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Naufrage du «Yu Feng» - St-Brandon: chronique d’une pollution annoncée?

18 janvier 2023, 22:00

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Naufrage du «Yu Feng» - St-Brandon: chronique d’une pollution annoncée?

La situation semble hors de contrôle à Saint-Brandon. En effet, en fin de semaine le gouvernement a décidé de résilier le contrat de la société de salvage sud-africaine, Bridge Maritime Ltd. Quant au remorqueur dépêché sur le site du naufrage, il est en route vers Mombasa, Kenya. Du coup, qu’adviendra-t-il du Yu Feng, bateau de pêche battant pavillon taïwanais, drossé sur les récifs depuis le 5 décembre ? Silence total du côté des autorités. Ceux contactés n’ont pas voulu s’aventurer en se renvoyant la balle.

Si le National Disaster Risk Reduction and Management Centre nous a renvoyé vers le ministère de la Pêche et des Affaires maritimes, ce dernier en a fait de même, ajoutant que c’est au niveau high level. Cela s’entend que tout est canalisé vers le bureau du Premier ministre et que c’est le Prime Minister’s Office qui communiquera.

Du coup, plusieurs questions restent en suspens, notamment l’épave ne constitue-t-il pas un gros risque pour l’environnement ? Le bateau ne finira-t-il pas par se fracasser sur les récifs, se disloquer et causer une pollution ? Car actuellement il n’y a aucun remorqueur sur le site pour le stabiliser. Certes, la pollution ne sera pas de la même ampleur que celle causée par le défunt MV Wakashio.

Les cales du bateau de pêche contiennent 70 tonnes de diesel et 208 litres de lubrifiants et les opérations de pompage n’ont jamais eu lieu. D’aucuns se demandent combien le gouvernement a dépensé pour recruter la salvage team. La question reste posée.

«Des bateaux font naufrage à St-Brandon, 99 % des gens ne s’en soucient guère. C’est loin des yeux du GM, des Mauriciens, ils ne vont pas mettre la pression.»

Autre question qui mériterait une réponse : le gouvernement a-t-il refusé l’aide de La Réunion dès le départ ? Ou encore l’équipage aurait-il fait volontairement naufrage car depuis deux mois il n’aurait pas été payé par l’armateur qui l’aurait laissé tomber ? «Qui viendra dire qu’ils ont fait naufrage volontairement ? Il n’y a pas de grande volonté de venir expliquer ce qui se passe», s’insurge Alain Langlois. Parlant de la résiliation du contrat de la salvage team, l’ancien General Manager de St-Brandon est très critique envers les autorités. Selon lui, elles n’ont aucune notion de la complexité des opérations. «L’est de Saint-Brandon est exposé aux vents latéraux. (…) Quand on nomme un salvage master, on est obligé d’évaluer les risques. Le salvage master va le faire uniquement si la météo est clémente. Il y a toute une logistique à mettre en place et c’est normal que les chiffres vont gonfler», analyse-t-il.

Selon lui, il est possible d’enlever le bateau en été. «Le temps est bien meilleur que l’hiver. Pendant la période cyclonique, le temps se gâte environ quatre jours, après cela devient calme. Ce sont les perturbations qui empêchent le travail, alors qu’en hiver, on a des houles de trois mètres. On peut faire un salvage en décembre là-bas.» Mais des dépressions tropicales s’annoncent...

Quid d’un dégât environnemental dans l’archipel ? Si, selon Alain Langlois, le problème est moindre car le diesel est moins polluant ; toute catastrophe qui détruit les récifs a une conséquence directe sur l’écologie. Comment diminuer la pollution alors ? «Mettre le feu. Le bateau se détériorera plus vite.»

Alain Langlois explique que le Yu Feng est exposé aux houles et aux vents du sud-est. «Le bateau va se cogner sur les récifs. Pour le retirer des récifs, cela va coûter des sommes colossales. Est-ce que le gouvernement est d’accord pour mettre de l’argent ?» lance celui qui a à cœur Saint-Brandon. Pour Alain Langlois, les autorités ne s’intéressent pas à l’archipel.

«Des bateaux font naufrage à Saint-Brandon, 99 % des gens ne s’en soucient guère. C’est loin des yeux du gouvernement, des Mauriciens, ils ne vont pas mettre la pression. Ceux qui ont à cœur l’écologie sont indignés. Le bateau restera sur les récifs comme beaucoup d’autres. À un moment donné quelqu’un mettra le feu pour protéger l’environnement.» Il fait un parallèle avec le FV Kha Yang, palangrier malaisien qui s’est échoué à Saint-Brandon le 31 janvier 2015. «Personne ne parle de ce bateau qui est toujours là-bas», déplore-t-il.

Le Fu Yeng sera-t-il incendié au final ? L’épave restera-t-elle sur place ou sera-t-elle remorquée vers le large pour être ensuite coulée ? À quand une conférence de presse pour nous expliquer tout cela ?