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William Chung: «Aucun gouvernement n’a jamais démontré une réelle volonté d’aider le MTC»
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William Chung: «Aucun gouvernement n’a jamais démontré une réelle volonté d’aider le MTC»
Expert-comptable et membre du Mauritius Turf Club (MTC) depuis 25 ans, William Chung a servi son club pendant une dizaine d’années en tant que commisssaire administratif. Avec l’avènement de la tant redoutée Horse Racing Division de la Gambling Regulatory Authority (GRA), la rédaction a sollicité l’avis de cet ancien président du MTC pour commenter l’actualité brûlante de l’hippisme local.
“He who pays the piper calls the tune”
La future Horse Racing Division (HRD) est bien décriée dans le giron hippique, le MTC se réservant même le droit de contester sa mise sur pied si les amendements à la GRA Act sont votés. Quel est votre avis sur la question ?
Le gouvernement dit vouloir implémenter les recommandations du rapport Parry. Mais celui-ci préconisait la création d’un “new independent statutory body to oversee the regulation and governance of horseracing in Mauritius”. Or, les amendements proposés dans la Finance Bill 2021 prévoient la création d’une Horse Racing Division (HRD), qui sera gérée par un Horse Racing Committee “appointed by the Minister of Finance”. Il serait bon de rappeler que le board de la GRA est composé à moitié de fonctionnaires. Les cinq membres restants étant le président, son assistant et trois autres membres, “who shall be appointed by the Ministry of Finance”. Difficile donc pour une personne avisée de ne pas s’interroger sur l’indépendance de cette division. He who pays the piper calls the tune. Ne l’oublions pas.
En quoi la HRD diffère-t-elle de l’autorité recommandée par le rapport, et qui s’inspirait du modèle de la British Horseracing Authority (BHA) ?
La BHA, qui existe depuis 2007, est une entité complètement indépendante de la UK Gambling Commission, l’équivalent de la GRA au Royaume-Uni. Ce sont principalement des propriétaires de chevaux, des gérants d’hippodromes, des éleveurs et d’autres stakeholders de l’industrie tels que des entraîneurs, des jockeys, des vétériniaires, etc. qui la composent. Et la BHA engage des chasseurs de tête (head hunting) pour s’assurer de recruter la personne idéale. Il y a aussi des directeurs indépendants. Or, la HRD n’est autre qu’une institution contrôlée par l’Etat qui vient remplacer le MTC. Il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir…
“Cela fait bien 5-6 ans que la GRA usurpe graduellement les prérogatives du MTC”
Le MTC et la GRA sont pratiquement à couteaux tirés ces derniers temps. Comment expliquez-vous qu’on en soit arriveér là ?
Cela fait bien 5-6 ans que la GRA usurpe graduellement les prérogatives du MTC. Comme on le dit si bien dans notre langue maternelle, zot p soufle morde. Malheureusement, les administrateurs du MTC ont tout le temps obtempéré face à cette situation. Et c’est bien connu, l’appétit vient en mangeant. “Give someone an inch and he’ll take a mile.” C’est exactement ce qui s’est passé. Il aurait fallu mettre un frein à tout cela dès le départ.
Il se dit que les déclarations choc de Jean-Michel Giraud dès son retour sur le board du MTC n’aurait pas plu du côté de la Newton Tower…
A mon avis, le problème ne vient pas de Jean-Michel Giraud. L’ingérance de la GRA date depuis bien avant. D’ailleurs, ce n’est que cette année qu’il a été élu président du MTC. Pendant les cinq années précédentes, la GRA s’accaparait graduellement les pouvoirs du MTC à travers les nouvelles directives qu’elle émettait en début de saison. Donc, tout ramener à la nomination de Jean-Michel Giraud serait un faux prétexte. Je crois qu’il faut plus voir la situation actuelle comme la volonté du gouvernement de cimenter son contrôle sur l’industrie hippique. A l’époque où j’étais président, la GRA s’occupait uniquement de l’aspect du betting.
L’affichage des pancartes de protestation au sein du MTC samedi dernier ne découlerait apparemment pas d’une action unanime. Qu’en pense le membre à vie du MTC que vous êtes ?
Je ne sais pas qui est à l’origine de la protestation et des pancartes affichées samedi dernier. Mais je me permets de faire un parallèle avec d’autres personnes qui manifestent, comme les chauffeurs de taxi à l’aéroport de Plaisance parce qu’il ne peuvent pas opérer actuellement. S’ils pensent que leur existence est ménacée, tout comme le MTC, j’estime qu’ils ont le droit d’afficher leur désaccord.
Avec la démission de Nicolas Carosin du board du MTC et celui de la MTCSL, il faudra probablement lui trouver un remplaçant. Un retour au sein de l’équipe dirigeante vous intéresserait-il ?
J’ai été effectivement sondé par le MTC. Malheureusement, mes obligations professionnelles et personnelles ne s’y prêtent pas.
Le manque de revenus se fait grandement ressentir dans l’industrie, encore plus avec les effets de la Covid-19. Que faire pour remonter la pente ?
Le plus grand gagnant reste l’Etat à chaque journée de courses organisée. Sans faire le moindre effort, il récolte environ Rs 600-800 millions en termes de betting tax. Si j’étais à la place du governement, je ferais tout ce qui m’est possible pour aider le MTC à générer plus de revenus pour que je puisse en sortir gagnant également. Je n’essaierais pas de tuer la poule aux oeufs d’or. A ce titre, le modèle de Hong Kong est très parlant…
Existe-t-il une meilleure synergie entre l’Etat et l’organisateur des courses là-bas ?
Tout à fait. Au début des années 2000, les paris sur le foot foisonnaient mais les mises étaient placées auprès de sociétés offshore. Rien ne rentrait dans les caisses de l’Etat. Afin de combattre cela, le gouvernement a accordé au Hong Kong Jockey Club (HKJC) une licence pour organiser des paris sur le foot aussi. Cette décision a permis d’améliorer les revenus du HKJC de façon considérable et de diminuer l’impact des paris illégaux. Ce sont les hommes qui font les institutions. Malheureusement, aucun gouvernement n’a jamais démontré une réelle volonté d’aider le MTC.
Estimez-vous que le combat contre les paris clandestins ne demeure pas une priorité pour le gouvernement ?
Il est un fait que les gros parieurs n’utilisent pas le circuit officiel. Zot pa pou amenn autant larzan kot bookmaker pou zwe. Selon mes estimations, cela représente un manque à gagner de près de Rs 45 millions pour l’organisateur des courses (MTCSL) et trois fois plus pour le gouvernement, sur chaque milliard de chiffre d’affaires réalisé par les bookmakers clandestins. Mais la GRA ne fait rien. Je ne comprends pas. Je reste perplexe…
Le MTC et sa subsidiaire la MTCSL envisagent d’arrêter l’activité hippique dans un contexte financier déjà difficile si le gouvernement refuse d’entendre leurs arguments. Comprenez-vous cette posture ?
Sans les bookmakers on-course pendant les douze premières journées, les pertes dépassent déjà le million de roupies par rendez-vous. Et avec la décision des deux Totes de réajuster leur redevance à 5%, il est clair que nous serons encore plus dans la mouise. En tant que directeur d’une compagnie comme la MTCSL, vous ne pouvez pas vous permettre d’opérer consciemment à perte, comme le stipule la section 143 de la Companies Act. C’est très dangereux. Les directeurs peuvent être sanctionnés en conséquence. Toutes les personnes qui aiment les courses sont bien évidemment inquiètes. Mais à quoi cela servirait-il de maintenir la saison dans un tel climat instable si cela mettait en danger l’avenir de club ?
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