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Judiciaire: l’ancienne Cour suprême frappée par la vieillesse et l’oubli

21 octobre 2022, 18:00

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Judiciaire: l’ancienne Cour suprême frappée par la vieillesse et l’oubli

Les travaux de rénovation annoncés par le ministère des Infrastructures Publiques il y a deux ans n’ont toujours pas été entrepris. Le bâtiment abritant l’ancienne Cour suprême continue de subir les ravages du temps.

L’ ancienne Cour suprême, située à la rue Pope Hennessy, date de la colonisation française. Le 7 septembre 2020, la New Court House, un immeuble dernier cri, devenait opérationnelle à la rue Lislet Geoffrey. Un pan d’histoire venait de s’achever. Deux ans après, l’état du bâtiment abritant l’ancienne Cour suprême, considéré comme héritage national, suscite un sentiment de désolation. Cela fait deux ans, en effet, que le ministère des Infrastructures Publiques annonce des travaux de rénovation pour sauver cette infrastructure de l’usure du temps et de l’abandon. Avec la disparition de plusieurs objets qui s’y trouvaient et la dégradation des structures, l’avenir paraît bien sombre.

Ce bâtiment à l’architecture historique, orné de boiseries en bois massif, n’est plus aujourd’hui qu’un endroit désert et maussade depuis que les départements de la plus haute instance judiciaire ont pris leurs nouveaux quartiers. L’ancienne Cour suprême date de 1870, du temps de la colonisation française. Elle était à cette époque connue comme le Conseil supérieur de l’Isle-de-France. Avec la colonisation britannique qui a suivi, elle a pris le nom de «Supreme Court of Mauritius» en 1850. Ses années de gloire ont vu défiler hommes de loi, criminels, plaignants et défendeurs.

L’ancienne Cour suprême grouillait de monde et chacune des personnes qui lui donnaient vie portait sa propre histoire. Il y a eu des joies, pour avoir été blanchi de toutes accusations, mais aussi des larmes, de voir un proche condamné à la servitude pénale ou perdre un procès, ou encore une chose qui lui était chère.

«Pou sanze la»

Désormais, l’ancienne Cour suprême est restreinte en termes de fonctionnalité car seul le bureau des huissiers y opère en attendant qu’une décision ne soit prise. Sur une base hebdomadaire, les cours numéros 1 et 2 de l’ancienne Cour suprême résonnent durant les audiences de la Commission d’enquête sur Betamax. Les autres jours, le public et les hommes de loi regardent avec tristesse les cadenas sur les portes des salles d’audience et des bureaux.

Depuis l’année dernière, le ministère des Infrastructures Publiques annonce des travaux de rénovation afin de préserver ce patrimoine national. L’idée était aussi que l’ancienne Cour suprême puisse abriter une Cour d’appel séparée. Une suggestion qui n’a toujours pas été examinée en profondeur. Les préposés chargés de maintenir les lieux propres gardent toujours espoir qu’ils retrouveront leurs moments de gloire. «Nou pe netoye la. Nou pe bizin met lord partou paski MPI pou fer renovasyon la. Zot pou kumans travay et partou pou sanze», disent-ils. Un refrain qu’ils ne se lassent pas de chanter depuis deux ans. Les préposés continuent à faire de leur mieux tous les jours pour entretenir cet espace bien que les plantes aient commencé à perdre leur beauté et que l’accumulation des débris accapare de plus en plus de place.

Une seconde vie

En attendant que le ministère des Infrastructures Publiques ne se décide enfin à venir à la rescousse de l’ancienne Cour suprême, les dégâts ne sont pas négligeables. Restaurer cet établissement public important devient une priorité. La plupart des murs, plafonds et sols sont très dégradés et s’effritent. La toiture présente des trous en plusieurs endroits, conduisant à des infiltrations et intrusions de volatiles. Outre la détérioration de l’immeuble, des objets aussi disparaissent. Des vols de climatiseurs et autres objets de bureau ont été signalés.

Les membres de la profession légale déplorent la lenteur administrative plombant la prise de décision et l’enclenchement des travaux. «Il faut une nouvelle dynamique et des décisions fermes pour donner la chance à l’ancienne Cour de vivre une seconde vie. Il y a un comité au bureau de l’Attorney General qui se penche sur ce dossier depuis deux ans. Zéro résultats», disent-ils. Les avocats font allusion à certaines Cours de district tombées dans l’oubli avec le temps et aujourd’hui dans un état de délabrement total car les décisions ont tardé à être prises. Pourquoi, poursuivent-ils, faut-il attendre que le bâtiment tombe en ruines pour débuter les travaux ? Il est hors de question, soutiennentils, de laisser un tel bâtiment, un tel symbole du judiciaire, à l’abandon.