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Antoine Arekion : un apprenti mécano devenu chef monteur en Europe

21 janvier 2014, 10:10

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Antoine Arekion : un apprenti mécano devenu chef monteur en Europe

Il se donne les outils pour réussir. Antoine Arekion s’envole vers la Suisse à l’âge de 50 ans. Là, il décroche un travail où son expérience est valorisée.

 

Antoine Arekion caresse le rêve d’un projet de formation et de revalorisation pour les techniciens mécaniciens mauriciens.



Il a 17 ans quand il commence sa carrière comme apprenti mécanicien pour le compte de la compagnie sucrière de Beau-Plan. Trente-neuf ans plus tard, Antoine Arekion sillonne les plus grandes villes d’Europe en tant que monteur-principal des plus gros broyeurs de déchets en Europe et probablement au monde. Il est employé depuis sept ans par la Société industrielle de la Doux, une multinationale basée en Suisse.

 



Nous avons rencontré le quinquagénaire, assis sous un filao sur la plage de Flic-en-Flac, vêtu d’un simple short et d’un T-shirt et élégamment coiffé d’un chapeau de paille. Difficile de croire que cet homme à l’aspect plutôt frêle se déplace à travers l’Europe durant l’année avec des centaines de tonnes d’équipement pour rejoindre des équipes de mécaniciens industriels qui travaillent sous ses ordres. De simple apprenti mécanicien, il est devenu un spécialiste de montage de broyeurs de déchets pouvant peser jusqu’à 35 tonnes.

 



S’il a commencé sa carrière dans un moulin de canne à sucre, c’est au sein de l’industrie naissante du textile qu’il va la forger. En 1976, il prend de l’emploi dans une des premières usines à Ébène. Pendant 30 ans, il se perfectionne, se familiarise avec les dernières technologies et se forme en autodidacte. De la filature au tissage, il finira par maîtriser la grosse machinerie du secteur de l’habillement.

 



Formation continue

 



«Très tôt, j’ai adopté le principe de la formation continue. Le plus gros de ma formation je l’ai fait sur le tas mais aussi en me documentant. Je lisais tout ce qui me tombait sous la main», raconte-t-il. Il n’y avait alors pas beaucoup d’instituts de formation, dit-il. Cependant, dès l’arrivée des premières écoles techniques, il s’est aussi inscrit aux cours disponibles, souvent en payant de sa poche et quelquefois avec le soutien de ses employeurs.

 



Quand la possibilité d’émigrer en Suisse lui est offerte en 2005, Antoine Arekion hésite. Il pense à ses deux enfants. Et partir à l’aventure à l’âge de 48 ans ne l’enthousiasme pas vraiment. «J’ai pris un peu plus de deux ans à me décider. C’est surtout le manque de reconnaissance professionnelle, que ce soit en termes de statut ou de salaire, qui va influencer ma décision, se souvient-il. J’ai vu beaucoup de jeunes devenir mes supérieurs et quitter l’entreprise une fois qu’ils avaient tout appris de moi. Et c’était toujours un autre qui prenait leur place. Moi je continuais à travailler sous les mêmes conditions médiocres associées à l’industrie du textile.»

 



Divorcé, il quitte le pays à 50 ans, alors que son aînée, Sharonne, est bien installée dans ses études à l’université de Technologie et que son fils, Dicken, est en fin d’études secondaires. Les deux le rejoindront plus tard pour poursuivre leurs études.

 


Après avoir obtenu son permis de séjour et suivi un cours d’intégration, Antoine Arekion se lance à la recherche d’un emploi. «On m’avait dit qu’il serait difficile de trouver un travail à mon âge. Mais je découvre un autre monde où les recruteurs ne s’intéressent qu’à vos compétences et à rien d’autre. Mon CV les a semble-t-il conquis. Je reçois presque en même temps quatre offres et après quatre mois d’essai seulement, je me retrouve avec un contrat à durée indéterminé.»

 



La différence avec son emploi précédent est de taille. Et c’est le cas de le dire en sachant qu’après avoir travaillé sur des machines de quatre à cinq tonnes, il se retrouve devant des monstres avec des capacités de broyage pouvant atteindre les 240 tonnes à l’heure. «Mais je me rends vite compte que mon expérience dans le domaine de la mécanique industrielle vaut son pesant d’or.»

 



Attendu par un chauffeur

 



Après une première tournée sur les sites en Suisse, il est envoyé à Southampton, en Angleterre, pour superviser le montage d’une nouvelle unité de broyage. Quand il débarque dans la ville britannique, il est attendu par un chauffeur. Sa réservation a été faite dans un des plus grands hôtels de la ville et il y a toute une équipe de directeurs et d’ingénieurs qui l’attend pour lancer le travail. «Je ne peux m’en cacher. C’est un sentiment de fierté qui m’envahit à ce moment. Je repense à mes débuts. Mais je sais que je dois me préparer à m’investir dans mon nouveau rôle», raconte Antoine Arekion avec beaucoup de modestie.

 



Petit à petit, l’homme, qui rappelle son engagement de «syndicaliste très actif» au sein du Textile and Clothes Manufacturing Workers Union, impose son style. «Quand j’arrive sur un chantier, il y a déjà une équipe de techniciens mécaniciens recrutée à travers le pays. Afin de m’assurer d’avoir une équipe solidaire et prête à travailler dur, ma première démarche est de vérifier leurs conditions de travail et de logement. Je m’assure ainsi d’un travail fait correctement et dans les délais.»

 



Antoine Arekion rêve désormais d’un projet de formation et de revalorisation pour les techniciens mécaniciens mauriciens. Sous son fi lao à Flic-en-Flac, il réfléchit déjà aux arguments qu’il présentera à ses employeurs, une fois rentré en Suisse, pour les convaincre de soutenir son projet. Avant de s’envoler vers une autre métropole pour faire montre de ses talents.