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Américains et Russes négocient à Genève sur la Syrie
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Américains et Russes négocient à Genève sur la Syrie
Le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, est arrivé à Genève jeudi pour prendre connaissance du détail du plan russe pour la Syrie, destiné à éviter des frappes militaires occidentales contre le régime du président Bachar al Assad.
L'initiative de Moscou, allié indéfectible de Damas, a remis la diplomatie au coeur du conflit syrien, qui dure depuis plus de deux ans et demi et a franchi une étape avec l'attaque chimique du 21 août dans la banlieue de Damas imputée par les Occidentaux aux forces gouvernementales.
Le plan russe, qui propose de mettre sous contrôle international l'arsenal chimique syrien en vue de sa destruction, a été accueilli dans les chancelleries avec un scepticisme teinté pour certaines d'appels à la fermeté.
Selon des responsables américains, John Kerry va insister auprès de son homologue russe, Sergueï Lavrov, pour que tout accord oblige Damas à prendre rapidement des mesures pour démontrer son sérieux quant à son renoncement aux armes chimiques.
Les Etats-Unis veulent notamment que le gouvernement syrien fasse publiquement une liste exhaustive des armes chimiques en sa possession avant d'autoriser des inspections et la neutralisation de cet arsenal.
La Syrie, qui nie être impliquée dans les attaques du 21 août, s'est ralliée à la proposition de Moscou. «La Syrie place son arsenal chimique sous contrôle international en raison de la Russie. Les menaces américaines n'ont en rien influé sur sa décision», a affirmé Bachar al Assad dans un entretien à la chaîne de télévision russe Rossiya-24 cité jeudi par l'agence de presse Interfax.
NI ULTIMATUM, NI MENACES
D'après une version publiée par le journal moscovite Kommersant, le plan russe comporte quatre étapes aboutissant à la destruction de l'arsenal chimique. Dans un premier temps, la Syrie adhérerait à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques. Le régime de Damas déclarerait alors la localisation de ses sites de production et de stockage d'armes chimiques puis, dans un troisième temps, autoriserait des inspecteurs de l'OIAC à se rendre sur place. Dans la quatrième phase, la Syrie déciderait «avec les inspecteurs comment et par qui ces armes chimiques seront détruites».
La source citée par Kommersant ne précise pas les modalités de destruction de ces armes mais note qu'il est envisageable que les Etats-Unis et la Russie s'en chargent. Des spécialistes du désarmement et de la non-prolifération doivent du reste participer aux entretiens de Genève.
Toujours d'après Kommersant, si les Etats-Unis acceptent ce plan, le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, l'avalisera alors par une déclaration et une résolution sera soumise au Conseil de sécurité.
Dans l'entourage de John Kerry, on espère que les entretiens avec Sergueï Lavrov permettront de s'accorder sur un plan de désarmement syrien dont les principaux points seraient validés par une résolution du Conseil de sécurité.
Moscou est convaincu que cette résolution «ne doit renfermer ni ultimatum ni menaces de recours à la force» contre Damas, poursuit Kommersant.
Pour un responsable américain qui s'est entretenu, sous le sceau de l'anonymat, avec les médias avant les entretiens Kerry-Lavrov prévus sur au moins deux jours, la rencontre a pour but de «voir si la proposition russe repose ou non sur une réalité».
Dans une tribune libre destinée à l'opinion publique américaine publiée par le New York Times, Vladimir Poutine argumente contre des frappes occidentales qui, selon lui, ne feraient que le jeu des combattants d'Al Qaïda.
Une intervention américaine «accroîtrait la violence et déclencherait une nouvelle vague de terrorisme», insiste le locataire du Kremlin. «Il est inquiétant de constater qu'une intervention militaire dans des conflits intérieurs dans des pays étrangers soit devenue une banalité pour les Etats-Unis. Est-ce là l'intérêt à long terme des Etats-Unis ? J'en doute.»
«PRENDRE LES GENS AU MOT»
La France, en pointe dans cette affaire, insiste sur la nécessité de faire preuve de «fermeté». «Il faut être ferme, saisir les opportunités si elles existent et ne pas être dupes (...) Il faut prendre les gens au mot et ne pas se laisser prendre par les mots», a déclaré sur RTL Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères.
Dans un communiqué, le Quai d'Orsay a explicité la position française, avec un projet de résolution «dont nous voulons qu'il ait une portée contraignante, qu'il oblige les responsables de ce massacre à rendre des comptes et qu'il mette en place rapidement un contrôle crédible, effectif et vérifiable des armes chimiques présentes en Syrie».
Le plus grand scepticisme domine en Turquie, ancienne alliée du régime de Damas avant de prendre fait et cause pour les insurgés syriens. Le Premier ministre, Tayyip Erdogan, a estimé qu'il était peu probable que Bachar al Assad tienne sa promesse de placer ses arsenaux chimiques sous contrôle international. Pour lui, il ne cherche qu'à gagner du temps pour perpétrer de nouveaux «massacres».
Pour Londres, tout accord doit être mis en oeuvre et faire en sorte que l'arsenal chimique syrien ne tombe pas entre de mauvaises mains.
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