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Réveille-Climat

14 août 2021, 07:57

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Réveille-Climat

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’autorité mondiale en termes de recherche et de publication sur le changement climatique depuis 2013, a pondu, en début de semaine, un troublant rapport qui vient reconfirmer les dangers grandissants auxquels fait face l’humanité. «C’est un véritable code rouge pour la race humaine», martèle l’ONU depuis lundi. Depuis, l’expression fait la Une de plusieurs journaux, dont celle de l’express du mardi 10 août. 

Le document de 42 pages, un «Résumé à l’intention des décideurs», se veut le premier d’une série de rapports qui seront publiés prochainement dans le sillage du sommet-clé sur le climat à Glasgow – soit le COP26 qui se tiendra du 1er novembre au 12 novembre 2021. L’objectif est d’actualiser la science du changement climatique et de re-capter l’attention des dirigeants qui a été détournée, depuis bientôt deux ans, par le coronavirus et son impact socioéconomique. 

Même si on fonce vers le rouge, les dernières données scientifiques indiquent qu’on peut toujours éviter – de justesse – une catastrophe climatique, à condition que les chefs de gouvernement ne perdent pas une seconde de plus à débattre du sujet. Car le temps de l’action était... hier. Et le coronavirus, au lieu de freiner l’élan vers un développement durable, devrait, au contraire, nous y précipiter.

En quoi sommes-nous concernés, ici à Maurice ? 

Nous sommes au front de la bataille contre la menace climatique. Alors que les Petits États insulaires en développement (PEID) représentent moins de 1 % des émissions de gaz à effets de serre au niveau mondial, c’est connu et prouvé qu’ils demeurent les plus vulnérables au changement climatique, avec le risque d’être carrément engloutis par la mer, comme le seront nos voisins, les Maldives. Quant à nous, la possibilité de perdre des kilomètres de plage et les hôtels du littoral n’est plus une hypothèse mais une thèse avec laquelle on devrait conjuguer dans moins longtemps qu’on l’imaginait jusqu’ici.

Les principales conclusions du GIEC sont : 1) La température à la surface du globe a augmenté de 1,09 °C au cours de la décennie 2011- 2020 par rapport à la décennie 1850- 1900 ; 2) Les cinq dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées depuis 1850 ; 3) Le taux récent d’élévation du niveau de la mer a presque triplé par rapport à la période 1901- 1971 ; 4) L’influence humaine est «très probablement» (90 %) le principal facteur du recul mondial des glaciers depuis les années 1990 et de la diminution de la banquise arctique...

À Maurice, qui a désormais son ministère consacré au changement climatique, nous avons réalisé notre extrême vulnérabilité face à la montée des eaux et autres aléas naturels comme les cyclones et les inondations. Aujourd’hui, s’il y a bien un domaine qui devrait mobiliser gouvernement, opposition, citoyens, ONG, ambassades étrangères, c’est bien celui du changement climatique. Car il y a de ces postulats qu’on ne peut plus ignorer, ou renvoyer aux calendes grecques, et ce, même si le Covid-19 nous a poussés au bord du gouffre financier. C’est pour cela qu’il nous faut rappeler l’urgence, la spécificité et la dynamique des populations îliennes, en particulier celles de l’océan Indien, où des pays sont ni plus ni moins en train de couler, de disparaître. 

Il y a plusieurs façons de discuter du changement climatique. On a archi-vu la difficulté de concilier toutes les perspectives lors des précédents sommets sur le climat. C’est surtout au niveau de la responsabilité, de la prévention et des dépenses y relatives que le problème politique se corse. Maumoon Abdul Gayoom, ancien président des Maldives, sans s’encombrer des convenances diplomatiques, avait courageusement contextualisé le dilemme des PEID : «Au sein d’une communauté internationale se basant sur l’État de droit, ainsi que sur les valeurs universelles d’égalité, des droits de l’homme et de dignité, il est certainement injuste pour de petites communautés vulnérables de souffrir des actions d’autres pays riches en ressources et plus puissants, actions sur lesquelles ils n’ont aucun contrôle et peu ou pas de protection.»

Les économies fragilisées par le Covid-19 nous rendent aujourd’hui encore plus vulnérables, car toutes les réserves de l’État vont vers les problèmes immédiats, actuels. Le petit virus a dépassé le risque des catastrophes naturelles, dont les impacts économiques et financiers vont pourtant peser de plus en plus lourd dans le budget national. Il y a donc un réel besoin de prévoir – au niveau de la Banque centrale, du secteur privé et de la MIC – des futures pertes qui sont pour l’heure non couvertes par les mécanismes financiers existants. Le maître mot devrait être l’anticipation. Car chaque roupie investie dans des mesures de prévention adéquates nous permettra d’économiser environ quatre fois plus en aide d’urgence post-catastrophe climatique. Le GIEC rappelle à nos dirigeants que l’augmentation des risques liés aux catastrophes n’est pas seulement due à des événements extrêmes plus intenses et plus fréquents, mais également à une exposition plus grande des personnes et des biens en raison d’un développement économique basé sur un modèle postindustriel et pré-climatique...