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Fin du cycle primaire: une prise en charge urgente pour prévenir l’échec systématique dans les écoles ZEP

1 juin 2021, 21:30

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Fin du cycle primaire: une prise en charge urgente pour prévenir l’échec systématique dans les écoles ZEP

Les chiffres sont éloquents. Sur 1 004 candidats des 28 écoles de la Zone d’éducation prioritaire (ZEP), seuls 411 ont réussi au PSAC en 2021, soit 40,94 %. En 2019, ce taux était de 40,96 %. En revanche, en 2018 et 2017, les chiffres étaient de 44,24 % et 47,83 % respectivement. Or, ce tableau n’est pas le plus alarmiste. En effet, les résultats détaillés par établissement ZEP montrent que certaines écoles restent en dessous des 20 % de réussite, à l’exemple de l’école Briquetterie, qui, de 43,9 % en 2017, est tombée à 10,81 %. Idem pour la Nuckchady Government School, avec 70,37 % en 2017 contre 13,64 % en 2021. Un schéma répliqué par divers établissements ZEP. 

Paradoxalement, l’école Nicolay a progressé à 27,45 % en 2021 après un échec de 100 % en 2019, tout comme l’école Marcel Cabon qui affiche 29,63 % en 2021 contre 13,11 % en 2019. Ascension fulgurante également pour l’école de Résidence Vallijee qui progresse à 73,68 % en 2021 contre 50 % en 2017. 

Comment expliquer l’échec systématique des uns et la progression singulière des autres ? Vinod Seegum, président de la Government Teachers’ Union, remet en question le projet de ZEP qui nécessite une réévaluation après 25 ans d’existence. «Il faut revoir ses forces et faiblesses. Donner un repas chaud ne suffit pas. Environ 500 enseignants sont affectés dans ces écoles. Que les autorités rencontrent ces professeurs et maîtres d’école pour évaluer les problèmes et trouver des solutions. Beaucoup de ces enfants viennent de milieux sociaux difficiles et de familles brisées», déclare ce dernier, qui indique qu’un forum national s’impose sur cette problématique. 

Pour Annand Seewoosungkur, ancien maître d’école de Briquetterie Government School et actuel président de l’association des maîtres d’école, l’échec perpétuel de certains établissements ZEP traduit un manque d’intérêt pour l’apprentissage des enfants et des parents. «Depuis 2018, l’échec était prévisible. Au contraire, l’école dispose de cours de rattrapage mais cela n’a guère marché. Les parents ne sont pas impliqués. Je me souviens de l’un d’eux qui était pêcheur et qui nous a dit que son enfant n’avait pas besoin de progresser comme il finirait par exercer le même métier que lui. Ce refus de l’éducation est une attitude qui se répercute dans de nombreuses écoles.» 

Concédant au fait que diverses actions de soutien sont effectives pour les ZEP depuis des années, Jimmy Harmon, directeur adjoint du Service diocésain de l’éducation catholique, souligne que ces écoles continuent à en pâtir et affichent de faibles performances. «En 2006, l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique met en exergue le fond du problème des ZEP. En somme, il existe un fossé culturel entre les enseignants et les enfants dans ces établissements.» Parallèlement, avance-t-il, en 2011, une enquête du rapport de la Commission Justice et Vérité étaye des «préjugés» à l’égard des écoliers, ce qui entrave leur motivation et progression. 

Pour Om Varma, directeur du Mauritius Institute of Education (MIE), l’échec dans de nombreuses écoles relève de l’incapacité des enfants à être suffisamment motivés, souvent en raison de conditions de pauvreté ou de négligence, tant de la part des parents que des enseignants. Ces derniers développent alors une attitude d’impuissance face aux conditions qui y prévalent. 

Assiduité des parents 

A contrario, la progression de certaines écoles ZEP se mesure au degré d’implication des écoliers, ajoute Annand Seewoosungkur. Ce succès tient à deux facteurs : la maximisation du confinement pour des pratiques de lecture et l’assiduité des parents dans le suivi. «Certains leur consacrent du temps tandis que d’autres les préviennent qu’ils vérifieront leurs devoirs, même s’ils ne s’y connaissent pas en la matière. Ceci crée un effet pygmalion et permet à l’enfant de s’appliquer davantage», confie-t-il. 

Outre les parents, l’administration joue un rôle stratégique. Ameena Beebeejaun, maîtresse d’école postée à l’école Nicolay depuis novembre 2020, a passé au crible les absences des écoliers auprès des parents et fait intervenir des psychologues et travailleurs sociaux. Ce qui fait que l’école est passée de 0 % à 27,45 %. «Les enseignants ont travaillé sans relâche sur WhatsApp durant le confinement. C’était comme une course. Il fallait les chercher et les impliquer dans leurs devoirs. L’administration s’est aussi mobilisée en procurant du matériel scolaire aux enfants qui en étaient dépourvus», explique-t-elle. 

Om Varma estime que la réussite est étroitement liée à d’autres inégalités sociales et que l’éducation n’est pas uniquement le résultat de ce qui se passe à l’école. «Cela a également à voir avec les croyances, valeurs et attitudes des gens ainsi que la prédisposition des gens à profiter de l’éducation en général», souligne-t-il. Selon lui, des indications démontrent que des écoles ayant reçu le soutien de la communauté, un engagement de chaque acteur à jouer son rôle, un changement d’attitude et une croyance en la capacité des enfants à réussir, quelle que soit leur origine, sont des facteurs de réussite. 

Que faire pour contrer l’échec dans les ZEP ? Jimmy Harmon est formel : leur administration doit être assurée par l’éducation catholique, étant donné le fossé culturel évoqué. Om Varma est en faveur d’un plus grand effort de soutien aux enseignants pour faire face à l’enfant dans ces écoles. «Ce soutien vient avant tout de la maison ou de la communauté qui encourage les initiatives des écoles. Je ne parle pas seulement des ressources matérielles mais du changement d’attitude et de soutien moral», avance-t-il. D’après lui, nous devrions tous valoriser ce que fait l’école et développer un engagement à progresser, bien que lentement mais sûrement. «Cependant, nous devons aussi faire confiance et valoriser chaque enfant. Il y a peu d’issues si nous ne commençons pas par le valoriser et croyons fermement que chacun a le potentiel pour réussir», précise-t-il. 

Ameena Beebeejaun mentionne une plus grande participation des parents aux réunions des Parent Teachers’ Association, y compris les moins réceptifs. Pour Jacques Malié, pédagogue, le suivi académique ne s’arrête pas à l’école mais doit s’enchaîner sur le plan social et environnemental. Selon lui, il est aussi plus difficile de trouver des enseignants passionnés pour travailler dans les écoles ZEP. «Beaucoup d’enfants ont décroché sur le plan scolaire, et pas uniquement dans ces établissements- là. Ceux au bas de l’échelle ou manquant d’accompagnement sont les plus touchés à l’inverse des élèves mieux lotis qui sont mieux éduqués. Hélas, d’autres enfants sont limités en moyens», constate-t-il. 

Dans les écoles où les élèves peinent à faire leurs devoirs à la maison, il souligne l’invention du homework at school, une stratégie qui leur permet de s’y appliquer. Au-delà de la publication des chiffres du PSAC, il faut des actions concrètes pour ces écoles en deçà de 20 % et reflétant «un échec complet». «Si on reste tranquille et on ne fait que du damage control, il faudrait une formation adaptée à ces difficultés et un soutien des associations de ces régions», suggère-t-il.