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Afsar Ebrahim : « Les PME dépendent trop du soutien de l’Etat »

1 décembre 2010, 11:44

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? Le budget 2011 est-il favorable aux entreprises locales en difficulté ?

Le discours budgétaire du vendredi 19 novembre ne vient pas directement en aide à ces entreprises. Il faut davantage se tourner vers l’Economic Restructuring and Competitiveness Programme, rendu public le 13 août, pour trouver les solutions à leurs problèmes. La redéfinition du rôle de la Banque de développement, qui viendrait offrir des garanties, pourrait aider les entreprises ayant un bon potentiel, mais qui sont à court de fonds.

Ces compagnies pourraient ainsi contracter des emprunts auprès des banques commerciales pour financer leurs projets.

? Les mesures proposées par Pravind Jugnauth aideront-elles à désendetter les entreprises ?

Certaines de ces mesures, ayant trait aux terres, peuvent être interprétées comme une façon de faciliter les compagnies – qui ont un capital foncier – à effectuer des levées de fonds.

? Le secteur touristique est aussi fortement endetté. N’est-il pas plus fragile que les autres piliers économiques, surtout dans un contexte de crise européenne ? Que proposez-vous comme remède ?

Les défis que doit relever l’industrie du tourisme se situent à deux niveaux : celui d’un nombre réduits de clients et au niveau des revenus, qui sont en baisse. Toute entreprise faisant face à de tels soucis devra s’assurer qu’elle opère avec une efficience optimale. Et le contrôle des dépenses devrait être le maître-mot.

Avec la baisse des revenus, la valeur de l’offre devrait être revue.

Cela permettrait de s’assurer que le rendement augmente avec le temps. L’optimisation des bilans doit être évalué sur une base d’équité et non sur la base d’actifs un piège dans lequel tombent de nombreux opérateurs hôteliers. La gestion des fonds de roulement est aussi un élément clé, par les temps qui courent.

La crise peut être mieux gérée si les flux de trésorerie sont bien gérés. Mais il faut d’abord générer de l’argent, ensuite le gérer.

? Il reste quand même l’épineux problème des petites et moyennes entreprises (PME). Ces entrepreneurs souhaitent-ils redresser la barre ou préfèrent-ils se contenter de l’assistance externe ?

Tout dépend de la façon dont nous définissons les PME.

Certaines de nos grandes entreprises sont des PME, si l’on tient compte des normes internationales. Et d’autres sont des microentreprises qui nécessitent un financement proportionnel à leur taille, au lieu des emprunts venant des banques commerciales.

Il existe un écart entre les principales attentes de la PME, qui souhaite être aidée à tous les niveaux. Ces attentes reflètent clairement les caractéristiques d’une économie du tiers monde. En même temps, nos institutions financières, qui sont bien réglementées, opèrent au niveau international. Elles sont vraiment de classe mondiale. Ce décalage créée un déséquilibre important entre les bailleurs de fonds et ceux qui requièrent un financement. Qui plus est, les entreprises ont toujours été tributaires du financement bancaire pour étendre leurs activités.

Aujourd’hui, les PME sont trop dépendantes des banques et du soutien gouvernemental. Il leur manque un encadrement approprié et il faut qu’elles revoient leurs paramètres de gestion.

A la fin de la journée, c’est la vision, le leadership, l’engagement, le dévouement, le travail, la patience et le professionnalisme qui poussent une entreprise vers le succès.

? Combien d’années faudra-t-il aux entreprises pour qu’elles assainissent leurs comptes ?

Tout est tributaire de l’industrie du niveau des liquidités des entreprises. Les sociétés commerciales locales doivent faire face à des défi s différents, comparativement au secteur manufacturier.

Ces entreprises orientées vers l’exportation dépendent d’un marché mondial complexe et déprimant. Idem pour les firmes qui offrent des services financiers.

Par conséquent, nous ne pouvons pas avoir une panacée, ni un délai précis au terme duquel toutes les entreprises se remettront de la crise. En tout cas, elle ne sont pas toutes sujettes au ralentissement économique. Il existe beaucoup de compagnies qui progressent à pas de géant. Nous devons faire preuve de prudence en analysant les données, et éviter de tirer des conclusions générales et hâtives.

? Comment sortir de ce piège qu’est l’endettement ?

L’entreprise en difficulté doit d’abord vérifier si le problème est une question de solvabilité ou de liquidités. Dans le premier cas, il serait inutile de tenter de sauver l’entreprise, sauf si l’insolvabilité découle d’un problème exceptionnel, qui peut être résolu par une mesure tout aussi exceptionnelle – telle que la vente des actifs de l’entreprise ou l’injection de capitaux propres.

Si le problème concerne le niveau de liquidités, la priorité est d’assurer le fonds de roulement, au lieu de maximiser la profitabilité. La première étape serait un apport de capitaux, suivie d’une cession d’actifs non-essentiels aux activités. Il faudrait ensuite financer à nouveaux les dettes garanties pour répondre aux besoins futurs.

La gestion des créances non-garanties sera également critique, tenant compte de la loi sur l’insolvabilité. En outre, les frais d’exploitation devront être considérablement réduits. Il faudra aussi inculquer de la discipline dans la gestion des finances. En même temps, le flux de revenus doit être étroitement surveillé et toute fuite d’argent immédiatement colmatée.

Une fois que le problème de liquidités est abordé avec succès, les résultats rééquilibreront la structure du capital. Tout cela donnera lieu à un bilan sain. A partir de là, l’entreprise pourra se concentrer sur de nouveaux marchés, de nouveaux produits et sur sa stratégie de marketing.
 

Kamlesh BUCKHORY