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Attentats du 11 septembre: 20 ans après, ces Mauriciens s'en souviennent encore

12 septembre 2021, 18:00

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Attentats du 11 septembre: 20 ans après, ces Mauriciens s'en souviennent encore

Le 11 septembre 2001, l’attaque la plus meurtrière de l’histoire des États-Unis, orchestrée par Al-Qaïda, frappait les deux tours du World Trade Center et le Pentagone. 2 977 personnes trouvaient la mort en moins de deux heures, de 8 h 14 à 10 h 30, dans le centre de Manhattan à New York, à Arlington, et à Shanksville, en Pennsylvanie, Cette date, qui restera à jamais gravée dans les mémoires, ne cesse de raviver des souvenirs partout et notamment de Mauriciens vivant au Canada voisin.

Sheila Veerasamy, professionnelle de la finance au Canada

«Je me souviens encore de ce fameux samedi, qui est toujours vif dans mon esprit. J’étais scotchée à ma chaise et je regardais les vidéos des attentats, qui passaient en boucle à la télé. J’étais là, bouche bée. C’était inconcevable. La ville de mes rêves, New-York, était à genoux. Les gens étaient impuissants face à cette catastrophe. En voyant les tours s’effondrer l’une après l’autre comme un château de sable, je me disais que cela ne pouvait pas être la réalité mais un film hollywoodien. Malheureusement, je me trompais. L’Amérique avait baissé la garde et on l’attaquait sur son propre territoire. On avait même osé attaquer le Pentagone. C’était de la pure provocation! Je me posais des questions sur la sécurité intérieure du pays de mes rêves (mon «rêve américain» datait de mon adolescence).

On jouait des bandes sonores des dernières conversations des passagers et des employés de bureau à leurs proches. J’avais froid dans le dos et j’étais profondément triste. Comment peut-on avoir tant de haine au point de détruire la vie des autres ? Je ruminais cette question dans mon cœur. En 2018, j’étais à New-York pour des vacances et j’ai pu voir le Ground zéro. C’était la partie la plus triste de mes vacances. Je lisais les noms des victimes, des collègues qui avaient péri ensemble ; je les imaginais en train d’assister à une réunion.

Après 20 ans, le même sentiment m’anime. Je suis écœurée et triste ; des vies ont été détruites. Les gens, les familles vivent toujours avec des séquelles; la guérison émotionnelle est graduelle.

Annie Wood, 60 ans, superviseuse des opérations de Sunwing Airlines à Québec

J’étais employée d’Air Alliance comme coordonnatrice aux ventes. Je me souviens avoir contacté la réceptionniste pour savoir si j’avais des messages et à ce moment-là, elle m’a informée qu’un avion était entré dans une des tours du World Trade Center mais sans plus de détails. J’ai aussitôt appelé ma mère, puisqu’elle regardait toujours les nouvelles des chaînes anglaises. Elle était déjà au courant et s’apprêtait à m’appeler quand elle me dit – Ben non !!! un autre avion vient de rentrer dans la deuxième tour. J’ai raccroché et je suis sortie immédiatement de mon bureau pour informer tout le monde. Nous avons tous quitté nos postes et voulions savoir ce qui se passait. Nous étions tous inquiets; de plus, il y avait un équipage à Newark et un à Boston. Les informations arrivaient au compte-gouttes. C’était irréel. Les équipages revenaient un à un au bureau, déboussolés. C’était triste de les voir et en même temps il y avait une très grande solidarité. Les jours qui ont suivi n’étaient pas rassurants. Il y avait des agents de sécurité et nous devions nous identifier en arrivant au travail. L’aviation venait de changer à tout jamais et j’ai été longtemps à ne pas vouloir prendre l’avion. Même après 20 ans, je me rappelle encore ces événements que je n’oublierai jamais. »

Iqbal Toorabally, 59 ans, opérateur de bagages à l’aéroport Pierre Elliot Trudeau à Montréal

«J’étais choqué et, loin de mon pays, je frissonnais. En 2016, en visite aux États-Unis, j’ai visité le monument du World Trade Center, où sont écrits tous les noms des victimes. Je me souviens du ciel parfaitement bleu parce que c’était exactement le même ciel que chez nous. Je me souviens des tours jumelles qui s’enflamment. La sécurité est maintenant une préoccupation majeure et prioritaire pour les gouvernements. Dans plusieurs pays, on peut penser à l’adaptation de lois plus restrictives et aux mesures de sécurité accrues dans les aéroports et aux frontières américaines. Elles sont plus sévères aujourd’hui. Les voyageurs passent sous un portique de détection de métaux et peuvent être fouillés. Ceux allant aux États-Unis sont aussi interrogés par des agents de sécurité. Ils peuvent également faire l’objet d’un contrôle plus approfondi. Depuis, même les employés sont fouillés tout comme les voyageurs. Il y a aussi les équipes ADM dont la mission est de protéger les passagers, le personnel et les installations contre tout acte ou menace potentielle pour l’aviation civile. Oui, ça va faire 20 ans, mais c’est resté toujours gravé dans les mémoires, vu que nous vivons tous sous le même ciel.»

Priscilla Chowriamah, 41 ans, superviseuse et formatrice «expérience client» à l’aéroport de Québec depuis 5 ans

«En tant que superviseure et formatrice au terminal YQB de l’aéroport de Québec depuis 2017, je peux vous dire à quel point cet attentat a eu un impact sur les activités aéroportuaires dans le monde et beaucoup de choses ont changé par rapport aux mesures de sécurité. Mes collègues qui l’ont vécu ont toujours des flash-back et des séquelles de ce triste évènement. Les compagnies qui opèrent des vols vers les États-Unis doivent respecter des critères et établir des mises en place dans la préparation des vols. À Montréal, nous avons une douane américaine mais à Québec, c’est toute une organisation au sol de l’enregistrement à l’embarquement. Les passagers n’ont pas accès aux comptoirs d’enregistrement sans avoir passé un entretien avec des agents de sécurité spécialisés pour les vols US et engagés par les compagnies aériennes. Une fois les réponses fournies et la motivation satisfaite, l’agent de sécurité dirige le passager vers le comptoir d’enregistrement. Et ce n’est pas fini, dans le système du vol, des notes sont ajoutées aux dossiers de certains passagers et l’agent «expérience client» doit estampiller la carte d’embarquement qui indiquera aux agents de sécurité s’il faut procéder à une fouille générale des passagers sélectionnés.

Les passagers qui ne fournissent pas une adresse à leur destination ou ne répondent pas correctement se voient parfois refuser l’embarquement sur les vols. Les compagnies aériennes doivent également avoir un agent de sécurité spécialisé sur les vols US dans la passerelle menant à la porte de l’avion pour contrôler les va-et-vient du personnel, des fournisseurs de catering à bord, et des mécaniciens. L’impact de cet attentat a apporté un lot de travail additionnel sur mes opérations, si je compare les vols vers l’Europe ou le Sud (Mexique).Travailler dans l’aviation demande beaucoup de concentration et d’anticipation car on ne sait jamais ce qui peut se passer surtout à mon niveau, quand je gère les opérations de plusieurs vols en même temps, différentes équipes sur le terrain, l’équipage et les passagers. Depuis cet attentat, c’est une autre paire de manches.»

Stéphanie Nobert, 50 ans, chef d’équipe «expérience client» à l’aéroport international Jean Lesage à Québec depuis 1995

«Je n’étais pas en service ce jour-là mais j’ai suivi l’évènement en direct sur TVA Nouvelle. Ma première réaction, c’était la peur que le monde de l’aviation s’écroule et que cet attentat provoque une guerre. Différents sentiments ont pris le dessus: la peur, l’angoisse et l’insécurité sur mon lieu de travail. Juste après les attentats, les activités aéroportuaires se sont arrêtées et il n’y avait aucun avion dans le ciel canadien. Depuis cet attentat, les choses ont changé : beaucoup plus de sécurité et de vérifications pour les vols vers les États-Unis. Les premières mesures à la reprise des vols n’étaient pas juste pour les passagers mais aussi pour les agents «expérience client» et ceux des rampes. Pour revenir aux premiers vols vers les États-Unis à partir de Québec, les passagers n’avaient pas droit au bagage à main ; seuls leurs documents de voyage étaient autorisés. En repensant à cet attentat, les sentiments sont toujours les mêmes: la peur, l’angoisse et l’insécurité au quotidien. Ce triste moment restera gravé à jamais par son impact sur l’aviation et la vie aéroportuaire.»