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Surveillance maritime: un océan de lacunes

17 juillet 2023, 18:00

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Surveillance maritime: un océan de lacunes

Que ce soit au niveau civil – le Port et le Maritime Rescue Coordination Centre – ou policier – les garde-côtes et l’escadron héliporté –, Maurice, l’insulaire, pèche. Pourtant, notre territoire terrestre souverain total n’est que de 0,0887 %, le reste étant l’océan. Des bateaux qui auraient dû être stoppés dans nos eaux s’échouent sur le littoral réunionnais. Sans compter les naufrages chez nous… Nous attendons encore le rapport sur le «Wakashio»… À l’heure où des logiciels permettent même à des citoyens de suivre le trafic maritime, alors que nous avons des radars – souvent en panne –, des patrouilleurs – parfois indisponibles –, et des hélicoptères, la question du fonctionnement des ressources humaines se pose.

«Trafikan fini koné kan coastguard pa lor lamer»

Un autre bateau de plaisance privé en provenance de Maurice s’est échoué sur la côte de Saint-Benoît à l’île sœur, mardi. Lorsque les gendarmes sont arrivés sur les lieux, il n’y avait personne à bord. Des jerrycans de fioul ont été retrouvés à côté de la vedette.La gendarmerie privilégie un trafic de drogue entre Maurice et La Réunion par voie maritime. Cette énième découverte vient remettre en question les failles du système de surveillance de nos eaux territoriales. 

De quoi disposent les autorités mauriciennes pour contrecarrer les trafiquants de drogue qui utilisent la voie maritime pour transporter des substances illicites ? Quel est le rôle de la National Coast Guard (NCG) ? Une source nous explique que chaque division a un «patrol plan». «Tout d’abord, nous faisons des patrouilles en mer à des fréquences régulières. Mais il est clair que les garde-côtes ne peuvent pas rester en mer toute la journée. Nous patrouillons un peu et après nous rentrons. Trafikan fini koné kan coastguard pa lor lamer», relate notre interlocuteur. 

Y a-t-il complicité entre la NCG et des trafiquants ? «Je ne vous dirai pas qu’il n’y en a pas. Il doit y en avoir qui signalent déjà les heures où les garde-côtes sont en mer. Trafikan la li pou éna so dimounn dan coastguard ki pou koné kan lamer pou lib», poursuit un autre soldat de la mer. Ainsi, il n’y aurait aucun contrôle sur les hors-bords qui font facilement le trajet Maurice-Réunion en deux heures. L’île est dotée de radars de surveillance à Grand-Gaube dans le Nord, à Gris-Gris dans le Sud, à Albion dans l’Ouest, à Pointe-du-Diable dans l’Est, et aux Salines, qui contrôle toute l’île. Les radars des divisions peuvent assurer une surveillance d’un angle allant jusqu’à 120 degrés. Mais ceux qui ne fonctionnent pas n’arrangent pas les choses. 

D’ailleurs, lors du naufrage du vraquier Wakashio, en juillet 2020, c’était le cas du radar de Gris-Gris et le bateau a été repéré par celui de Pointe-du-Diable. Il y a aussi un manque de personnel qualifié (radar operators). «Le naufrage du Wakashio est en partie dû à l’inexpérience et au manque de formation du radar operator. Ce dernier, en apercevant le bateau, aurait dû faire un test call et avertir le capitaine qu’il était déjà à 12 milles nautiques de Maurice et de faire le nécessaire pour réparer son bateau au plus vite. S’il ne pouvait le faire seul, de solliciter l’aide de Maurice», confie un autre membre de la NCG. De plus, la NCG ne contrôle que les bateaux équipés d’un Automatic Identification System (AIS). Ainsi, les bateaux de pêche ou vedettes passent facilement entre les mailles du filet. Même si les bateaux sont équipés d’AIS, s’ils l’éteignent, la NCG n’aura aucun contrôle. 

Le rapport de l’Audit, en mars dernier, a été très critique envers la NCG qui dispose d’une flotte de cinq navires – le CGS Barracuda, le CGS Victory, le CGS Vaillant, CGS Guardian et le CGS Observer. L’efficience de ces navires pour la surveillance de la zone économique exclusive (ZEE) a aussi été évaluée. Il a été constaté que le nombre de navires n’est pas adéquat pour la surveillance de la ZEE. Un navire est resté bloqué pendant plus de deux ans et un autre a des opérations limitées, alors qu’un troisième était en réparation pendant huit mois. Le carénage du CGS Barracuda a été effectué du 8 février au 6 octobre 2021. De ce fait, le bateau était indisponible pendant huit mois. Ce qui a eu un impact sur la capacité de surveillance maritime de la NCG.