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Alain Ah-Vee : «Utiliser toutes les armes pour la revendication des Chagos »

14 juin 2012, 08:49

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Alain Ah-Vee commente sa lettre adressée au ministre des Affaires étrangères, Arvin Boolell, au nom de Lalit. Il l’invite à considérer les mouvements anti-nucléaires, soutien non négligeable dans la revendication des Chagos.

Vous avez adressé une lettre au ministre des Affaires étrangères le 6 juin dernier, l’invitant à soutenir le mouvement international pour la «Nuclear Weapon Convention» (NWC), contre les armes nucléaires. Pourquoi cette démarche ?

Les armes nucléaires représentent effectivement un danger pour les êtres humains. Ce n’est pas pour rien qu’on parle d’armes de destruction massive. Des pays en disposent et il faut arrêter l’hypocrisie. Le 2 juin, d’ailleurs, l’International Campaign to Abolish Nuclear Weapons a intensifié son action dans plusieurs pays à travers diverses Organisations non gouvernementales. Plusieurs actions ont, ainsi, été enclenchées pour soutenir ce «forcing». Nous avons maintenant l’occasion de suivre ce mouvement.

Quelle voix Maurice a-t-il à ce chapitre ?

Nous pouvons nous positionner en tant qu’Etat. Maurice est signataire du Traité de Pelindaba (NdlR : Traité pour une zone exempte d’armes nucléaires en Afrique). Si la NWC progresse, cela nous donnera une forme de pression supplémentaire et plus efficace, notamment pour la question des Chagos.

En quoi l’archipel des Chagos est-il concerné par le nucléaire ?

Diego Garcia, en abritant une base militaire, est en contradiction du Traité de Pelindaba, car des sous-marins nucléaires y transitent. Ce traité ne date que de deux ans et n’a ouvert son secrétariat que récemment en Afrique du Sud. Cela dit, ce nouveau mécanisme ouvre la porte à de nouvelles possibilités diplomatiques. Par exemple, on peut espérer le soutien de l’International Atomic Energy Agency pour faire des inspections dans la région et vérifier si les termes du traité sont respectés.

Ces «armes» diplomatiques sont-elles utilisées par l’État mauricien ?

Non, elles ne sont pas utilisées suffisamment. Alors que Navin Ramgoolam rencontrait le Premier ministre britannique, David Cameron, le traité aurait pu servir à faire pencher le rapport de forces dans les négociations pour les Chagos. Nous avons beaucoup de soutien, aussi bien sur le plan régional qu’international, notamment celui des mouvements anti-guerre, au sein même de pays comme les Etats-Unis.

La revendication mauricienne pour la souveraineté des Chagos ne risque-t-elle pas, justement, de nous mettre en fâcheuse posture face aux 27 autres pays signataires ?

Pour éviter cela, nous devons nous positionner clairement dans les négociations concernant trois items. Le premier, que la revendication n’aille pas sans une remise en question de la base militaire. Le deuxième, que cette base soit utilisée pour lancer des attaques sur des pays comme l’Iraq ou l’Afghanistan. Des pays contre lesquels Maurice n’a pas déclaré la guerre et dont le peuple mauricien doit se démarquer. Enfin, la question de réunification du territoire mauricien doit comprendre un calendrier pour le retour des Chagossiens et des Mauriciens sur l’archipel, de même que la fermeture de la base. La responsabilité pour le démantèlement de la base et la réparation des dommages écologiques reviendrait alors aux Etats-Unis et à l’Angleterre.

S’en prendre aux armes nucléaires ou, comme le précise le traité, les «dispositifs nucléaires explosifs», c’est s’en prendre aux grandes puissances mondiales. Pensez-vous vraiment que les pressions de l’opinion internationale changeront la donne ?

Oui. Si 19 000 têtes nucléaires étaient dénombrées par le Stockholm International Peace Research Institute en 2012, il faut rappeler que ce chiffre était de 22 000 en 2011. Ces pressions se renforcent d’année en année et commencent à faire de l’effet car elles sont mieux exprimées et le public connaît davantage les enjeux. L’élimination totale de ces armes reste possible, car les pays sont conscients que celles-ci causent une destruction irréparable. D’où le besoin de conscientiser les générations à venir. Et ces enjeux ne concernent pas que le nucléaire, mais la guerre en général. Et cela se voit quand les pays rappellent leurs soldats.

Propos recueillis par Ludovic AGATHE
(Source : l’express iD, jeudi 14 juin 2012)


 

Ludovic AGATHE