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Pannes techniques successives: Les ATR d’Air Mauritius rouillés
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Pannes techniques successives: Les ATR d’Air Mauritius rouillés
Des pannes techniques encore et toujours pour les ATR-72 d’Air Mauritius (MK). C’est ce qui explique l’annulation, le retard ou autres perturbations des vols vers Rodrigues et La Réunion depuis quelque temps. Tout a été activé à MK toutefois pour s’assurer que le vol aller du Premier ministre Pravind Jugnauth vers Rodrigues sur ce même type d’avion, dimanche, et son vol retour, jeudi, se déroulent sans anicroche.
Le fait demeure qu’un seul des trois ATR-72 de la flotte de MK est actuellement fonctionnel. Le deuxième est en maintenance et le troisième cloué au sol en raison de problèmes techniques. D’ailleurs, la majeure partie du temps, c’est la raison générique brandie par MK pour expliquer le retard ou l’annulation d’un vol.
Sauf que ce qui se passe avec les ATR-72 de MK semble bien plus préoccupant à en croire des lanceurs d’alerte au sein de la compagnie. Il y va cette fois de la sécurité des passagers. D’autant qu’à la veille de la période de pointe, les réservations pour Rodrigues tout comme pour la Réunion explosent chez MK.
Dans un courriel adressé à la rédaction de l’express en fin de semaine, l’auteur affirme vouloir attirer l’attention des passagers, de la direction, des directeurs, des actionnaires de MK et des autorités sur l’état des avions du transporteur national qui desservent Rodrigues et La Réunion.
«Ces ATR sont dans un très mauvais état structurel. A l’heure où j’écris ces lignes, l’ATR immatriculé 3B-NBN subit un contrôle de maintenance lourd, appelé C-Check. Lors de ces contrôles, l’avion est entièrement démonté, ce qui permet aux ingénieurs de MK d’inspecter la structure de l’avion et ses différents composants. Si tout est considéré comme sûr, les ingénieurs réassemblent alors l’avion. Ce processus peut facilement prendre un mois, nos ingénieurs travaillant jour et nuit sans interruption. Une fois l’avion réassemblé, les pilotes effectuent des vols d’essai pour s’assurer qu’il peut transporter des passagers.»
Or, poursuit-il, lors de l’examen de l’ATR 3B-NBN, des ingénieurs ont trouvé de nombreux et divers problèmes relatifs à l’intégrité structurelle de l’avion. Le problème le plus alarmant découvert était la corrosion, ce qui signifie qu’il y a eu une détérioration du matériau dont est fait l’avion.
Renouvellement de la flotte rouillée
Si l’auteur concède que la corrosion d’un avion est inévitable avec le temps, il est toutefois d’avis que ceci doit être géré comme il se doit, avec, à terme, le renouvellement de la flotte rouillée.
Il fait aussi ressortir que ce n’est pas la première fois que les ATR de MK sont confrontés à la corrosion et que les trois appareils sont concernés à différents endroits de leur fuselage. C’est d’ailleurs ce qui a été découvert sur un ATR il y a quelques jours. Et c’est la raison derrière les vols retardés.
«Vous ne pouvez pas continuer à réparer la corrosion», fait valoir le lanceur d’alerte qui se dit également inquiet pour les pilotes qui volent sur ces ATR. «S’ils savaient combien de corrosion ces avions contiennent, ils ne voleraient jamais. Ce n’est tout simplement pas sûr», écrit-il.
Avec l’été qui pointe déjà le bout de son nez, la situation pourrait se corser car «c’est la saison où ces ATR volent principalement dans des nuages turbulents où la structure d’un avion subit de fortes contraintes qui peuvent être catastrophiques pour les avions souffrant de corrosion».
Le souci c’est que les ingénieurs font de leur mieux pour réparer ce qu’ils peuvent mais parfois, en raison des besoins opérationnels et de la pression, ces avions volent encore avec des problèmes techniques partiellement non résolus.
Son appel aux autorités est qu’il est devenu urgent de commander de nouveaux ATR et, pour conclure, il invite le département de l’aviation civile à effectuer une inspection de ces appareils et à partager son opinion sur la question.
Sollicité, un préposé officiel de MK réplique que la sécurité des passagers reste la priorité absolue de la compagnie aérienne. «Si un avion a un problème, il faut prendre le temps que cela demande pour le régler car il s’agit avant tout de la sécurité des passagers et de l’équipage. C’est de la mécanique et ce sont des choses qui arrivent. C’est malheureux mais nous avons une équipe d’ingénieurs très compétents qui font leur travail pour remettre l’appareil en marche. A chaque fois qu’il a y des problèmes techniques, on fait tout pour résoudre le problème. Pour ce qui des C-Check des avions, c’est un exercice obligatoire et c’est un travail gigantesque qui peut prendre des semaines», dit-il.
Eric Pierre, président de la Licensed Aircraft Engineers Association: «Avec le covid, ces avions sont restés au sol pendant plus d’un an»
Le président du syndicat des ingénieurs d’Air Mauritius, Eric Pierre, souligne que les ATR n’ont pas volé pendant plus d’un an durant la pandémie. «Ces avions sont restés au sol pendant longtemps et même les constructeurs ne pouvaient pas prévoir une telle situation. Ce sont des situations inattendues et par la suite après le lockdown, commander des pièces de l’extérieur était assez compliqué», soutient-il. Et de poursuivre que bien que les ATR n’assurent que des vols régionaux, ces appareils volent beaucoup et sont surtout exposés à l’air salin. «C’est un aspect que nous ne pouvons négliger car ces conditions affectent l’état d’un avion à la longue. Ce qui explique pourquoi les ATR ont pris la rouille.» Eric Pierre fait ressortir que bien que les ingénieurs soient là pour faire leur travail et soient très impliqués dans la maintenance des avions, le manque de main-d’oeuvre commence à peser lourd dans la balance. «Il y a 30 ingénieurs pour la section avionics et 34 pour celle de mecanics. L’on compte uniquement cinq ingénieurs sur les ATR. Ce qui est peu. Une rencontre avec les parties prenantes s’impose pour voir comment remédier à ce problème.»
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