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Achat de Molnupiravir: une liste qui en dit long…
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Achat de Molnupiravir: une liste qui en dit long…
Les zones d’ombre autour de la vente de 999 000 pilules de Molcovir, générique du Molnupiravir, par CPN Distributors au ministère de la Santé, continuent mal passer. Hier, alors que l’Independent Commission against Corruption (ICAC) menait quatre descentes simultanées, des documents relatifs à cette affaire ont été déposés au Parlement par le ministre de la Santé, y compris la liste des autorisations d’importation. Les questions persistent. Quant à CPN Distributors, elle nie toujours toute maldonne.
40 % des importations effectuées par CPN
Après la lettre de Xavier Duval au clerk de l’Assemblée lundi dernier, les documents sur la quantité de Molnupiravir que les firmes ont demandée et pour laquelle elles ont obtenu l’autorisation ont été déposés au Parlement. Sur 2 540 000 cachets, il ressort que CPN Distributors a demandé et obtenu le permis pour importer un million de cachets. Il se trouve que cette compagnie n’a obtenu l’autorisation pour importer des médicaments que cette année. Plusieurs personnes dans le domaine ont dès lors soulevé des questions sur cet achat, car d’autres conglomérats avec des branches spécialisées dans l’importation de médicaments, et présents depuis des décennies dans le paysage local, n’ont pas présenté une demande aussi élevée. «Il est plus que probable que le client était déjà connu et qu’il y avait un deal en avance», fait-on ressortir.
L’autre information qui ressort de ces documents est que la compagnie a importé en boîtes de 100 alors que toutes les autres ont importé en boîtes de 40 cachets, ce qui correspond à un traitement pour un patient. «Vu cet emballage, il est clair que cela n’était pas pour la vente au public», fait ressortir Xavier Duval, d’autant plus que le prix affiché par la compagnie est plus élevé que celui des autres. L’autre point qui le conforte dans son analyse est que lorsque le stock a atterri à Maurice, CPN Distributors a demandé l’autorisation de le mettre sur le marché après plus d’une semaine. «Un officier du ministère du Commerce avait d’ailleurs confirmé que le stock est arrivé à Maurice le 30 novembre et que la permission pour mettre en vente le médicament a été demandée et obtenue le 8 décembre. Encore une fois, il est évident que ce stock n’était pas destiné aux commerces, sinon ils n’auraient pas attendu tout ce temps», fait-il ressortir.
Dans les documents déposés, figurent aussi deux lettres émanant du ministère de la Santé à l’attention de CPN Distributors datant du 7 décembre. Dans la première lettre, qui est une demande de «proforma invoice» à la compagnie pour un million de cachets de Molcovir, il est stipulé que la date d’expiration ne doit pas être de moins de 18 mois et que le produit doit être approuvé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la European Medicines Agency (EMA) ou la Food and Drug Administration (FDA). Si le médicament produit par Merck, et ceux qui en ont la licence, est approuvé par l’OMS, les détails des approbations internationales pour le Molcovir ne sont pas disponibles en ligne.
Cependant, dans une autre lettre, datant du même jour, un changement important est noté. Alors que l’offre pour l’achat de produits médicaux au prix de Rs 79 840 080 est approuvée, la date d’expiration acceptée est modifiée : elle passe des 18 mois prescrits à sept mois…
Le prix de la discorde
CPN Distributors a indiqué que le prix d’achat est de Rs 72, d’où le prix de vente à Rs 79,90. Toutefois, le député Ehsan Juman a écrit à Optimus Pharma pour s’enquérir davantage du prix de vente. Surprise : dans la réponse, la firme indienne affirme qu’elle peut fournir des cachets de Molcovir de 200 mg à $0,4, soit Rs 17. «Déjà, la lettre du ministère date du 7 décembre et, selon les documents déposés, il ressort que CPN Distributors avait déjà fourni 5 000 cachets à l’ENT le 3 décembre. Comment s’est fait cet achat ?» demande-t-il. Quant au prix de vente, suivant les échanges de courriels avec Optimus Pharma, le député réitère que celui-ci pose bel et bien problème.
L’ICAC entre en scène
À la mi-journée hier, les officiers de l’ICAC ont saisi des documents et appareils électro- niques non seulement dans les locaux de CPN Distributors, mais aussi au ministère de la Santé, à celui du Commerce et à la douane. «Nous allons maintenant éplucher les documents pour situer les responsabilités et déterminer si la compagnie a acheté à un prix bas pour revendre à un prix très élevé», explique une source de l’instance. Les comptes bancaires seront aussi vérifiés.
Entre-temps, un premier problème est déjà identifié. «Il y a les procédures en place, mais en cas d’urgence, tout est waived. Donc, à un moment, il sera délicat de déterminer comment procéder face à cela et aux règlements en cas d’emergency procurement», dit notre interlocuteur. Puis, à Réduit, plusieurs sources se demandent si les fonctionnaires impliqués voudront parler et expliquer comment un achat a été effectué le même jour…
Xavier Duval, de son côté, explique qu’en référant ce dossier à l’ICAC, le Premier ministre prive la population d’une dernière PNQ sur cet achat controversé, vendredi. D’ailleurs, dès l’éclatement de l’affaire, le député Ritesh Ramful avait soulevé le même point, rappelant que plusieurs autres scandales ont fini de manière similaire.
Prête à collaborer
CPN Distributors a émis un communiqué dimanche pour faire état de ce qui s’est passé et s’expliquer, via une boîte de communication. Elle est catégorique : tout a été fait dans les règles. «Optimus a eu l’autorisation de fabriquer et d’exporter vers Maurice. Toutes les étapes de fabrication et de contrôle ont été respectées», a expliqué Jean Marie Richard, responsable de communication de la firme. Quant au prix, il insiste que la marge recommandée par le ministère du Commerce a été respectée. «L’enquête est most welcome. Je comprends qu’il y ait des interrogations car il s’agit des fonds publics, et c’est normal. Ce qui n’est pas normal, ce sont les allégations et les innuendos.» Il assure que «le dossier et tous les documents sont à la disposition des enquêteurs et qu’ils peuvent tout consulter à n’importe quelle heure».
Akash Chuttoo : «on sauve la vie des mauriciens»
<p>À sa sortie de l’ICAC, le directeur de CPN Distributors a affirmé être serein et collaborer pleinement avec les autorités. Face aux questions, il a expliqué qu’il ne pourra pas répondre car une enquête est en cours. Il a, néanmoins, tenu à préciser que le laboratoire <em>Merck </em>a sa formule et qu’Optimus a développé son principe actif et possède toutes les certifications nécessaires. <em>«Je ne prends pas tout cela mal. Au contraire, c’est une fierté car nous avons sauvé la vie des Mauriciens»</em>, a-t-il ajouté. Quant au gel du paiement dû, Akash Chuttoo dit respecter la décision du gouvernement.</p>
Trident Healthcare a eu l’approbation de la «price fixing unit»
<p>Dans une correspondance envoyée aux pharmacies hier, Trident Healthcare a informé les détaillants que toutes les procédures ont été respectées avant la mise en vente sur le marché de Movfor, importé du laboratoire <em>Hetero Labs</em>. La requête pour l’importation du Molnupiravir sous le nom de Movfor a été agréée le 25 novembre. Le 8 décembre, la cargaison a été dédouanée. Le même jour, une demande a été déposée à la <em>«Price Fixing Unit» </em>du ministère du Commerce et la requête a été approuvée. Ce médicament, fabriqué par un laboratoire qui a la licence de <em>Merck</em>, n’est pas concerné par le scandale d’achat controversé.</p>
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