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Eddy Balancy: « Le Comité de l’Onu confirme un principe essentiel de la démocratie »

5 septembre 2012, 00:00

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Eddy Balancy: « Le Comité de l’Onu confirme un principe essentiel de la démocratie »

Le juge Eddy Balancy, devant qui la motion de Rezistans ek Alternativ était passée en 2005 et qui avait donné raison à ce parti, revient sur la décision du Comité des droits de l’homme.

 

Comment accueillez-vous la décision du Comité des droits de l’homme sur la nécessité ou non de ceux qui veulent se présenter candidats aux élections d’avoir à déclarer leur appartenance ethnique ?


Je suis content de cette décision. Il abonde dans le sens de mon raisonnement dans le cas de Rezistans ek Alternativ en 2005. Raisonnement épousé par la juge Gulbul qui, cependant, tout en affirmant qu’elle pensait comme moi, avait dit qu’elle se sentait liée par la décision du Full Bench de la Cour suprême qui avait renversé mon jugement de 2005. A ce stade, je dois dire que je n’ai pas encore étudié tout l’argumentaire du Comité des droits de l’homme de l’ONU, mais suivant un bref coup d’oeil, j’ai noté une référence à ma décision et à celle de la juge Gulbul ainsi qu’une discussion des arguments soulevés dans les précédentes affaires.


Cette décision du Comité des droits de l’homme vous étonne-t-elle?


J’étais assez confiant que, dans cette affaire de Rezistans ek Alternativ, le Comité des droits de l’homme allait abonder dans mon sens.

Quelles sont les implications de cette décision ?


Il faut savoir que notre plus haute cour, c’est le Conseil Privé auquel on fait appel dans des cas exceptionnels sur des questions d’intérêt public à Maurice. Dès lors, on peut arguer que c’est sa décision qui doit primer. Or, dans ce cas, sa décision ne va ni dans un sens ni dans un autre par rapport à la question de la constitutionnalité du règlement imposant la condition de révéler son appartenance ethnique. Pour le Conseil Privé, c’est une question qui relevait plus de la politique que du judiciaire. Donc, ceux qui sont contre la décision du Comité des droits de l’homme soutiendront qu’il faut laisser les politiques décider.

Et ceux qui sont en faveur de cette décision ?

Ils feront surtout remarquer que c’est la crédibilité du pays qui est en jeu. Il faut se rappeler que Maurice est signataire de l’International Covenant on Civil and Political Rights de l’ONU. A ce titre, le pays se doit de respecter ses engagements. Il n’y a aura pas de mesures punitives si nous ne respectons pas ces engagements. La sanction, ce sera l’opinion internationale.


Reste une dimension politique dans toute l’affaire…

C’est cette dimension politique qui semble avoir été un facteur non négligeable dans la décision du Conseil Privé ne pas trancher dans un sens ou dans l’autre. Mais, d’un autre côté, il y a l’argument à l’effet que le Conseil Privé aurait dû fonder sa décision uniquement sur des principes juridiques. Soit se limiter à la question qui lui avait été soumise, à savoir s’il y avait eu entorse ou non à la Constitution mauricienne. Finalement, je dirais que le Comité des droits de l’homme confirme un principe essentiel de la démocratie. Il faudrait des arguments très forts pour ne pas aller dans le sens de sa décision. On peut se référer aux spécificités mauriciennes mais il faudrait qu’on se limite à celles qui sont vraiment pertinentes. Notamment la réalité des mariages mixtes avec des enfants qui peuvent difficilement se caser dans l’une des classifications imposées plutôt que l’attachement de certains au système anachronique du Best Loser. Il ne faudrait pas qu’on utilise à mauvais escient ces fameuses « spécificités mauriciennes ».

Propos recueillis par Nazim Esoof