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Dr Praveen Mohadeb : « Nous sommes en train de créer un pilier de l’économie »

4 octobre 2010, 11:06

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? Combien d’étudiants étrangers avons nous actuellement à Maurice ?

À peu près 800. La majeure partie se trouve à la SSR Medical College, avec environ 350 à 400 étudiants étrangers sur un total de 600. À l’université de Maurice, vous en avez une quarantaine. À l’Institut de la Francophonie, il y en a une centaine…

Et puis, il y a la Mauras College of Dentistry, l’université de Technologie et quelques autres encore qui accueillent des étrangers. Dans deux ou trois ans, il y aura une plus grande diversité de cours, plus d’accent sur la recherche, beaucoup d’acteurs dans le privé et dans le public, un taux d’inscription d’étudiants mauriciens de 50 à 60 %, et quelques milliers d’étudiants étrangers.

? Ne croyez-vous pas qu’en offrant autant de places à des étrangers dans notre pays, cela va limiter la place des étudiants mauriciens ?

Je ne le crois pas. D’ailleurs, si je prends l’exemple de deux ou trois institutions qui offrent des diplômes en médecine chez nous, le permis qui leur a été accordé par le gouvernement mauricien stipule qu’il y a un minimum de Mauriciens qui doivent être admis. À l’école dentaire de Mauras par exemple, il doit y avoir un minimum de 20 % de Mauriciens. Au fait, moi, je vois cela d’une autre façon : si par exemple demain une école d’architecture privée s’implante à Maurice, cela donne une opportunité aux Mauriciens de suivre des cours qui ne sont pas offerts dans les institutions publiques, et cela sans avoir à quitter son pays. De plus, les institutions additionnelles permettront aux Mauriciens d’avoir un plus large choix. En plus, la compétition entre les institutions leur sera bénéfique.

? Ne réserver que 20 % de places à des Mauriciens dans une institution basée à Maurice, c’est quand même peu ?

20 %, c’est le minimum. Cela dépend de la demande. Par exemple, l’école dentaire a commencé avec 8 étudiants mauriciens sur 40, aujourd’hui, elle en compte 30 sur 40.

? Les frais sont plus chers pour les étrangers. N’y a-t-il pas de risques que ces universités les favorisent car cela est plus rentable ?

Oui, c’est possible. Mais quand on parle d’Afrique, en particulier les pays de la Southern African Development Community, leurs frais d’études seront les mêmes que les Mauriciens. Donc, la question ne se pose pas pour eux. Pour les étudiants venant ailleurs que de l’Afrique, les frais devraient effectivement être plus élevés. Mais, c’est l’usage. C’est pour soutenir les locaux.

? Le ministère de l’Enseignement supérieur compte atteindre les 100 000 étudiants étrangers en 2020. N’est-ce pas déraisonnable ?

Pas du tout. 100 000, ce n’est pas beaucoup. Il y a plus de 2,9 millions d’étudiants qui quittent leur pays d’origine pour étudier chaque année. En 2025, il est prévu qu’environ 8 millions de personnes étudient en dehors de leur pays d’origine. Nous n’en voulons que 100 000. Il faudra, pour cela, de l’espace pour des infrastructures additionnelles. S’agissant des universités publiques, le ministère de tutelle est en train de faire le maximum pour en ouvrir dans différentes parties du pays, notamment à Pamplemousses, Piton, Highlands, Montagne-Blanche et Rose-Belle. Il faut aussi proposer de nouveaux cours. Il importe également de déployer toute une stratégie de marketing pour vendre Maurice comme une destination de l’enseignement supérieur. De plus, on aura à faciliter l’octroi des permis de construire, de visas pour les étudiants et de permis de travail pour les académiciens qui viendront éventuellement chez nous. Nous sommes en train de finaliser notre plan stratégique dans lequel sera explicité le rôle des différentes parties concernées pour parvenir à ces résultats.

? Qu’en est-il des étudiants mauriciens ? Combien y en aura-t-il en 2020 à poursuivre des études supérieures ?

Je dirais quelque 80 000 à 85 000.

? 85 000 étudiants mauriciens pour 100 000 étudiants étrangers, n’y a-t-il pas un problème ? Est-ce que nous ne négligeons pas les locaux ?

Non, pas du tout. Graduellement, cela va s’équilibrer, car, nous pourrons utiliser les milliards que nous aurons grâce aux étudiants étrangers pour encourager davantage de Mauriciens à étudier en leur proposant entre autres des subventions additionnelles.

? Nous offrons tant de places à des étrangers, mais qu’aurons-nous en retour ? Les étudiants ne dépensent pas beaucoup.

Rien qu’en comptant leurs frais d’études, leur billet d’avion, leur hébergement, un étudiant étranger dépensera en moyenne Rs 300 000 par an. Sur un total de 100 000 étudiants, cela nous fera Rs 30 milliards par an. C’est un pilier de l’économie que nous sommes en train de créer. Le textile a commencé ainsi.

? Et au sujet de l’hébergement ?

Pour le moment nous n’avons pas grand-chose à offrir. Nous avons un projet pour la construction de Halls of residence.

? Quid du prix que pratiqueront les institutions d’enseignement supérieur à venir ? La «Tertiary Education Commission» (TEC) aura-t-elle un pouvoir de contrôle là-dessus ?

La TEC ne contrôle pas le paiement des frais d’inscription et autres. C’est un contrat entre l’institution et l’étudiant. Mais, nous gardons un droit de regard sur la question. Si une institution pratique des prix très exagérés, on va leur en parler. Mais on ne veut pas contrôler. On est dans un marché libre après tout.

? Au sujet de la qualité de l’enseignement : n’y a-t-il pas un risque de se vendre au plus offrant pour atteindre l’objectif fixé ?

Nous ne ferons aucun compromis sur la qualité. Nous acceptons une institution d’après des critères établis. En premier lieu, l’institution doit être reconnue dans son pays d’origine, sinon on ne l’accepte pas.

De plus, il y a 14 autres règles à respecter, telles que le contenu des cours, l’environnement pour l’enseignement, les chargés de cours, comment se font les examens, comment est la bibliothèque… Et nous sommes très stricts sur le respect de tout cela. De plus, si une institution ne respecte pas les règles, ses concurrents se chargeront illico de le dénoncer. Par exemple, s’il y a une institution qui offre des doctorats alors qu’il n’en a pas le droit, le lendemain, j’aurais cinq lettres sur mon bureau. C’est ainsi à Maurice.

Donc, quelque part, le secteur va s’autoréguler.

? Quelles sont ces nouvelles filières d’études que vous souhaitez proposer ?

Il y a l’architecture, la médecine, la nanotechnologie, la Marine Science, le développement durable, entre autres.

? Quels sont les pays que vous visez ?

Nous en visons plusieurs, mais l’Afrique paraît un marché un peu plus facile avec un accès limité à l’enseignement supérieur.

? Y a-t-il des risques que des universités ou des parties de l’île deviennent des enclaves pour étrangers ?

Non, je ne vois pas comment. Il y a pas mal d’étudiants mauriciens et plusieurs autres nationalités qui vont étudier au Singapour par exemple. Et il n’y a pas d’enclave pour autant là-bas.

? «Amity», une université indienne, s’implantera chez nous en 2011 suite à une mission du ministre de l’Enseignement supérieur en Inde le mois dernier. Y a-t-il d’autres universités avec lesquelles vous négociez ?

Oui, il y a la JIS Group de l’Inde, la Techno Global University de l’Inde aussi, l’université Lim Kok Wing de la Malaisie. Nous sommes aussi en pourparlers avec une école vétérinaire. Il y a quelques autres universités dans notre viseur, mais nous ne sommes pas suffisamment avancés dans les négociations pour en parler.

? Quels sont les atouts que vous mettrez en avant dans votre stratégie marketing ?

D’abord le coût de la vie relativement faible.

Ensuite, le fait que nos diplômes sont reconnus : la TEC est un membre de l’International Quality Assurance Agency for Education. Nous offrons déjà quelque 660 programmes à différents niveaux.

L’accès à l’internet n’est pas mal. Il y a la stabilité politique et la sécurité. Nous avons un service de santé gratuit. Nous sommes très bien situés à quatre heures de décalage horaire de Greenwich.