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Affaire Michaela Harte - Le DCP Jangi: «Le décès de Raj Theekoy aura un impact négatif sur l’enquête»
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Affaire Michaela Harte - Le DCP Jangi: «Le décès de Raj Theekoy aura un impact négatif sur l’enquête»
Le meurtre de Michaela Harte revient sur le tapis avec la mort du témoin vedette. En 2020, l’enquête a été confiée à une cellule spéciale du Central Criminal Investigation Department menée par le DCP Heman Jangi.
Le corps de Raj Theekoy a été retrouvé dans un terrain en friche à Goodlands le dimanche 3 octobre. Son épouse avait signalé sa disparition à la police la veille. Le décès du quadragénaire remet les projecteurs sur une affaire toujours non élucidée datant de plus d’une décennie, le meurtre de Michaela Harte. L’enseignante irlandaise était en lune de miel à Maurice avec son époux, John McAreavey, lorsqu’elle a été tuée le 10 janvier 2011 à l’hôtel Legends.
Cinq jours après le décès de Raj Theekoy, les circonstances dans lesquelles il s’est suicidé restent floues, du moins pour les habitants de la localité. Il avait été retrouvé en position assise dans un terrain en friche, avec une corde nouée au cou. L’autre partie de la corde, qui s’était cassée, était toujours rattachée à une branche. «Non, nou pa konn li bien. Li pa enn dimounn ki ena zistwar», explique un des habitants.
Il n’en dira pas plus, même lorsque le sujet brûlant de son statut de Star Witness dans l’affaire Michaela Harte est abordé. Pourquoi s’est-il reconverti d’employé d’hôtel à maçon ? «Okenn bann ki ti arété-la pann rétravay dan lotel apré. Mem zot inosan, sa bann zafer-la resté sa», se contente-t-on de répondre. Quant à son épouse, Manisha Theekoy, elle n’a pas souhaité faire de commentaires pour l’instant car elle est en deuil.
Des preuves scientifiques
La question que tout le monde se pose est, que se passera-t-il désormais dans cette affaire ? Raj Theekoy était le seul témoin oculaire dans le procès. Il travaillait comme valet de chambre à l’hôtel qui a été le théâtre de ce drame. «Son décès aura certes un impact négatif sur l’enquête. Il était un valid element», explique le DCP Heman Jangi. Selon lui, la déposition de celui à qui avait été octroyé le statut de Star Witness lors de l’enquête avait toute son importance dans le travail de la police.
Cependant, si le travail s’annonce désormais plus compliqué, le DCP affirme que cela ne veut pas dire que l’affaire sera classée après ce décès. «Il y a d’autres éléments forts dans le dossier et le travail de ce côté continue.» De plus, il n’est pas dit que le témoignage de Raj Theekoy devant la cour pendant l’enquête préliminaire sur le meurtre de Michaela Harte ne sera pas pris en considération. «Ce sera au magistrat de voir si ce sera admissible ou pas.»
Me Dick Ng Sui Wa, avocat de John McAreavey, donne plus de précisions. Selon l’avocat, en sus des témoignages, il y a des preuves scientifiques dans ce dossier. «Ces preuves sont incontestables et factuelles. L’enquête devra se poursuivre.» John McAreavey, lui, a réagi dans les médias irlandais et a dit que la mort de Raj Theekoy est une tragédie pour sa famille et que rien ne devrait déranger leur deuil.
Dans la foulée, l’Irlandais a encore une fois égratigné l’État car l’enquête ne bouge pas plus de dix ans après le drame qu’il a vécu. «When it comes to getting to the truth about Michaela’s murder, nothing has been straightforward in Mauritius and neither the Hartes or myself will be deterred from pursuing justice and truth. Not today, not tomorrow and not ever. We will be asking the authorities to assure us that no end will be spared in securing justice for Michaela.»
Statut de Star Witness
Arrêté et interrogé dans la soirée du 11 janvier 2011, Raj Theekoy avait été présenté en cour le lendemain en compagnie des deux autres suspects, Avinash Treebhowon et Sandip Moneea. Les trois étaient valets de chambre. Avinash Treebhowon était passé aux aveux, mais, par la suite, avait affirmé qu’il avait été victime de brutalité policière et son statement avait été pris en l’absence de son avocat.
Sandip Moneea, lui, avait maintenu son innocence et Raj Theekoy, poursuivi pour conspiration. Le lendemain de son arrestation, il avait donné sa version des faits à la police et avait incriminé ses deux collègues. Le 18 janvier, c’est le vigile Dassen Narayanen qui avait été arrêté. Par la suite, Raj Theekoy a retrouvé la liberté conditionnelle le 28 avril et avait obtenu l’immunité et le statut de témoin vedette par le Directeur des poursuites publiques (DPP).
Lors de son témoignage en cour le 11 juillet 2011 pendant l’enquête préliminaire, Raj Theekoy a encore une fois relaté sa version des événements donnée à la police. Il avait expliqué qu’il avait vu le chariot de son collègue Avinash Treebhowon devant la chambre 1025, où logeaient la victime et son époux, John McAreavey. Il s’en était approché car il avait entendu la voix d’une femme qui se disputait avec quelqu’un et a attendu à proximité de la chambre, mais n’a vu personne sortir. Toujours selon ses dires, peu après, il a vu ses deux collègues dans un couloir à proximité de la chambre. «Ils avaient l’air paniqués. Particulièrement Avinash qui avait le visage en sueur», avait dit la Star Witness à la cour.
Raj Theekoy a alors interrogé les deux, mais ils ont répondu qu’il ne s’était rien passé. Quelques minutes après, il a appris du directeur de l’hôtel qu’il y avait un problème dans la chambre 1025, et de la porte, il avait aperçu le corps d’une femme sur le sol. Raj Theekoy cherche encore une fois des explications, et cette fois-ci, il affirme avoir été menacé. Après son témoignage en cour, Me Sanjeev Teeluckdharry, l’avocat qui défendait Avinash Treebhowon, avait révélé que Raj Theekoy avait été licencié d’un hôtel en août 2010 car il était soupçonné d’avoir volé une bouteille de vin.
Une enquête qui traîne
Le 12 juillet 2012, après huit semaines de procès, le jury avait acquitté Avinash Treebhowon et Sandip Moneea à l’unanimité. Les charges contre Dassen Narayanen avaient été rayées en 2013. En 2014, après une nouvelle enquête, le DPP avait demandé que l’enquête soit rouverte à la lumière de «fresh and compelling evidence». Depuis, il ne s’est pas passé grand-chose.
En 2015, la famille de la victime, qui poursuivait l’hôtel pour dommages subis, a trouvé un accord avec l’établissement en cour. En 2016, le commissaire de police d’alors, Mario Nobin, avait eu une rencontre avec Me Dick Ng Sui Wa, qui représente la famille McAreavey, et Tony McCullagh, le Deputy Head of Mission de l’ambassade irlandaise basé en Afrique du Sud et il était question de développements dans l’affaire.
En avril 2017, John McAreavey était revenu à Maurice pour voir où en était l’enquête et avait même rencontré le Premier ministre. Comme les avocats affirmaient que l’enquête n’avançait pas car elle était menée par la même équipe, la décision avait été prise de la confier au surintendant de police Daniel Monvoisin.
En 2018, Avinash Treebhowon et Sandip Moneea décident de poursuivre l’État. Mais toujours rien de nouveau dans l’enquête. Las d’attendre, John McAreavey lance un podcast intitulé «Murder in Paradise» en 2019 et explique qu’il se sent berné par les autorités mauriciennes et prévient même le club de Liverpool de son combat alors que l’État avait signé un contrat avec l’équipe pour la publicité. En 2020, l’enquête est confiée à une cellule spéciale du Central Criminal Investigation Department menée par le DCP Heman Jangi.
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