvaise gouvernance ou aux abus dans l’allocation de contrats ou encore des projets inachevés. Chaque année l’attention est axée sur les manquements mais finalement aucune décision n’est prise. Il faut donc, selon la SOEF, être ferme à ce sujet car ces fonds gaspillés pourraient être utilisés à bon escient, par exemple, en revoyant le système du transport public. D’autre part, par rapport aux soutiens financiers en raison du Covid-19, il faudrait assurer que les bénéficiaires reprennent le travail et qu’en temps normal, ceux qui travaillent à leur compte déclarent leurs revenus. «La MRA doit faire un travail méticuleux. Le ministère des Finances doit mettre en place une équipe pour vérifier s’il y a preuve de sérieux afin qu’il n’y ait pas d’abus. Même au niveau des entreprises. (…) Après le Wage Assistance Scheme, il faut un système transparent pour voir si les entreprises continueront à garder leurs employés. Car cela peut avoir un impact sur le chômage.»
Le syndicaliste propose aussi la mise en place d’un audit social. Il estime qu’avoir un emploi, de meilleures conditions et de meilleurs salaires ne suffisent pas. «Faisant face à des problèmes tels que la drogue, le non-respect des valeurs, entre autres, il faut aller à la source des problèmes au lieu de trouver que des solutions superficielles. Avec un système d’éducation trop académique, il n’y a pas suffisamment d’accent sur les valeurs pour vivre comme un humain à part entière.» Comme diverses associations, Radhakrishna Sadien, plaide pour les consommateurs par rapport aux prix abusifs et aux produits de mauvaise qualité. «Il faut renforcer le personnel du ministère concerné et offrir tous les moyens pour un travail de terrain afin de contrôler les prix et la qualité des produits en vente.»
CTSP: «apprendre à vivre avec le covid-19 ne doit pas rester un slogan»
Des actions futures concertées et centrées sur l’humain. C’est ce que prône la Confédération des travailleurs des secteurs public et privé (CTSP), dans ses propositions pré-budgétaires dans une situation sans précédent. La réalité selon laquelle nous devons apprendre à vivre avec le Covid-19 ne doit pas rester un slogan, insiste-t-elle. Les lois nécessaires et d’autres facilités doivent être mises à disposition pour soutenir les gens. Elle propose donc le National Protection Social Scheme (NPSS) pour tous les travailleurs infectés par le Covid-19 même s’ils sont en quarantaine ou sous traitement médical. «Le travailleur pourrait être couvert par le même plan que celui du congé pour accident, c’est-à-dire, que les 15 premiers jours, l’employeur paie le salaire complet et le travailleur est ensuite pris en charge par le NPSS ou tout autre système équivalent.»
Pour les employés des services essentiels en première ligne et qui, par la nature de leur travail, sont exposés au Covid-19, il est urgent d’élaborer un règlement sur Covid–19 Occupational Safety and Health Regulation pour une protection obligatoire.
De plus, la CTSP propos qu’aucune dé- rogation à la législation du travail, promulguée en octobre 2019, ne soit imposée aux travailleurs sans discussions avec les syndicats pour trouver un compromis. Pour préserver les emplois, il est conseillé que le Wage Assistance Scheme soit attribué uniquement aux entreprises en grande difficulté financière. Compte tenu de l’urgence et de l’ampleur de la situation, le paiement de divi- dendes devrait être suspendu pour au moins les trois prochaines années. Tous les soutiens financiers de l’État aux entreprises doivent être des investissements centrés sur l’humain, qui préserveront les emplois et favoriseront la création d’emplois durables sur le plan social, environnemental et économique, conformément aux Sustainable Development Goals (SDG). Il faudrait également créer une structure de dialogue social permanent car même si c’est déjà défini dans la Workers’ Rights Act 2019, jusqu’à l’heure, aucune me- sure n’a été prise pour sa mise en place.
Comme la sécurité alimentaire est toujours de mise, les municipalités et autorités locales devraient promouvoir l’agriculture domestique. Les installations et supports logis- tiques pour cultiver sur son toit devraient être exemptés de droits de douane, en particulier pour les familles à revenus faibles ou moyens. La confédération considère que cultiver des produits agricoles est un moyen pour les travailleurs licenciés de gagner leur vie. Par conséquent, des amendements urgents aux législations afin que des terrains privés non-utilisés puissent être utilisés comme espaces communs sont proposés ainsi que le soutien du gouvernement pour la distribution gratuite de semences et autres aides.
Solutions pour les enfants et parents âgés des travailleurs et création d’emplois
D’autre part, comme les parents tra- vaillent et n’ont parfois nulle part où laisser leur enfant, surtout ceux de moins de 4 ans. Des garderies publiques dans les villes et villages pourraient éviter aux parents de payer de grosses sommes d’argent à des crèches privées. Elles seraient aussi plus près des maisons où d’autres membres de la famille pourraient venir chercher les enfants en cas de problème. Cela pourrait créer des emplois à travers une formation adéquate. Un autre projet qui pourrait créer des emplois, notamment d’aide-soignante, cuisinière, jardinier, entre autres, est de créer des centres de soins pour les aînés. Avec la majorité des familles qui travaillent, les aînés sont livrés à eux-mêmes et ont le sentiment d’être un fardeau. Davantage de médecins et de psychologues pourraient aussi être recrutés pour aider ces personnes âgées.
Pertes d’emploi : la NTUC propose un programme de «reskilling»
La National Trade Union Confederation (NTUC) propose pour sa part un programme de reconversion des compétences pour tous les travailleurs ayant perdu leur emploi en raison de la fermeture d’entreprises ou de la décision d’employeurs de mettre fin à leur contrat de travail lors du Covid-19. Parallèlement, il faudrait augmenter la taxe sur les bénéfices des compagnies d’assurance et des banques, et utiliser ce fonds sous la forme d’un bénéfice à tous ceux qui adhèrent à ce programme. Le gouvernement devrait aussi introduire un performance credit point system pour toutes les organisations paraétatiques et les entreprises publiques pour contrôler leur performance et les rendre responsables de leur mauvaise performance.
Pour promouvoir une éducation holistique, il faudrait introduire l’agriculture comme matière dans tous les collèges d’État afin d’inciter les enfants à s’y intéresser et les motiver à poursuivre la culture à grande échelle. Cela aiderait à atteindre l’autosuffisance.
Pour des mesures en faveur du secteur public, la confédération demande des dispositions financières dans le budget pour payer les congés de maladie inutilisés aux fonctionnaires qui en ont été privés dans le budget précédent. Comme la pandémie a changé les exigences, les obligations et les impératifs du secteur public, il faudrait élaborer un nouveau rapport à la place du Pay Research Bureau Report, qui les reflète et accorder une somme de Rs 1 000 à tous les agents publics, en plus de celle accordée dans le budget précédent, soit un total de Rs 2 000 dans le salaire de base d’un employé.
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