Publicité
Interview | Mélanie Pérès: pourquoi un texte de Big Frankii ne peut pas figurer dans le cursus scolaire ?
Par
Partager cet article
Interview | Mélanie Pérès: pourquoi un texte de Big Frankii ne peut pas figurer dans le cursus scolaire ?
Ecrivaine, auteure de comédie musicale, prof de Kreol au Collège du Saint-Esprit, compositrice, chanteuse qui vient de sortir son premier album, une ti-pima d’énergie sur scène, Mélanie Pérès, 26 ans, est une drôle de rebelle. De sa voix pourtant calme et son fransé-morisien, elle se rebelle même contre ceux – surtout celles – qui essaient de la traîner dans le féminisme. L’école ? Elle propose à ses étudiants d’analyser les textes de Big Frankii ! Un leader politique kreol ? «De ki drwa ? Zot koné kivedir kreol ?» Son album ? Elle est en sari pour le lancement et sur la pochette. Celle qui refuse toute forme de catégorisation ou de confinement culturel et social, est également une mère de famille inquiète qui songe à plaquer le succès actuel, sauter de son petit nuage, pour poser ses valises à l’étranger. Las des politiques ? Lisez Mélanie Pérès !
Le succès a bon goût ?
(Longue réflexion accompagnée d’une grimace qui s’éternise). Oui. Faudrait pas se mentir. Il faut savourer quand on a travaillé dur.
Le livre primé qui devient une comédie musicale, et quelques mois plus tard l’album qui arrive, sans compter les scènes à guichets fermés. C’est un succès prémédité ça !
Non, vous simplifiez trop la timeline. Le livre est là depuis 2016, avec le concours de la Kreol Speaking Union. Puis en 2018 Yann (NdlR : Yann Payet, son ami, musicien, et arrangeur musical) qui abandonne sa bourse pour rentrer me propose d’en faire la comédie musicale. On s’y est mis avec l’intention de la jouer en 2019. Après on s’est retrouvé dans le nerf de la guerre de toute personne qui veut percer dans cette industrie : c’est le sponsoring et la plateforme adéquate. Mais on voyait trop grand en fait. Après on voulait faire comme les autres, comme Gérard Sullivan faisait à l’époque, comme Michel Ducasse…
On l’interrompt. On nous demande toujours de voir grand. Voir trop grand ça existe ?
(Elle rit). Oui bien-sûr. Entre ce qu’on a en tête et ce qui est réalisable, il y a quelque fois des fossés qui doivent nous donner le courage de revoir notre copie. Il faut être réaliste dans la vie et dans ce monde. On peut avoir des idées folles, mais il faut pouvoir les réaliser. Ariv enn ler bann la ti pe kumans fatigué ar mwa parski mo ti pe anvi mett bann trapezys lor la senn, comme dans Cléopâtre. Ça ne s’est donc pas fait en 2019, il y a eu le Covid et donc tant mieux parce qu’on se serait retrouvé avec des dettes de plus de Rs 3 millions si on avait fait ça aussi grand qu’on voyait. La comédie musicale a été placée sur pause, et on a travaillé sur l’album avec ce que cela représente comme tâche. Et le travail sur la comédie musicale a repris et tout était prêt en même temps et tout sortir en même temps était devenu possible et idéal. On l’a fait. (sourire).
Tigann (NdlR : titre du livre primé qui a ensuite été adapté en comédie musicale) est une revendication féministe, qu’on retrouve ensuite dans Mama Dife, l’album. Ça m’étonnerait que vous ne pensiez pas que ça fasse cliché !
Mais vous avez parfaitement raison !
Ah bon ?(Elle s’avance sur sa chaise comme pour montrer son intérêt grandissant à la conversation). J’ai eu beaucoup de mal
à m’identifier féministe. Et même aujourd’hui je ne me considère pas féministe. J’aime votre question car elle me permet de mettre les points sur les i à ce sujet, car cela m’a calée à moment. Ce n’est pas juste cliché. Ça va au-delà du cliché. Quand Tigann est sorti, ce furent les premières réactions que j’ai eues. Ek zot pa ziss inn dir mwa mé zot inn kol enn etikett feminiss la lor mwa. Jusqu’à l’heure je ne sais pas cerner tous les contours du féminisme. A quel moment on s’autoproclame féministe ? Shenaz Patel et moi avons beaucoup échangé sur la question ; on est en accord et en désaccord sur plusieurs points. Mais quand j’écris, je ne suis pas féministe moi. Je m’inspire de la vie de tous les jours et de tout ce que j’ai envie de dire, mes frustrations, mes désirs, et mes sentiments au moment de l’écriture. A aucun moment je ne me dis, «je suis féministe je dois écrire ça, bizin kas bann fay rass zom la impé». Du tout !
(D’un air détaché exagérant presque sa franchise). J’aime les hommes. Dans tout ce que je fais je suis entourée d’hommes. Et cela m’a beaucoup troublé ces derniers temps et j’avais besoin d’en parler et j’en ai discuté chez moi et avec mes proches. On m’invite sur des plateaux pour parler de la femme comme si j’ai été stigmatisée, etc. Et on parle de ça juste (elle claque des doigts) le 8 mars man ! Ek apré bliyé ! Ce n’est pas que le thème m’agace. La femme est un sujet important dans une société, mais on dirait qu’on a voulu me cantonner à ça et c’est cela qui m’a dérangé. Je n’ai pas travaillé pour devenir celle que je suis pour que des tiers m’approprient. Alors-là non. Je veux rester libre, être celle que je veux et renvoyer l’image qui me plaît.
De quel droit certains s’autoproclament leader politique kreol en ciblant une communauté ? Zot koné kivedir kreol ?
Mais vous l’avez un peu cherché non ? Le titre Sarouyar sur votre album qui s’intitule Mama Difé parle d’une prostituée et de la drogue.
Je ne cherche rien. Je m’exprime c’est tout. Je parle de ce que je suis et ce qu’il y a autour de moi. Ce n’est pas parce que j’aborde la thématique de la femme que je suis juste féministe ! Je vis autour des hommes et je me sens bien. Et attention, je chante la prostitution comme un métier noble et je ne montre pas du doigt. Il y a celles qui se retrouvent dans l’obligation de le faire, mais il y a d’autres qui ont fait ce choix-là. C’est leur corps, elles choisissent. Vous comprenez ?
C’est un coup d’épée dans l’eau, vous ne pensez pas ? Le combat de la légalisation de la prostitution avait été menée en grande pompe avec une illustre marraine du nom de Marie-Michèle Etienne. On n’y est jamais parvenu.
(Réflexion et un air dépité). Oui peut-être. Peut-être. Dans l’eau ou pas, c’est un coup d’épée quand même. J’en donne et ça me fait du bien. Je ne suis pas militante quand j’écris. C’est du plaisir, c’est tout. Et après tout, pourquoi vous retenez plus la thématique de la prostitution dans sarouyar plutôt que la drogue ?
Vous n’êtes pas militante ?
Pas au moment d’écrire, non. Excusez ma franchise. Je le deviens un peu au moment de chanter, quand je reçois des feedbacks etc.
Quel sujet de société vous intéresse ces jours-ci ?
En ce moment il y a un truc qui me passionne au point d’en devenir perturbant, c’est la place du français-mauricien. J’en ai parlé à des conférences récemment. Aujourd’hui on va dire, «allons manger», «on casse une pause». C’est montré du doigt parce que c’est considéré soit comme du mauvais kreol francisé, ou du mauvais français kreolisé. Ça me démange d’en faire une d’étude et de valoriser cette langue.
Sur scène avec mon maravann, mon sari, mes cheveux lâchés, mes chaussures à talons, je me sens entière.
L’amoureuse de la langue kreol que vous êtes va faire cela ?
Justement. C’est comme la question du féminisme. Arrêtez de m’emprisonner. L’un n’empêche pas l’autre. Je parle moi-même ce français-là, c’est plus fort que moi. Une fois j’étais panéliste lors d’une conférence sur la création littéraire en kreol aux côtés des seniors respectés de la langue kreol et dans la salle il y avait des anthropologues, des diplomates, etc. J’étais super contente parce que j’étais là où je voulais être. Quand j’étais étudiante, j’étais dans la salle. Là j’étais panéliste. (Ses yeux s’illuminent). Je vivais mon rêve en passant de l’autre côté. Avant que je ne prenne la parole, je m’étais excusé pour cette manie que j’ai à zigzaguer entre le kreol et ce que j’appelle le français-mauricien. Or, pendant que je parle, un homme dans la salle se met debout et crie «Koz kreol do !» Je ne me suis pas laissée faire. Car c’est mon mauricianisme à moi. Ma mère était une créole de Rivière-Noire. Ce français-mauricien qu’on a parlé chez nous est montré du doigt et taxé de langaz blanc riviernwar ou celui de Curepipe qui là encore est différent. Et puis il y a le français de Beau-Bassin là où mes parents ont emménagé et où se trouve soi-disant la bourgeoisie et l’intellect créoles. A cela il faut ajouter le français parlé à Crève-Cœur ou Congomah. Quelqu’un peut me dire qu’on y parle le français standard et le français de France ? C’est vrai que pour qu’une langue soit reconnue il faut qu’elle ait une littérature orale qui deviendra écrite et par la suite un dictionnaire. On en est très loin. Mais c’est une question qui m’intéresse. Il y a toute une génération qui parle ce français-là. Je ne vais pas être hypocrite et prétendre que parce que je suis à Maurice que le kreol est ma langue maternelle. Ce n’est pas le français non plus. C’est ce fameux français-mauricien qui nous a été imposé à l’école et qui est parlé par toute une génération.
Vous avez un problème avec vos propres revendications ou quoi ? Vous écrivez et chantez la femme, vous refusez qu’on vous qualifie de féministe. Vous êtes un produit de l’académie kreol et vous reniez presque le kreol.
Non, ne me méprenez pas. Je ne renie pas. Mais tous ces sujets comme le kreol au parlement etc, je m’y suis retrouvée embarquée parce que je suis dans le monde du kreol. Inn met twa dan bato la to bizin pagaye la twa. Ek si to pa pagay dan mem sens ki bann la, zot pou dir : «ki serti ?»
Etonnez-moi. Vous n’êtes pas pour le kreol au parlement ?
Si si. Il faut. Pour l’avancement du parlement certainement. Mais ce n’est pas mon point de départ. Le Kreol ce n’est qu’un aspect de ma vie. Encore une fois, arrêtez de me cloisonner. Voici une anecdote qui vous aidera à comprendre. Quand j’étais à l’Université, le Festival International Kreol me faisait rêver. Les conférences, les scènes, soirées, concerts etc, je voulais être à la place de ceux qui y étaient. J’ai fait tout ce que j’ai pu pour pouvoir quitter le public et arriver sur la scène. Mais ce fut une expérience horrible. Mon premier clash a été avec l’illustre Menwar. Mon projet sur les instruments traditionnels mauriciens avait été sélectionné pour être présenté au Festival. J’avais cité Marclaine Antoine qui était encore en vie à l’époque. Marclaine et moi on s’était rencontré, on a échangé, et on a vécu des choses quoi. Au Festival donc, je cite Marclaine qui m’avait dit que la ravanne est un instrument mauricien. My God, Menwar m’a allumé devant un auditorium pour dire que c’était un instrument universel.
Et votre entrée dans le monde éducatif, comment ça c’est fait ?
C’était pire que tout ce que je viens de vous raconter. On était en deuxième année d’université quand on a appris que le marché d’enseignants de kreol est déjà saturé, parce qu’il y a eu des formations et des recrutements parmi les enseignants et que nous, prochains détenteurs d’une licence universitaire, qui avons payé nos cours, ne seraient pas recrutés. Mes amies de classe me demandent, de par la notoriété que je commençais à me forger avec la sortie du roman Tigann, d’écrire une lettre de revendications à la ministre. Toute la classe a écrit la lettre, et c’est à moi qu’on a demandé de signer.
Ounn vinn portparol..
Monn vinn portparol. Sof ki portparol la derniyé lér, létan linn fini liniversité, zot tou inn gayn travay, portparol pann gayn travay !
Kifer ?
Kifer zisteman ? Parce que c’est moi qui signais la lettre ? Ça a été une très grosse frustration pour moi. J’ai dû tracer ma route. J’ai envie d’avoir ma place dans ce monde-là, mais c’est à ce prix-là ? C’est dégoûtant. Est-ce que je dois tout le temps brosser dans le sens du poil ? Et même mes camarades de classe n’ont été recrutés que comme supply teachers. C’est le reflet du pays. Quand on revendique on est puni. Caresse dans le sens du poil, pou donn twa, me pou donn twa enn ti bout. J’ai des amis détenteurs de licence, qui sont d’un niveau alala (elle lève la main droite le plus haut possible) et qui n’ont pas de travail aujourd’hui. C’est comme si on nous a vendu du rêve. Moi j’ai trasé par moi après avoir accusé le coup. C’est tout le pays qui est animé d’une frayeur de revendiquer. Ena enn gro laper dan sa pei la.
La langue kreol est-elle associée à ce qu’on qualifie à tort de communauté kreol ?
Definitivman ek li mari mat ! Il y a une misconception de la terminologie kreol. Comment emploie-t-on cet adjectif ? Il y a le cadre humain, la faune et la flore, social, ethnique. Le mot kreol peut fâcher dans certains contextes surtout s’il est mal employé.
Certains s’autoproclament «leader politik kreol» en ciblant une communauté. Vous en pensez quoi ?
Ah ! C’est uniquement dans leur intérêt. On avait vu cela dans le mouvement de la négritude avec Césaire, Confiant etc. Tout commence à partir du moment où le nègre se dit «je suis un nègre». Bé Man, sa ki pé dir li pou vinn leader kreol la la, ki pe al dir dimunn zwenn ar li parski zot kreol, li pé koné kivedir kreol ? Selma to pé… (elle se retient). Léss mo pa dir sa.
Dir…
(Elle s’auto-censure) To ankor pé asiz anba lexpression ‘popilasion zeneral’ dan enn system ki pe diviz pei la ? To pé konpran ? Bé ki serti ? Ki leader kreol to pe deklar twa ? Si to ti enn leader kreol to ti pou enn leader pou tou dimunn ! Parski kreol li anglob tou dimunn. Notre génération ne se centre plus sur nos différences, mais sur nos points communs.
Votre sari sur la pochette de l’album et dont vous vous drapez sur scène pour le lancement de l’album c’est un coup marketing ?
Du tout pas ! J’aime ! En fait cette histoire de sari a commencé quand mo ti pe diboutt kuma ser pour le mariage d’une de mes meilleures copines. Juste après le safran, je devais jouer sur une scène. J’avais mon linz indien, mehendi partou dan lamé lipié, et je suis allée chanter à ce concert dans cet état. Quelqu’un m’aborde et me lance : «to met sari pou to santé ?» Kumadir pou saki mo pe fer, mo ena enn maravann dan mo lame, mo pe sant an kreol mo pa kapav ena enn sari lor mwa ? Ki sa ve dir sa ? J’étais en colère. J’ai dit à cette personne, «kisanla to ete pou to dir mwa ki mo bizin mété pou mo santé ? Et à quel point tu es petit d’esprit.» Quand je joue la maravanne je ne peux pas avoir un sari ? Why ? Ou bien si je porte un sari je ne peux pas jouer la maravanne ? Je joue de la maravanne en talons ! A un moment c’était un impératif pour moi. Pa vé dir ki mo bizin sant pieni ek met enn zip sega lor mwa ! Ces clichés et ces codes là me révoltent. Mon père était un chanteur de séga, il jouait à l’hôtel et il était pieds-nus. Mais moi je me sens libre et je me sens bien en sari sur scène avec mon instrument. Idem en chaussures à talons. J’adorais le linge que je portais le jour de ce concert après le safran et je me suis dit que c’est comme ça que je veux être sur scène. Le feeling des cheveux lâchés, les talons, le sari, la maravanne, ça dépasse le mauricianisme là. C’est moi. Je me sens entière.
Les collèges, je rappelle que vous êtes prof, furent le terrain de lutte contre les clichés et du combat contre tout un système dans les années 70 avec le mouvement estudiantin qui a débouché au 60-0 de 1982. Aujourd’hui on a l’impression que les ados sont déconnectés des facteurs qui vont affecter leur avenir. Aucune chance que la prochaine révolution politique et intellectuelle sorte des collèges. Vous êtes d’accord ?
Surtout pas. Ceux qui disent cela ont un regard archaïque. De ma génération, à la génération 2000, il n’y a que 5 ans. Mais le gap est extraordinairement immense. Maintenant entre la génération 2000, et la génération 2010, c’est encore plus grand. Sof ki nou nou inn tass dan nou zenerasyon. Je ne sais pas si vous comprenez. La fameuse grande époque estudiantine avec ses intellects, ses combats etc, fut bâtie sur une idéologie qui semblait pertinent à ce moment-là.
Ceux qui ont 60 ans et plus aujourd’hui vous diront que les ados d’aujourd’hui ideolozi mem zot pena !
Mo pou dir zot, kan ou ti ena 18 ans en 1970, bann ki ti la avan ou ti dir ou ena ideolozi ? Ounn bizin desann lor sime pou montre ki ou ena enn ideolozi ! Sof ki aster la, sa bann zeness la, zot pa pou desann lor sime zot. Leur révolution sera numérique. C’est une génération de geeks. Leur militantisme se fait sur la toile, dans les réseaux sociaux ou les réseaux qu’ils créent et trafiquotent eux-mêmes. Les temps ont changé. (Elle espace ses syllabes et se répète). Les temps ont changé ! Est-ce que toi monsieur des années 70 tu gères le numérique comme ces ados ? Même ceux qui ont 30 à 40 ans aujourd’hui ne comprennent pas cette génération. Même moi à 26 ans, je me sens vieille auprès de mes élèves. Quand on ne comprend pas, on croit qu’ils ne font rien !
Que font-ils ?
Ils sont en train de survivre dans un système qui n’est pas en train de valoriser ce qu’ils peuvent et savent faire. L’éducation numérique et les cours en ligne ont été difficiles à appliquer. Ça n’aurait jamais dû être le cas. Quasiment tous les ados sont des petits génies du numérique. Mais on ne leur a jamais demandé leur avis ! Si avant le Covid, ces ados avaient été entendus, on aurait créé des dispositifs numériques avant même que la pandémie ne nous l’impose.
Ils sont en avance sur leur temps ?
Non. C’est nous qui sommes monstrueusement en retard. On est loin derrière. Allez comprendre le disrupt entre un décideur politique, un ministre de 60 ans et un collégien de 15 ans. Man, enn lot lémond sa ! Le jour où vous dites qu’un jeune est con, c’est vous qui le devenez ! Au lieu de les accuser de vivre dans leur bulle, entrez dans cette bulle et découvrez ce monde. Vous risquez de vous en étonner ! Nou bizin asizé kozé pou nou konpran nou kamarad. Si mo zis vini kumadir kuma to profésér ek instrir twa, mayé la ! Zafer la pa fer là !
Je peux faire un parallèle avec l’industrie de la musique. Lyonsquad, Ti Alexandre ek Big Frankii pé défons views lor YouTube ek lezot plaform ! Ena gran profesionel lamizik ek zot gran gran artiss pe kaziman bat lamok ! C’est toujours les anciens les savants et les petits jeunes les ignares ? Moi j’apprends de mes élèves. Ils m’obligent à casser les codes et il faut être suffisamment humble pour le faire. J’ai viré un texte littéraire d’une de mes classes de Grade 10 (Form IV) pour demander à mes élèves d’analyser un texte de Big Frankii, soit, ‘Zanfan Lakaz Tol’, qui pour moi est un texte magnifique. Juste parce que c’est Big Frankii, juste parce qu’il chante d’autres chansons qui ne tombent pas dans le cliché «scolaire», ce texte-là ne peut pas faire partie du cursus ? Pourquoi ? On m’a dit qu’on ne peut pas l’inviter.
Qui ?
Bein la direction !
Parlons justement de l’industrie musicale. En termes de contenus, à Maurice nous sommes gâtés. On est bon, on s’exporte, mais on galère toujours économiquement.
Parce que les autorités n’ont pas encore compris comment fonctionne l’industrie. Elles pensent que nou zis met nissa amizé. Certes, c’est du divertissement. Mais il repose sur un modèle et une réflexion économiques. Il y a de la création de produits et de services, des emplois, des revenus, des taxes qui peuvent être collectés. Contrairement aux autres pays, nous n’avons pas encore compris ça ici.
L’artiste joyeuse que vous êtes sur scène est inquiète de l’avenir avec les crises actuelles ?
Il y a Mélanie Pérès l’artiste, et Ti-Mél comme on m’appelle à la maison. Ti-Mél est une mère de famille et dans les semaines qui suivent je vais décider si je resterai à Maurice ou tout quitter pour reprendre mes études à l’étranger. Je n’ai pas envie que ma fille dise que «Maman s’est sacrifiée pour moi». J’aurais préféré qu’elle dise que «maman a vécu pleinement sa vie pour moi». Et vivre pleinement implique une réflexion économique basée sur la raison. Et cela, même si artistiquement j’ai encore beaucoup à écrire et à chanter. Vous allez m’entendre oui. Je vais produire d’autres œuvres. Aucune décision n’est prise. Mais j’y réfléchis et je trancherai prochainement.
Publicité
Les plus récents