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Post-Batsirai: toujours et encore des leçons à tirer
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Post-Batsirai: toujours et encore des leçons à tirer
Après le passage de Batsirai, l’alerte cyclonique a été enlevée à 4 heures du matin jeudi. Et un employé d’une compagnie de transport a trouvé la mort sur une route encore obstruée alors que le pays était toujours dans l’obscurité. Ce drame aurait-il pu être évité s’il y avait une bonne communication entre la météo et les autorités ?
Depuis la levée de l’alerte cyclonique, les critiques sur la gestion s’enchaînent. Certains ne comprenaient pas pourquoi le travail a repris le même jour alors qu’il y avait toujours des vents allant jusqu’à 100 km/h. Puis, il y a aussi eu tous les couacs pendant que le pays était en alerte 4. A qui peut être imputée cette responsabilité ?
Mercredi, 23 h 30. Batsirai était toujours dans les parages, le pays tentait de résister aux vents de plus de 150 km/h. A Terre-Rouge, une dame âgée de 92 ans ne se sent pas bien. Sa belle-fille appelle le SAMU. Un médecin répond, parle un peu mal car il ne comprend pas les symptômes. Finalement, il finira par dire que le SAMU ne peut pas sortir à cause du danger. C’est le véhicule blindé de la SMF qui s’occupe des urgences médicales. Mais il ne peut pas venir tout de suite car un autre patient a appelé avant. Il faudra attendre. Pendant ce temps, l’état de la nonagénaire se dégrade. «La famille a donc décidé de prendre le risque de sortir pour l’emmener à l’hôpital. Ti pou pay lamann si bizin», explique un proche. Après un trajet chaotique à travers les vents les plus forts enregistrés dans l’île, des arbres tombés et des fils électriques qui jonchent le sol, la patiente arrive enfin à l’hôpital. Elle avait de l’eau dans les poumons, causée par un problème de tension artérielle. «Le médecin sur place a dit que nous sommes arrivés à temps, sinon il serait trop tard.» La question qui se pose alors est, comment se fait-il que le SAMU ne peut pas sortir, que d’autres véhicules des forces de l’ordre n’aident pas dans ce type de cas, et les particuliers se retrouvent dans de telles situations ?
Ailleurs, le problème est plus grave car il y a eu mort d’homme. Ramjeet Gosto est décédé lorsque sa moto a heurté un arbre tombé pendant qu’il allait au travail. Selon sa famille, la météo est en cause car l’alerte 4 aurait dû être enlevée après que les routes auront été inspectées. Ainsi, l’homme serait toujours en vie. Puis, à Grande-Rosalie, une famille a été dans le noir pendant plus de 48 heures après que la SMF a arraché un fil électrique. Il y avait des étincelles, mais pas de réparations malgré le fait que la CEB avait affirmé que le nécessaire a été fait. La situation a été rétablie bien après.
Ces problèmes sont l’arbre qui cache la forêt. Est-ce que le pays est préparé pour faire face aux cyclones et ses conséquences ?
Pas la faute de la météo
La question n’est pas si simple. Le protocole pour monter le niveau d’alerte ou l’enlever est bien établi. L’alerte niveau quatre est une constatation. Lorsque le pays a enregistré des rafales de 120km/h ou plus dans plusieurs régions, le pays passe en alerte 4. L’alerte est enlevée lorsque ces conditions ne sont plus présentes. Mais comme cela a été le cas avec Batsirai, les conditions post-cycloniques peuvent être tout aussi mauvaises. Dans ce cas, il faut que chaque instance prenne ses responsabilités, une très bonne communication vulgarisée et revoir le système de fonctionnement des différentes instances pertinentes entre elles. C’est du moins ce que pense Subiraj Sok Appadu, ancien directeur de la station météorologique.
«On ne peut pas dire que c’est la faute de la météo, qui a fait son travail. Le problème vient d’ailleurs», dit-il. Revenant sur le cas de Ramjeet Gosto, il explique qu’il est normal que la famille soit triste, mais ce drame ne se serait pas produit s’il y avait une bonne dynamique entre la météo, le National Disaster Risk Reduction Management Centre (NDRRMC) et les autres instances. Et la communication fait défaut, réitère-t-il. «Par exemple, lorsque la météo enlève l’alerte, il fallait préciser que le temps ne va pas magiquement se rétablir. Les dangers restent présents», déclare-t-il. Quant à la reprise du travail, selon lui, il aurait fallu que la météo communique avec le NDRMMC pour dire que la reprise devait se faire après un état des lieux.
Mais est-ce le rôle de la météo de faire cela ? Subiraj Sok Appadu est catégorique. C’était le cas dans le temps, d’ailleurs. Il rappelle qu’en 2002, le pays avait été maintenu en alerte 4 pendant plus de 24 heures à cause du cyclone Dina, et il n’y avait aucun décès. «A l’époque, j’avais appelé le PMO et SAJ m’avait remercié de l’avoir informé du danger et m’avait dit de faire mon travail. Nous faisions nous-mêmes la liaison avec la police, la santé, la SMF, les pompiers et le PMO, le CEB. Nous discutions. Nous avions les données pour les heures suivant l’alerte, la police était au courant des problèmes sur le terrain et les décisions étaient prises par la suite. Aujourd’hui, quel est le protocole en place ?» se demande-t-il.
Aujourd’hui, les décisions sont prises par le NDRRMC. Selon le projet de loi voté en 2016, le NDRRMC doit «ensure that Ministries, departments and local authorities have adequate human resources, tools, materials and other resources for the effective implementation of disaster risk reduction and management activities at all levels» ou encore, «oversee the implementation of post-disaster recovery and reconstruction activities». Le problème, estime l’ancien directeur des services de la météo, est que personne ne sait trop qui fait quoi. «On voit toujours une soixantaine de personnes en train de travailler, mais on fait toujours face aux mêmes problèmes. Dans ce comité, n’y avait-il personne pour savoir que si l’alerte est enlevée à 4 heures, il est impossible que les chemins soient praticables à l’heure d’aller au travail et prendre la décision qui s’impose ?», se demande-t-il. Par exemple, à hier, les travailleurs étaient toujours sur le terrain à Pamplemousses pour déblayer les routes, ce qui causait un inconvénient aux usagers alors que l’activité avait repris depuis plus de 24 heures. Idem pour les écoles. Un constat simple aurait pu permettre de repousser la rentrée à lundi directement au lieu de le faire au compte-gouttes.
L’historique des alertes
Cependant, Subiraj Sok Appadu estime que le problème du mauvais temps qui perdure après les levées des alertes n’est pas nouveau. La différence est qu’auparavant, le système était régulièrement mis à jour. Par exemple, longtemps, il fallait prendre en considération le fait que Maurice n’était pas développé et ainsi, selon la trajectoire et l’intensité du cyclone, prévoir les alertes de manière à donner au moins six heures de lumière du jour à la population pour pouvoir prendre les précautions. Ou encore, faire les prévisions pour savoir s’il faudra passer en classe 2 dès 4 heures du matin, même si les conditions arriveront plus tard dans la matinée, pour éviter que les enfants ne se déplacent à l’école. «Puis, on a eu l’électricité partout, un système de transport public étendu. Le laps de six heures est passé à trois. Mais après, il a fallu commencer à prendre en compte les personnes qui travaillent sur shift le soir pour prévoir la classe 3 afin qu’elles puissent s’organiser aussi. Le tout était fait en étroite collaboration avec les autorités et le PMO», raconte-t-il. Quant à l’après-cyclone, encore une fois ce sont les autorités, de concert avec la météo, qui prenaient les décisions pour la reprise des activités dépendant des conditions post-cycloniques. Donc, poursuit l’ancien directeur, il est possible de faire évoluer le système. Avec la technologie, il affirme qu’il est possible d’informer la population, à travers un système de WhatsApp ou SMS en masse, de la situation même après le passage d’un cyclone. «Puis, il faut aussi vulgariser les termes. Un avis de fortes pluies ne parle pas à tout le monde», juge-t-il.
Quand les députés s’en mêlent
<p>A Tranquebar, le député de la circonscription N°2, le Dr Farhad Aumeer, était descendu sur le terrain à 18 heures le 2 février pour rendre visite aux réfugiés des centres car ils n’avaient toujours rien à manger. Selon lui, il a dû faire des démarches pour que des pains leur soient livrés. Par la suite, en compagnie des forces vives de l’endroit, il a fait le tour de la circonscription pour constater les dégâts et prévenir les autorités et autres instances comme le CEB ou la CWA pour qu’elles agissent.</p>
«Le SAMU travaille pendant les cyclones»
<p>Que se passe-t-il si quelqu’un tombe malade pendant un cyclone ? Le Dr Siven Samoo, ancien directeur du SAMU, explique que tout fonctionne normalement. <em>«On ne peut pas dire que le SAMU ne travaille pas. Toutes les équipes sont mobilisées. Sauf que le déplacement se fait dans les chars blindés de la SMF»,</em> explique-t-il. Lorsque le pays est en alerte 2 vers la 3, le directeur de ce service écrit au commissaire de police pour lui demander de mettre les chars à disposition. <em>«Je demandais un char dans chaque hôpital régional, mais il arrive que des fois, nous n’en obtenons que quatre au lieu de cinq, dépendant du travail de la SMF»,</em> souligne-t-il. Tous les premiers soins sont prodigués par les urgentistes dans le char. Il tient à préciser que les soldats ont toujours été professionnels dans ces conditions. Même après la levée des alertes, le Dr Siven Samoo était en contact avec la police pour savoir si les routes sont praticables avant de remettre les ambulances sur les routes. <em>«Mais il est maintenant temps de nous équiper avec des ambulances anti-catastrophes, qui peuvent rouler dans les inondations et autres conditions extrêmes. Cela facilitera grandement la tâche»,</em> analyse-t-il.</p>
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