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Nitin Busguth: «Le ‘regressive mark-up’ sur le prix des médicaments n’arrangera pas la situation»

22 avril 2022, 19:00

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Nitin Busguth: «Le ‘regressive mark-up’ sur le prix des médicaments n’arrangera pas la situation»

Depuis que Xavier Duval a axé sa Private Notice Question sur le «regressive mark-up» pour les pharmaciens mardi dernier, l’idée a suscité des débats passionnés. Selon cette méthode, la marge de profit sur les médicaments, qui est limitée à 21,6 %, serait diminuée selon le prix des médicaments. Plus le prix est élevé, moins la marge de profit sera importante. Le ministre du Commerce n’y est pas favorable, alors que l’opposition maintient que ce serait une solution pour pallier la hausse effrénée des prix. Du côté des pharmaciens, l’on affirme que la mesure n’aura pas l’effet escompté. Explications avec Nitin Busguth.

Vous qui êtes directement concerné par le sujet, que pensez-vous de la proposition ?

Ce n’est pas une question de ce que je pense, mais des résultats. Cette solution, si elle est appliquée, ne serait que temporaire. Elle diminuera certainement le coût dans l’immédiat, mais si la roupie continue à se déprécier et si le prix du fret continue sur la courbe ascendante, on reviendra bientôt aux mêmes prix et ferons face, dans peu de temps, aux mêmes problèmes. De toute façon, en 2004, le ministre des Finances d’alors, Pravind Jugnauth, avait baissé notre marge de profit de 27 % à 21,6 %. Dix-huit ans après, on se rend compte que ce n’était pas la bonne solution car, encore une fois, temporaire. Quant à nous, comme nos marges de profit sont plafonnées, nous sommes aussi pénalisés par les paiements par cartes à cause des commissions bancaires.

Il n’y a pas de solutions, donc ?

Il y en a toujours une. Vous savez, à Maurice, le système de santé est gratuit. Donc, l’État est en concurrence directe avec les pharmacies. Maintenant, limiter notre marge de profit équivaudrait, encore une fois, à rendre notre situation plus difficile. Mais je ne dis pas que la population doit payer les pots cassés, je dis simplement que le système doit être revu.

Que proposez-vous comme amélioration ?

Déjà, le service public doit être amélioré. Prenons l’exemple des dialysés. Souvent, les médicaments sont en rupture de stock à l’hôpital et les patients sont contraints de se tourner vers le privé. Mais là, c’est clairement le gouvernement qui doit assumer ses responsabilités. Ce n’est pas à nous de pallier le problème public. Maintenant, si l’État ne peut pas subvenir aux besoins des patients, il peut sous-traiter. Les patients viennent récupérer leurs médicaments dans les pharmacies, et nous sommes compensés. Personne n’est pénalisé.

Ou encore, pourquoi ne pas mettre en place un système similaire à celui des pays où le système de regressive mark up existe ? C’est-à-dire, l’État rembourse les dépenses en médicaments du patient à une certaine hauteur et selon les revenus. Le consommateur sera soulagé et l’État aura rempli ses fonctions. Puis, il faut aussi qu’il y ait un meilleur contrôle des prix à la source par le ministère du Commerce pour éviter les erreurs.

L’autre solution proposée a été la vente de génériques à moins cher…

Je suis tout à fait d’accord, mais là, on a enfoncé une porte ouverte. Le marché local est inondé de génériques, et je n’exagère pas. Pour certains produits, il y a une dizaine de génériques. Selon notre Code of practice, nous avons le droit de donner un générique à un patient, avec son aval, même si le médecin ne l’a pas prescrit, car tous les médicaments de ce genre sont aussi efficaces que la marque originale. Prenons l’exemple des anti-inflammatoires. Il y a une marque originale, une autre marque moins chère et un troisième avec un prix encore plus faible. Ce qu’il faudrait, c’est peut-être plus de produits, offrant ainsi le choix entre trois prix, et que le client puisse décider de celui qui lui convient.

Pendant que nous sommes sur le sujet, où en est le projet des consultations payantes ?

Comme je l’ai déjà dit, il n’y a rien de décidé ni de mesure qui sera applicable dans le futur proche, mais je tiens à préciser que ce sont des conseils professionnels et qu’il serait dommage de faire de la politique dessus.