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Covid-19: Pleins feux sur l’hôpital ENT

14 novembre 2021, 20:00

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Covid-19: Pleins feux sur l’hôpital ENT

«Quand vous entrez là-bas, il n’y a pas de sortie...» Voilà comment l’hôpital ENT, à Vacoas, est décrit par plusieurs familles qui y ont perdu un proche. Le personnel, lui, n’ose que rarement raconter ce qui se passe entre ses quatre murs, par peur de représailles, alors que des patients témoignent sous le couvert de l’anonymat.

Ils craignent de s’étaler sur le sujet mais l’on a quand même envie de savoir comment se passe la vie dans ce centre hospitalier, reconverti en hôpital dédié uniquement au traitement du Covid-19, depuis que des cas positifs ont été détectés sur le sol mauricien l’année dernière. «Des directives ont été données pour que nous ne parlions de rien de ce qui se passe ici. Mais c’est vrai que la situation devient inquiétante», soutient une infirmière à qui nous avons parlé. Elle dit vouloir alerter l’opinion publique sur la situation actuelle pour que la population prenne réellement conscience de ce qui se passe dans le pays. «Trop de personnes pensent que le Covid est un jeu et que cela n’arrive qu’aux autres mais il faut le voir dans sa forme la plus grave pour comprendre que les précautions et mesures sanitaires doivent être prises à la lettre. Quand vous voyez comment des gens souffrent avec ça...»

Elle n’a personnellement pas vu d’enfant à l’ENT, mais elle indique toutefois, qu’il n’est pas si rare de voir des jeunes. «Ceux de moins de 40 ans sont malades et ont les symptômes les plus graves. Si la plupart guérissent, quelques-uns ont moins de chance. Mais il faut garder en tête que ce n’est pas l’hôpital et son personnel qui tuent les gens, c’est ce virus et cette maladie qui n’ont toujours pas de remède. Nous faisons vrai- ment de notre mieux au quotidien. Si vous aimez votre métier, vous êtes dévoués...» Elle explique que trop souvent, ils sont pointés du doigt et vivement critiqués. «Certains patients disent que les infirmiers ne veulent pas les approcher et s’occuper d’eux. Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier, juste parce qu’une ou deux personnes ne font pas leur boulot correctement.»

Justement en quoi consiste le traitement sur place ? Il semble que c’est un secret bien gardé car l’on n’en saura pas plus. «Ils reçoivent tous les traitements. On soigne les symptômes, on s’assure qu’ils ont de l’oxygène au cas où le taux baisse. On surveille la température et ils sont mis sous respirateur artificiel, quand les poumons ne fonctionnent pas assez pour fournir l’oxygène nécessaire au patient. Cela peut durer quelques semaines, voire un mois ou plus, dépendant de l’évolution de la santé du patient.»

Quid des patients eux-mêmes ? Les témoignages sont divers. Choc, tristesse, colère et sentiment d’impuissance face à un ennemi invisible. Ce sont les sentiments de ceux à qui nous avons parlé. Parmi ces malades, un patient admis, il y a quelques jours. «Il y a des morts tous les jours et cela se passe sous nos yeux et nous n’y pouvons rien. C’est comme si nous attendons juste notre tour… Nous sommes stressés ou nous prions que Dieu nous donne la force pour guérir.» Mais à la maladie, se mêlent le stress et la détresse humaine. «On sait que personne ne pourra nous sauver, même pas les médecins. Ils paraient tous dépassés par les événements et ne savent pas quoi répondre à nos questions. Même les infirmiers et personnel sont excédés. On le ressent. On le voit.»

Par ailleurs, un autre raconte qu’une nuit, un patient a hurlé durant des heures de douleur ou de l’on ne sait pas trop de quoi et que personne n’est allé à son chevet. «Cette personne est restée dans sa détresse. On sait que les infirmiers ont beaucoup à faire et ils ne peuvent pas donner tout leur temps à un seul patient... Mais cette personne aurait pu mourir sans que personne ne puisse faire quelque chose...»

Puis, il y a les moments les plus pénibles de toute une vie, un véritable cauchemar éveillé, celui de voir des corps dans les lits voisins. «De ces personnes, que nous avons vues brièvement, que nous avons côtoyées et avec qui nous avons échangé, ne serait-ce que quelques mots, qui sont parties et dont nous pourrions partager le même sort. Ils sont par la suite plastifiés et leur corps est posé sur le lit toujours au vu de tous. Les premiers morts étaient traumatisants... on ne s’y habitue pas et cela restera gravé à jamais dans notre mémoire.»