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Rodriguais bloqués à Maurice: un dossier en préparation pour une action en Cour suprême
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Rodriguais bloqués à Maurice: un dossier en préparation pour une action en Cour suprême
Plus de six mois que des Rodriguais attendent de rentrer dans leur île. Leur patience s’amenuisant, ils comptent saisir la justice, avec le concours du leader de l’opposition, qui compte rappeler le sujet au Parlement le mois prochain.
C’est un drame qui prend une tournure légale. Des Rodriguais et des résidents de Rodrigues se tournent vers la Cour suprême afin de pouvoir rentrer chez eux. Cette stratégie est privilégiée après leur rencontre avec le leader de l’opposition à son bureau hier. Xavier-Luc Duval avait lancé un appel en début de semaine pour rencontrer ceux qui sont bloqués à Maurice. Il y a eu une première réunion mardi, ensuite une vingtaine de personnes étaient au bureau du leader du PMSD hier. Il nous revient que les Rodriguais se sont entretenus avec l’avoué Pazhany Rangasamy et les avocats Alexandre Leblanc et Rouben Mooroongapillay. Ils estiment que leurs droits constitutionnels ont été bafoués alors que d’autres maintiennent qu’ils sont victimes de discrimination. Ils étaient une vingtaine lors de la réunion, mais une centaine est prête à saisir la justice, dit-on.
Parmi les Rodriguais bloqués à Maurice, il y a deux jeunes filles de 17 ans qui ne vont plus à l’école. Puis, une mère et sa fille trisomique. Il nous revient qu’une personne bloquée à Maurice dort dans la rue dans les environs de la Cathédrale Saint-Louis. Il n’y a pas que des Rodriguais parmi ceux coincés, mais aussi des Mauriciens qui ont leur demeure à Rodrigues et des Français ayant les droits de résider dans la République de Maurice. À l’instar de Fabian Bley, qui n’est pas d’origine rodriguaise. Il a tout vendu à Maurice pour aller vivre à Rodrigues. «Nos vêtements, la voiture et tout ce que nous avions à Maurice sont partis à Rodrigues par containers quelques jours avant la date prévue pour notre départ en mars. Nous n’avons plus rien à Maurice. L’idée était d’aller ouvrir un commerce à Rodrigues», raconte-t-il.
La famille de Fabian Bley a fait des démarches pour rentrer, mais le gouvernement régional lui a fait savoir que les Rodriguais auront priorité. Il a attendu jusqu’à perdre patience. «Lors des premiers enregistrements de personnes bloquées à Maurice, il y avait 443 passagers. Ma famille était sur cette liste. Maintenant, je viens d’apprendre que le gouvernement régional a rapatrié 750 personnes. Parmi elles, il y avait des Rodriguais qui sont venus à Maurice par les vols retour et ils ont eu le temps d’aller en quarantaine pour rentrer de nouveau à Rodrigues. C’est une injustice flagrante. Je paie la taxe imposée par la République et je respecte les lois de la République. Pour quelle raison sommes-nous sanctionnés ?» se demande-t-il. C’est le gouvernement mauricien qui paie les frais de quarantaine, mais la liste des passagers est finalisée par le gouvernement de Rodrigues. Il faut rappeler qu’une Rodriguaise a déjà porté plainte auprès de l’Equal Opportunity Commission contre le gouvernement régional de Rodrigues estimant qu’elle a été victime de discrimination.
Par ailleurs, cette affaire sera reprise au Parlement le mois prochain. «Je croyais que l’histoire des Rodriguais bloqués à Maurice était derrière nous, mais ils sont depuis six mois à Maurice loin de leur famille et de leur travail. Il y a des petits entrepreneurs qui ont fait faillite. L’avenir de deux filles est tombé à l’eau après qu’elles ont raté les classes. Il faut blâmer Serge Clair. C’est un manque d’humanisme de sa part. En tout cas, j’évoquerai cette affaire au Parlement. En attendant, nous soutiendrons ceux qui seront en Cour suprême afin de regagner leur toit», déclare Xavier-Luc Duval. Le leader de l’opposition affirme qu’il est probable que les vols commerciaux ne reprennent pas le 1er novembre.
Des drames humains qui pèsent de plus en plus lourd
Djero P et Fabien Bley luttent pour pouvoir rentrer chez eux et également s’assurer que le reste des Rodriguais encore bloqués à Maurice puissent rejoindre leur terre natale. Au début, ils étaient plus de 443 et, depuis, certains d’entre eux ont pu rentrer au pays grâce à la lutte menée, dans un premier temps, par l’ancien parlementaire Christian Leopold et, par la suite, par la battante Joyce Jhabeemissur. Ils ont même monté le groupe Soldat 21. Même si ce groupe a pu, grâce à ses efforts, assurer le rapatriement de plus de 200 Rodriguais, certains sont encore coincés à Maurice, la faute, en partie, aux démarches administratives, qui tardent.
«Je devais rentrer au pays mais il y avait une octogénaire qui attendait son tour, elle aussi. Elle voulait revoir sa terre natale, sa famille et retrouver ses racines et craignait de fermer les yeux à Maurice, sans jamais pouvoir réaliser son souhait. Comment rester insensible à ses paroles, qui vous touchent au plus profond de vous-même ? J’ai donc décidé de céder ma place à cette dame. Comme elle, il y en a tellement à Maurice qui ne savent plus quoi faire», raconte Djero.
Il poursuit en disant qu’il est peiné par l’histoire de trois Rodriguaises mineures, qui se retrouvent, depuis plusieurs mois, loin de leurs parents. «Une des filles vit avec sa tante à Plaisance et les deux autres sont à Grand-Baie. Elles ont été privées d’école depuis mars dernier et n’ont pu voir leurs parents depuis. Ces derniers envoient de l’argent pour qu’elles puissent subvenir à leurs besoins. Mais une des filles est allergique aux conserves. Je vous laisse imaginer les dépenses.»
Manu S. est un petit entrepreneur, qui est désormais sur la paille. À cause de son éloignement géographique qui a duré, il lui a été très difficile de coordonner sa petite affaire. Son business à Rodrigues est resté à l’abandon car il n’a personne sur place pour s’en occuper. Malgré cela, Manu S. ne souhaite qu’une chose, regagner son île et retrouver sa famille. Tout le reste est secondaire. «Je commence à trouver le temps très long et c’est dommage…»
Djero est persuadé qu’il fait les frais de sa prise de position en tant que défenseur de la cause des Rodriguais bloqués à Maurice. Mais il dit qu’il n’y peut rien. Il voit son téléphone sonner régulièrement et la liste des Rodriguais bloqués à Maurice s’allonger à chaque coup de fil. Touché par le sort de ses compatriotes, il a mis la main à la poche et a loué un appartement pour cinq familles. Mais il doit en parallèle trouver de quoi survivre. «Si je me mets trop en avant, je crains que cela ne joue contre moi plus tard car nous savons comment ça fonctionne. Sur un groupe de 70 personnes qui devaient prendre l’avion pour regagner Rodrigues, deux de ceux qui étaient les plus vocaux par rapport au sort de leurs compatriotes ont été fouillés. C’est étrange, ne trouvez-vous pas ?»
Il ne comprend pas comment se fait le choix des Rodriguais qui doivent être rapatriés. «Nou avoy lalis bann dimounn ki bizin rapatriyé Rodrig. Kouma lalis-la ariv lasanblé rézional, li sanzé. Éna enn bann non ki rétiré, lézot razouté, anfin enn lot bizarté. Kouma ou pa lé ki dimounn pansé ki éna préférans ladan, ki zot get figir?» dit-il, en précisant qu’il y a d’autres personnes, qui ont pu, entre-temps, faire le va-et-vient entre Maurice et Rodrigues, comme par magie. «Akoz sa bann sistem-la mem ki nou’nn mont enn group apel Kal Latet. Nou’nn paré pou manz ar li», explique Djero.
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