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Hausse du tarif d’électricité: une mauvaise gestion qui va nous coûter cher

19 décembre 2022, 18:00

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Hausse du tarif d’électricité: une mauvaise gestion qui va nous coûter cher

Cette augmentation aurait-elle pu être évitée ? Oui, selon plusieurs voix autorisées car il y a à peine quelques années, le CEB avait des réserves de Rs 7,6 milliards qui ont été «dilapidées» au profit du gouvernement. Et c’est la population qui va devoir en payer les frais.

Manque de planning et mauvaise gestion. Ils sont nombreux à croire que ce sont les principales raisons qui ont poussé le Central Electricity Board (CEB) à majorer le tarif d’électricité de certaines catégories de ses abonnés. Mais tous les consommateurs, sans distinction, devront mettre la main une nouvelle fois à la poche en raison de l’effet domino que cette hausse va engendrer sur le coût des produits de consommation.

Un ancien haut cadre du CEB admet que les combustibles, notamment le charbon utilisé pour faire rouler les turbines de certaines centrales électriques, coûtent beaucoup plus cher en raison de la guerre en Ukraine et de la grosse demande en Europe. Le charbon que le CEB payait entre 70 et 90 dollars la tonne autrefois se commercialise désormais entre 250 et 280 dollars la tonne. Il n’est pas prévu que son prix baissera pendant les prochains mois en raison de la grande demande de ce combustible en Europe en cette période hivernale. Plusieurs pays ont démarré leurs centrales à charbon.

En dépit du coût du charbon, estime l’ancien haut cadre du CEB, les abonnés auraient pu être épargnés par cette hausse en pleine période difficile. «La population n’a pas vraiment profité quand les sources de combustion n’étaient pas chères. La hausse annoncée vendredi aurait pu être évitée si le CEB avait su gérer son argent amassé pendant des années, quand le charbon et l’huile lourde n’étaient pas chers. Avec cette hausse du tarif d’électricité, le CEB doit obtenir entre Rs 700 millions et Rs 800 millions mensuellement auprès des abonnés concernés», explique-t-il.

Lors d’une conférence de presse vendredi, le ministre de l’Énergie, Joe Lesjongard, a expliqué que cette hausse soulagera le CEB qui a un déficit qui avoisine les Rs 2,5 milliards. Selon nos sources, le déficit est plus proche de Rs 3 milliards.

Le CEB n’aurait pas dû être déficitaire. C’est l’avis de l’ancien haut cadre de l’organisme, tout comme celui de Patrick Assirvaden, ancien président du conseil d’administration du CEB et député à l’Assemblée nationale. Le dernier rapport annuel du CEB faisait mention de réserves de Rs 7,6 milliards dans ses comptes. Cet argent, disent-ils, a été mal utilisé par la direction du CEB et le gouvernement. La création des trois compagnies par le CEB, nommément CEB Facilities Ltd, CEB Fiber Net Ltd et CEB Green Energy Ltd, en 2017, ont absorbé une grosse somme d’argent, mais elles n’ont pas rapporté de gros revenus au CEB. Celui-ci a plutôt injecté Rs 1,2 milliard dans ces trois filiales entre 2015 et 2020.

De plus, une somme de Rs 3 milliards a été transférée au Consoldidated Fund également, afin de permettre au gouvernement de balancer le budget national. Le député du PTr se permet de poser la question à Joe Lesjongard et à son prédécesseur, Ivan Collendavelloo. «Où est-ce que les Rs 7,6 milliards qui étaient dans la caisse du CEB sont parties ? Qu’ils nous l’expliquent», insiste Patrick Assirvaden.

Par ailleurs, avant même que le ministre Joe Lesjongard n’annonce la mauvaise nouvelle vendredi, l’ancien député Bashir Jahangeer, désormais membre du Reform Party, avait prévu cette hausse lors d’une conférence de presse mercredi. Il a analysé les arguments du ministre pendant le week-end et il maintient que cette hausse est injustifiée. «Une bonne planification aurait pu éviter cette hausse qui aura un effet domino pour les consommateurs. Le CEB est dans cette mauvaise situation en raison de sa dépendance de l’électricité produite par les producteurs indépendants. D’après mes renseignements, les moteurs des centrales du privé roulent uniquement avec du charbon en cette période, au lieu d’alterner avec la bagasse», maintient-il. L’ancien haut cadre du CEB a pratiquement la même information. Les producteurs indépendants fonctionnent à 100 % de leur capacité en cette période, mais n’utilisent que 8 % de la bagasse au lieu de 14 % comme cela a été le cas auparavant, précise-t-il. Or, d’après l’accord entre les deux parties, le CEB doit payer le charbon utilisé par deux producteurs indépendants, sauf dans le cas de Terragen, qui achetait son charbon. D’ailleurs, c’est pour cette raison que cette centrale thermique ne produit plus d’électricité pour le CEB.

Bien que Terragen ne fournisse pas d’électricité d’une puissance de 70 MW au CEB, le ministre Joe Lesjongard n’a cessé de répéter que cela n’aura aucun impact sur la fourniture au public, expliquant que le CEB a le moyen de répondre à la demande nationale. Toutefois, il y a une crainte chez les spécialistes. Avec la rentrée économique en janvier couplée à la période chaude des deux premiers mois de l’année, le CEB pourra faire tourner ses moteurs de la route Nicolay, à Port-Louis. Cependant, ces turbines carburent au kérosène d’avion, un combustible qui coûte très cher. «Le CEB devra dépenser encore plus d’argent s’il doit les faire tourner pendant une journée», rappelle l’ancien haut cadre du CEB.

Bashir Jahangeer ajoute que l’accord avec les producteurs indépendants oblige le CEB à dépenser énormément, surtout dans un contexte où le charbon se vend de plus en plus cher. La solution aurait été la construction d’une nouvelle centrale électrique afin d’être indépendant des producteurs du privé qui roulent au charbon hors de la période de coupe. «Le gouvernement a trop tardé pour construire une nouvelle centrale thermique. Le projet d’une centrale à gaz à Port-Louis aurait dû se réaliser depuis longtemps. Dommage, il y a eu des magouilles quand il fallait allouer le contrat», déplore-t-il. L’ancien député qui est également ingénieur a eu vent que des cadres du CEB sont pour la construction d’une centrale de 40 MW, à Fort-George, utilisant du diesel comme une solution à court terme, mais il n’y a eu aucune décision politique pour réaliser ce projet. «Cette centrale aurait pu être construite en six mois. Le diesel est moins cher que le charbon. Il y a déjà de la place, mais il n’y a eu aucune décision. Les écologistes allaient dire que c’est polluant, mais ils doivent savoir que les fermes photovoltaïques ne peuvent pas fournir de l’électricité la nuit et en période cyclonique», dit-il.