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Turbulences en plein vol: le destin brisé de Nalini...
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Turbulences en plein vol: le destin brisé de Nalini...
C’est le 31 juillet 1992 que la vie de Nalini Ramasamy, 26 ans alors, a basculé. Hôtesse de l’air pour la compagnie Air Mauritius, la jeune femme était sur un Boeing 767 en direction de Francfort, en Allemagne, quand l’appareil est passé par des turbulences en plein vol. Grièvement blessée, elle est à jamais marquée des de cet incident...
L’incident de Condor Airlines la semaine dernière, faisant 17 blessés quand l’avion est passé par de violentes turbulences en plein vol, ravive bien des souvenirs. Parmi, la tragédie qu’a vécu Nalini Ramasamy, aujourd’hui âgée de 57 ans. Elle n’avait que 26 ans lorsqu’elle a fait face au drame de sa vie. Hôtesse de l’air depuis quatre ans à Air Mauritius, la jeune femme pétillante avait entrepris un vol pour Francfort, le 31 juillet 1992, dans le cadre de son travail. «Alors qu’on était à 45 minutes de l’atterrissage, nous avons connu des turbulences en raison du mauvais temps. Je travaillais à l’arrière de l’avion dans la cuisine et, quand j’ai entendu ‘cabin crew to your station immediately’, il était trop tard pour moi», se remémore notre interlocutrice.
Elle était sur un siège à l’arrière, étant prise de court, alors que son siège initial était complètement à l’avant. L’avion a perdu 8 000 pieds d’altitude en quelques secondes seulement et Nalini Ramasamy a été projetée hors de son siège. «Ma tête a cogné contre le plafond de l’avion ; je suis retombée, mais mon siège s’était rétracté. Je suis tombée sur un coin du siège, puis projetée une nouvelle fois à gauche. Malheureusement, ma colonne vertébrale a été touchée.» Lors de cet incident, il y a eu pas moins de cinq membres du personnel blessés, dont une hôtesse de l’air allemande qui était enceinte et qui a perdu son bébé. Selon les souvenirs de Nalini, il y a aussi un autre de ses collègues qui a eu une grave blessure à la tête.
C’était la panique à bord de l’avion. Un passager, dit-elle, ayant vu qu’il y avait des blessés, est allé alerter le chef de cabine à quatre pattes. Lorsque ce dernier s’est rendu à l’arrière avec deux autres membres du personnel, c’était l’horreur. Nalini Ramasamy a alors été héliportée vers l’hôpital, après son atterrissage à Francfort, où elle a été prise en charge très rapidement. Elle a subi une première opération dans les trois heures suivant l’incident. Puis, elle a subi une greffe, 18 jours plus tard.
Par la suite, elle a été transférée vers un centre de réhabilitation pendant cinq mois où elle a appris à vivre avec son handicap. Puis, elle a été transférée en Angleterre pour sa réhabilitation. Ce n’est que neuf mois après son accident qu’elle a regagné Maurice. Entretemps, son père avait fait le voyage Maurice-Allemagne à deux reprises; Nalini Ramasamy a pu compter sur le soutien de ses collègues qui se sont rendus à son chevet chaque jour de son hospitalisation. «Des Mauriciens qui étaient aussi en Allemagne m’ont prise sous leur aile. J’ai vu une solidarité sans faille.»
Nalini Ramasamy confie qu’elle a été très secouée par cet incident. Ayant une petite sœur handicapée, elle ne voulait pas être un fardeau pour ses parents. «Les médecins m’avaient dit que je n’allais jamais pouvoir remarcher. J’ai beaucoup pleuré mais je me suis battue pour être le plus autonome possible. Et je l’ai fait. Ils m’appelaient d’ailleurs l’enfant miracle.» Aujourd’hui, bien que Nalini marche en permanence avec une canne et vit avec une douleur atroce en continue, elle conduit sa voiture et est tout à fait indépendante.
À son retour à Maurice, elle est appelée à travailler dans un bureau de la compagnie trois fois par semaine, mais elle sentait qu’elle n’y avait pas sa place. Elle a même fait face à des remarques méchantes, désobligeantes, explique-t-elle. «J’ai aussi subi plusieurs remarques venant du higher management de l’époque, où ils me disaient que j’avais fait un énorme trou dans leur budget. Ou encore que je n’étais que psychologiquement ‘débalancée’. Je n’ai pas reçu un grand soutien de mon employeur.» Après cinq ans et demi, elle obtient un dédommagement financier. Mais, selon elle, ce dernier ne vaut plus rien aujourd’hui. «On m’avait aussi parlé de billet gratuit pour mes check-up annuels, mais je débourse chaque année cette somme de ma poche.»
En 1998, elle est accueillie par l’Air Mauritius Cabin Crew Association (AMCCA) où elle travaille trois fois par semaine, jusqu’à ce jour, dans l’administration. Malgré cette dure épreuve de la vie, Nalini Ramasamy ne se plaint pas. «Kapav ti dan mo destin sa ; sé la vi.» D’ailleurs, Nalini a su faire de cet incident une bataille car elle est aussi très active pour la cause des handicapés.
L’AMCCA déplore les conditions de travail...
L’AMCCA déplore encore une fois les conditions de travail de ses membres. Selon ces derniers, il y a un message à faire passer après l’incident de Condor Airlines. Ils disent faire face à beaucoup de risques dans l’exercice de leurs fonctions et que, de ce fait, ils doivent être revalorisés par leur compagnie. «Après les nouveaux ajustements suite au Covid-19, nous sommes démotivés. Comment assurer la sécurité et le service quand nous faisons notre travail à contre-cœur ?», se demandent-ils.
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