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Services financiers: le manque de proactivité à promouvoir la destination déploré
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Services financiers: le manque de proactivité à promouvoir la destination déploré
Renganaden Padayachy a plutôt choisi de renforcer, avec de nombreuses mesures, un acquis dont ce secteur a fait preuve face au Covid-19. Son niveau élevé de résilience lui a permis d’afficher un taux de croissance de 4,2 % pour 2021 alors que la pandémie avait mis presque à genoux tous les autres secteurs de l’économie nationale.
Après avoir demontré que les représentations faites par les acteurs des services financiers regroupés au sein de Mauritius Finance lors des consultations pré-budgétaires ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd, il était pratiquement impossible pour Renganaden Padayachy de ne pas recueillir les notes de satisfaction de ce secteur.
Cependant, la sortie de Maurice de la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), le gendarme de la bonne conduite sur le marché financier des pays de l’Union européenne (UE), était une occasion rêvée pour le ministre des Finances de saisir la balle au bond en mettant tout le paquet sur un vaste programme de promotion avec pour principal message que le secteur mauricien des services financiers est clean aux yeux de la communauté internationale. La présence de Maurice sur la liste grise du GAFI et la liste noire des pays de l’UE et de la Grande Bretagne résulte d’un constat que sa lutte contre le blanchiment de l’argent sale et du financement contre le terrorisme laissait à désirer.
«Au moment où notre secteur entame une nouvelle phase de croissance» souligne Samade Jhummun, Chief Executive Officer (CEO) (photo), «Mauritius Finance s’attendait à des annonces plus proactives sur la promotion du Mauritius International Financial Centre (MIFC), surtout après la sortie de Maurice des listes du Financial Action Task Force et de l’Union Européenne. Le dynamisme est là. Les opportunités aussi. Nous nous attendions à une enveloppe dédiée à la promotion de notre juridiction pour attirer davantage de clients. Nous espérons qu’un partenariat public-privé dans ce sens verra bientôt le jour».
Samade Jhummun n’est certainement pas en train de sous-estimer la portée des mesures prises dans le nouveau budget pour soutenir le développement du secteur mauricien des services financiers. Cependant, il vient d’assister à un phénomène qui se présente comme une sorte d’ironie, alors que Maurice aurait dû se lancer dans un vaste programme de promotion après que sa réputation a été lavée aux yeux de la communauté internationale. On assiste en ce moment à une initiative de la même nature du Rwanda par rapport à son secteur de services financiers, le Kigali International Financial Centre.
Cette instance avait délégué le mois dernier à Maurice, Nick Barigye, Chief Executive Officer, Jean-Marie Kananura, chargé de gérer tout le dossier de relations avec les investisseurs et Shaduri Umatoniwase, d’origine kenyane et chargée de la communication et du marketing de cette organisation pour une mission spécifique que le CEO de cette organisation détaille.
L’objectif est on ne peut plus clair : attirer des compétences et du capital en provenance de Maurice. «N’ayez aucune crainte ou hésitation», a souligné avec force Nick Barigye, «de transférer vos services et vos compétences au Rwanda où c’est en grande demande. Le secteur rwandais des services financiers recèle d’innombrables opportunités pour vous pour vous faire de l’argent. Nous disposons d’un cadre réglementaire qui est transparent et contient tous les éléments pour démontrer son niveau de conformité aux normes internationales. Nous avons des investisseurs qui ont besoin de vos services. Que vous ayez des compétences reconnues en tant que gestionnaires de fonds d’investissement, gestionnaires d’actifs des fonds d’investissement, de pourvoyeurs en matière de services destinés à des fonds de placement entre autres, le centre de services financiers du Rwanda a besoin de vous. Venez au Rwanda car il s’agit d’une plateforme qui est complémentaire à celle de Maurice. Nous organisons vers le 21 juin, un Business Forum à Kigali. Nous souhaitons vivement y voir de nombreux hommes d’affaires en provenance de Maurice». Mieux, le Rwanda voudrait être un relais pour les détenteurs de capitaux désireux de tirer profit des opportunités que leur offrent les secteurs financiers existants et à venir du continent.
On est alors en mesure de situer dans son contexte, la satisfaction affichée par Shahed Hoolash, président du conseil d’administration de Mauritius Finance par rapport aux mesures relatives à l’emploi dans le secteur des services financiers. «Mauritius Finance», dit-il, «accueille avec satisfaction le fait que le budget 2022-23 a répondu à l’une des principales attentes du secteur financier concernant l’emploi. La question de main-d’oeuvre occupe une place centrale sur la liste des propositions faites au ministre des Finances lors des consultations pré-budgétaires. Notre requête a été prise en compte à travers plusieurs mesures liées à l’emploi et la formation.»
Ce sont entre autres :
● l’octroi d’une «prime à l’emploi» mensuelle ayant pour principal objectif de convaincre un plus grand nombre de jeunes à se joindre au secteur des services financiers. Les bénéficiaires obtiendront une allocation mensuelle de Rs 15 000 durant leur première année d’insertion en entreprise.
● l’augmentation du montant des allocations mensuelles accordées dans le cadre des dispositions du National Skills Development Programme et du Graduate Training for Employment Scheme ;
● le prolongement à deux ans de la durée des stages payants en entreprise à l’intention des femmes qui souhaitent réintégrer le monde du travail ;
● la prise en main par le Financial Services Institute (FSI), organisme de formation pour les besoins des services financiers, de la remise des diplômes de l’enseignement supérieur. «Nous espérons toutefois que ces formations seront gratuites, comme c’est le cas dans les institutions tertiaires publiques, afin d’attirer le plus grand nombre possible d’étudiants», ajoute Shahed Hoolash ;
● la décision d’aligner le cadre législatif gouvernant les entreprises locales à celles qui évoluent dans le Global Business. Mauritius Finance s’attend que cette initiative soit suivie de l’institution d’un comité conjoint réunissant les membres du secteur public, les représentants de l’organisme régulateur qu’est la FSC et les opérateurs des services financiers pour définir la mise en application de cette mesure;
● l’amendement aux articles de l’Income Tax Act pour permettre l’introduction d’une disposition relative à un impôt supplémentaire minimal pour s’assurer que les multinationales fortes d’un chiffre d’affaires de quelque 750 millions d’euros ou plus et qui opèrent à l’international soient taxées à un taux minimal de 15%. Mauritius Finance attend la circulation du Finance Bill afin d’évaluer l’impact de cette mesure sur la juridiction. «Toutes ces mesures», insiste le président du conseil d’administration de Mauritius Finance, «aideront le secteur des services financiers à soutenir la croissance».
Si du point de vue de Mauritius Finance, le budget aurait dû avoir misé aussi sur une vaste campagne de promotion, Renganaden Padayachy a retenu la démonstration de la solidité de la résilience dont le secteur des services financiers a fait preuve pendant la pandémie avec un taux de croissance de 4,2 % en 2021. Sa priorit : poursuivre sur cette lancée, d’autant plus que la destination ne porte plus sur son dos l’épineux problème de sa présence sur des listes peu recommandables du GAFI, de l’UE et du Royaume-Uni. La liste de mesures envisagées pour y parvenir comprend entre autres :
● le lancement conjoint entre la Banque de Maurice et la Bank of China cette année du centre régional de compensation du Renminbi (la devise chinoise);
● le feu vert de la Banque centrale en partenariat avec la National Payments Corporation of India, pour l’émission de cartes RuPay et de QR codes indiens à Maurice;
● l’introduction d’une National Payment Card ;
● la réorganisation de la structure actuelle de la Financial Services Commission (FSC), organisme régulateur des services financiers afin de permettre aux compagnies de réassurance de s’installer à Maurice;
● la poursuite de la politique de réformes dans le secteur des services financiers avec un projet de rationaliser dans le cadre d’un régime unique, les différentes structures domestiques et internationales ;
● l’introduction d’un impôt complémentaire national minimal pour s’assurer que les sociétés résidentes des grandes multinationales soient imposées à un taux minimum de 15 %. Cela démontre la volonté du gouvernement de lutter contre des délits financiers susceptibles de s’effectuer par le biais de l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices;
● l’émission d’un nouveau produit financier , l’Emerald Jubilee Bond qui est une obligation d’une durée de vie de cinq ans assortie d’un taux d’intérêt de 4 % pour marquer le 55e anniversaire de la création de la Banque de Maurice;
● la décision de conférer au Financial Services Institute, le droit exclusif de décerner les diplômes qui sanctionnent la réussite de candidats engagés dans un programme de formation spécialisée pour le secteur;
● le renouvellement par la Banque de Maurice et la FSC du programme de formation d’une durée d’un an et dont le but consiste à doter les bénéficiaires des compétences pour améliorer leurs compétences en lutte contre le blanchiment de l’argent sale. Une mesure qui permettra à une centaine de diplômés de percevoir une allocation mensuelle de Rs 15 000.
● la mise sur pied de la Financial Crime Commission afin d’assurer une coordination efficace au niveau de la lutte contre les crimes financiers.
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