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Air Mauritius: après la braderie «dipin diber», opération «asté avion nef»
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Air Mauritius: après la braderie «dipin diber», opération «asté avion nef»
MK a commandé trois nouveaux A350-900. Or, en pleine administration volontaire d’avril 2020 à septembre 2021, les administrateurs Sattar Hajee Abdoula et Arvindsingh Gokhool ont bradé des A319 et des A340, dont certains remis à neuf à coups de millions de roupies, pour le montant «dérisoire» de Rs 273 millions. Pourquoi vendre pour acheter à nouveau? Le point.
La commande : l’achat de trois A350 dernière génération
Sept. C’est le nombre d’A350-900 que comptera la flotte de MK au troisième trimestre de 2026 avec cette nouvelle acquisition d’aéronefs dernière génération. La flotte actuelle comprend donc quatre A350, deux A330-900neo et un A330-200. Un second A330-200 est attendu en août prochain.
«Les Airbus A350-900 supplémentaires nous aideront à renforcer notre réseau européen et à assurer notre croissance sur d’autres marchés», explique Krešimir Kučko, Chief Executive Officer (CEO) de MK.
Il est prévu que la livraison de ces trois gros-porteurs se fasse entre fin 2025 et le 3e trimestre de 2026. «Depuis 2014, MK était en défaut vis-à-vis d’Airbus. Lors de l’achat de six A350, il y avait un litige avec Airbus pour deux avions. Nous avons pu le résoudre et rétablir la confiance de MK», explique une source officielle au sein du conseil d’administration.
Le coût : Rs 20 milliards
Combien coûteront donc ces trois A350-900 ? Pour rappel en 2017, un tel avion, soit le Pieter Both seul, avait coûté la bagatelle de Rs 10 milliards, prix catalogue. Selon le préposé officiel de MK, la nouvelle commande des trois avions est estimée à Rs 20 milliards. «Moins que le coût en 2014. Nous avons pu négocier le prix à la baisse. Et la 5e génération est nettement meilleure en termes d’efficience et de capacité.»
Quid du financement surtout ? Notre source nous apprend que plusieurs moyens de financement sont toujours à l’étude par MK. Pourtant, la commande est déjà officialisée. «Le board décidera de la meilleure option dans l’intérêt de MK.»
Administration volontaire : avions cédés pour une bouchée de pain
«On a vendu les avions pour dipin diber», avait clamé Xavier-Luc Duval lors d’une conférence de presse de l’entente de l’Espoir, en septembre 2021.
Les deux A319 ont été en fait vendus à Rs 258 millions et les deux A340 ont été liquidés pour Rs 15 millions, ces deux ventes ayant été faites en dollars et non en euros. Ces chiffres figurent également dans «Air Mauritius Enquête sur un atterrissage forcé», livre tout chaud en librairie de Harish Chundunsing, qui, avec cet ouvrage, fait son come-back dans le journalisme d’investigation, peut-on lire en quatrième de couverture.
«Les pertes encourues sur ces deux ventes sont estimées par les spécialistes à Rs 3,3 milliards. Le pourcentage des ventes représente seulement 7,48 % de leur valeur comptable nette. Il faut savoir que, selon les conditions de vente, l’acquéreur des deux A340 allait payer seulement quand il aurait liquidé les deux appareils comme de la vieille ferraille», écrit le journaliste. Sans compter que certains avions avaient été rénovés à coups de millions de roupies.
D’après le rapport des administrateurs et suivant l’évaluation effectuée par Sattar Hajee Abdoula luimême avant la mise sous administration, les deux A319 valaient en euros (pas en USD) 26,6 millions, soit Rs 1,356 milliard (au taux de Rs 51 cité dans le rapport). Les deux A340, eux, valaient, toujours en euros, 46,930 millions, soit Rs 2,393 milliards. Au total donc, ces quatre avions valaient Rs 3,749 milliards.
Pluies d’interrogations
Interrogé hier, Harish Chundunsing s’interroge sur le plan de relance de MK qui «enn sel kou pe fer akizisyon trwa Airbus ? Est-ce que c’est basé sur le rapport de la firme CAPA chargée de préparer un business plan ? Car il faut un plan de faisabilité pour le remboursement. (…) MK doit pouvoir augmenter sa capacité, sa profitabilité, mais il faut savoir quelles sont les projections pour l’avenir afin d’amortir le coût des avions». Son autre interrogation : «Est-ce que c’est basé sur leur bilan financier ?»
En tout cas, du côté de MK, le préposé officiel fait ressortir qu’en 18 mois, la compagnie nationale a réalisé une «bonne performance avec des profits records». Le rapport financier est attendu le 30 juin prochain.
Mic Gujadhur : «MK, un cas d’école pour la Harvard Business School»
Il est catégorique. «On a dépensé des centaines de millions pour deux administrateurs, qui, en outre, mentionnent des frais de consultants et de conseils légaux dans leur facture (voir plus loin). Ils ont bradé des avions comme s’ils se débarrassaient de la vieille ferraille sans un business plan. Maintenant, on décide de faire l’acquisition de trois avions. Il y a ce manque de crédibilité dans ce que fait MK. Il faut qu’elle communique davantage et qu’elle s’explique. En tout cas, MK est un cas d’étude pour la Business School of Management à Harvard ou ailleurs», affirme l’ancien Deputy CEO et directeur des ressources humaines d’Air Mauritius.
Rs 48,5 millions au tandem Hajee Abdoula-Gokhool que l’histoire retiendra
Les honoraires empochés par les «détenteurs du record des administrateurs les plus chers de l’histoire économique de Maurice», Sattar Hajee Abdoula et Arvindsingh Gokhool, pour 16 mois d’administration de MK, resteront gravés dans l’histoire du transporteur aérien national, voire du pays. Dans son livre, Harish Chundunsing rappelle qu’ils ont coûté aux contribuables Rs 48,5 millions, soit Rs 50 500 par jour. Sans compter, les Rs 750 millions de frais administratifs et les Rs 112 millions à l’intention des consultants et conseillers légaux non identifiés. Un total de Rs 910 millions.
Chronologie des achats d’avions
<p><strong>1988 </strong></p>
<p>Deux Boeing 767 ER.</p>
<p><strong>2005 </strong></p>
<p>Trois A340 avaient été commandés par le gouvernement MSM-MMM. À l’arrivée de Navin Ramgoolam au pouvoir, seule la troisième commande a pu être annulée, les deux autres étant déjà à l’assemblage. Sauf que MK fera à la place l’acquisition de deux A330.</p>
<p><strong>2014 </strong></p>
<p>Un protocole d’accord est signé en juillet 2014 lors du salon aéronautique Farnborough, faisant de Maurice le premier pays à conclure une commande ferme d’A350. Le gouvernement travailliste commande donc six Airbus. MK se voit finalement louer deux A350 neufs à une South African Airways déjà en pleine secousse financière. Ces appareils seront finalement repris par Hajee Abdoula et Gokhool durant l’administration.</p>
<p><strong>2017 </strong></p>
<p>Le gouvernement de Pravind Jugnauth rajoute deux A330Neo au coût de Rs 8,8 milliards. «Aapravasi Ghat» et «Chagos Archipelago» sont livrés en 2019. «Les derniers clous dans le cercueil de MK.» Somas Appavou est alors le CEO de MK et ce, jusqu’au 3 mars 2020.</p>
<p align="right">Source : «Air Mauritius - Enquête sur un atterrissage forcé». par Harish Chundunsing</p>
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