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Merci, l’île Maurice, nous disent les pays riches !

22 septembre 2021, 08:43

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Merci, l’île Maurice, nous disent les pays riches !

Lettre à la société mauricienne de la part des pays riches. 

Merci de nous produire chaque année et de nous envoyer vos meilleurs jeunes cerveaux afin qu’ils viennent étudier chez nous, que vous nous payez pour les cours qu’ils suivront, afin de devenir dans quatre ou cinq ans nos cadres, nos futurs experts, ceux qui vont nous aider à accroître la richesse de notre pays. 

Il semblerait que vous, l’île Maurice, tout comme d’autres ex-colonies britanniques, vous n’ayez rien compris. Vous êtes en train de faire notre avenir en nous donnant vos meilleurs talents, vos meilleures intelligences, afin que nous puissions progresser mieux que vous, et ce sont les contribuables mauriciens qui payent pour cette générosité irréfléchie, non sollicitée. 

Vos lauréats ne reviendront pas chez vous, tout comme ces centaines de jeunes sur qui, pendant 13 à 15 ans, vous avez investi, qui viennent étudier chez nous, avec vos millions de roupies. Vous nous les livrez maintenant pour qu’ils travaillent pour nous, pour qu’ils produisent notre richesse. Nous n’avons jamais vu de situation aussi ironique que celle-ci… Nous n’avons jamais vu un pays se sacrifier autant pour promouvoir un système qui le punit, un pays qui n’a pas l’intelligence de réfléchir à quoi ça sert toutes ces pétarades, tout ce show qui gagne en importance, en fanfare, en confettis chaque année. Et, de plus en plus, on voit des dirigeants politiques qui veulent s’approprier du show, qui viennent annoncer, comme une gloire, comme la victoire d’un système dont ils feignent ignorer les lacunes. 

Pourtant, vous avez des intelligences chez vous, mais comment expliquer qu’un système qui va à l’encontre d’un pays puisse perdurer ? L’île Maurice est un pays où pour chaque lauréat produit par le système éducatif, il y a 100 ou même plus de jeunes qui se retrouveront dans la rue ou qui vont devoir tracer leur vie comme «enflé kamion», «manevmason » s’ils ne deviennent pas drogués ou brigands. 

Nous dirons sans cynisme qu’aussi longtemps qu’il existe des pays comme Maurice, dont l’effectif de la population active est en baisse, qui manquent cruellement de cadres pour leur propre développement, mais qui, paradoxalement, nous fournissent de quoi enrichir notre capital humain, le clivage entre pays riches et pauvres va s’agrandir. La pauvreté des pays n’est autre que la pauvreté de l’intelligence de ses dirigeants qui n’arrivent pas à repenser le système. 

Pour les parents, ils ne peuvent rien, ils ont élevé leurs enfants, leur ont donné tout ce qu’il fallait, mais ils savent très bien que ces enfants partiront vivre leur vie ailleurs. Ils ne trouveront rien à redire, au contraire, c’était le but de leur investissement. Mais pour un pays qui fait de l’exode de ses jeunes cerveaux une politique nationale et surtout une gloire nationale, la victoire du parti politique au pouvoir, il y a de quoi se demander s’il y a quelqu’un vraiment qui réfléchit à tout ça dans le pays ! 

Les lauréats ne reviennent pas. À cela, on nous brandira une exception ou deux. Mais voyons la règle plutôt que l’exception. Tout comme on risque de nous brandir que plusieurs de ces lauréats bénéficient des bourses des pays riches, et que l’État mauricien ne débourse rien… Encore, une illustration de la pauvreté de l’intelligence !